Partie 1: l'Enfance. I. L'enfant à mourir

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Dans une chambre riche, au Palais Royal, une femme étouffait ses cris. À ses côtés, deux Sages femmes seulement et un général derrière la porte.
L'accouchée refusa de voir l'enfant et le donna au militaire dès qu'il naquit. Celui-ci le donna à un soldat en qui il avait toute confiance. Les ordres étaient clairs. À la faveur de cette nuit sans lune, le nourrisson devait disparaître sans laisser de trace.
Le soldat pris l'enfant et commença son chemin, tapis dans l'ombre des couloirs.

— Ian !

Le commandant sursauta à l'entente de son nom. Masquant la présence du poupon, il se tourna vers son camarade.

— Géry. Que fais-tu ici?

L'homme soupira, souleva et agita sa bouteille.

— Je bois.

— Je le vois bien, mais pourquoi ici?

— La prison est bruyante. L'une des prostituées accouche.

— Ils ne vont pas survivre.

C'était un constat. Aucun médecin n'était appelé pour les prisonniers tant qu'il ne s'agissait pas d'une épidémie. Non seulement le manque d'aide mais l'insalubrité des cellules ne permettaient généralement pas à l'enfant et à la mère de vivre plus d'un an. Ian regarda le paquet qu'il tenait contre son cœur. Le garçon dormait paisiblement, sans se douter du danger qui le guettait. Le soldat repris son chemin vers un endroit qu'il connaissait bien. Un endroit où lui et sa compagnie s'assuraient que personne n'y survive.

Une fois arrivé, il posa le nouveau-né sur la pierre qui servait parfois de billot. Sa froideur réveilla l'enfant qui commença à pleurer. L'homme sortit sa dague et l'approcha du petit corps.
Il avait froidement tué, exécuté et assassiné de nombreux gens, cependant, un enfant était différent. Il n'avait encore rien fait de mal. Son seul péché avait été d'être né d'une union adultère. Il n'était pas en faute. Le tuer, selon le soldat d'élite, le transformerait non seulement en meurtrier mais aussi en monstre. Malheureusement, il ne pouvait non plus le laisser vivre.

Il reprit l'enfant et se dirigea vers la prison où travaillait son ancien compagnon d'armes. Celle qui jouxtait le palais et qui a défaut d'ennemis politiques et de prisonniers de guerre, rengorgeait de condamnés à perpétuité et du surplus de la prison civile.
Il suivit les cris jusqu'à une petite cellule au deuxième étage. La deuxième en partant de la fin du couloir en face des escaliers. La geôle était ouverte, laissant deux soldats assister le travail de la jeune femme. Elle semblait avoir dans la petite vingtaine, des cheveux bruns, un visage émacié, des traits épuisés.

Ian entra à son tour et regarda les jambes de la prisonnière. Selon son expérience sur les champs de bataille, où de nombreuses villageoises lançaient leur travail sous la pression qu'elles subissaient, l'enfant se présentait mal. Il poussa l'un des geôliers pour prendre se place. Il posa ensuite l'enfant à ses côtés, personne ne lui prêterait attention et s'excusant, il remonta ses manches.

La femme se crispa et lança un nouveau cri. L'enfant retourné, la tête finit par sortir. Lorsque la fillette fut complètement sortie, les geôliers s'en allèrent, laissant les clefs à l'accoucheur.

— Félicitations, c'est une fille. Et un garçon, ajouta-t-il en jetant un coup d'œil au paquet emmailloté.

La femme pris sa chair et son sang entre ses bras, laissant le soldat s'occuper du reste. Elle observa ensuite ce fils qu'on lui apportait et trouva la force de demander :

— Qu'a donc fait sa noble dame de mère pour qu'un garçon soit ainsi délaissé?

— Je te le confie.

Arran : entre Vengeance et DevoirWhere stories live. Discover now