Chapitre 12 - Falco

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27 août Soir

Je tends un billet de cinquante dollars au chauffeur de taxi qui vient de me déposer sur Ocean Avenue. Il m’a déconseillé de traîner dans le quartier, arguant que ce n'était pas le plus sûr en soirée. Sa prévenance m’a fait sourire. Ai-je l’air d’un type incapable de se défendre en cas de problème ? D’autant plus que je ne suis pas venu les poches vides. Un cran d’arrêt dans celle arrière de mon jean et un coup de poing américain dans celle de ma veste, je suis paré à toute éventualité.

Tandis que je me dirige vers le numéro 5 comme indiqué par les deux types qui m’ont accosté à la fac’, je vérifie qu’Irina est toujours bien à l’appartement. J’ai interrogé tous mes colocataires sur leur projet de ce soir juste pour savoir ce qu’elle avait prévu elle. Il s’avère qu’elle projette de bûcher sur le devoir de M. Anderson. Elle veut à tout prix être celle qui décrochera cette place pour le vernissage. Parfait, ça m’arrange qu’elle ne bouge pas de chez nous.

Arrivé devant la façade quelque peu décrépie d’un immeuble de quelques étages, je grimpe les marches menant à l’entrée, surveillée par deux gars. Ils paraissent avoir mon âge. Tout juste la vingtaine. Ils se tendent dès que j’approche.

— Mec, tu te gourre de piaule, c’est pas ici que tu dois venir, m’arrête celui qui porte un bonnet avant même que je sois à leur hauteur.

— On est bien au 5 ?

— Peu importe le numéro, tu dégages, aboie le second.

— Deux de vos potes m’ont dit de me pointer ici à vingt et une heures.

— Va falloir être un peu plus précis. T’as leur blase ?

— Non, dis-je en haussant les épaules. L'un d’eux avait une balafre sur la joue et l’autre avait le tatouage d’un crâne sur la main.

— Ça devait être Emilio et Felipe.

Et ça balance les prénoms comme ça… Ils ont de la chance de ne pas être mes soldats ou ils passeraient un sale moment.

— Reste-là, m’ordonne le jeune au bonnet tout en sortant son téléphone portable. Ouais, y’a un gars qui prétend que tu lui as dit qu’il pouvait venir… O.K, ça marche… Tu peux y aller. Felipe t’attend à l’intérieur.

Les deux mecs s’écartent afin de me laisser passer. Bordel, je sens l’excitation de la baston dès que je mets un pied à l’intérieur. J’ai une furieuse envie de cogner dans quelque chose. Je n’ai pas pour habitude de rester inactif si longtemps. Le gars au tatouage à la main sort d’une pièce sur la gauche et me sourit dès qu’il m’aperçoit.

—  Hey mec ! T’es venu, c’est cool !

—  Tu m’as parlé de fric, je ne pouvais pas faire autrement.

Il se marre tout en passant un bras autour de mes épaules pour m’entraîner dans un couloir. D’instinct, je me dégage d’un mouvement de bras brusque.

— Désolé, c’est juste que j’aime pas qu’on me touche.

—  Pas de problème ! me répond-il, pas vexé. C’est noté.

Il ouvre une porte qui dévoile un escalier en bois qui descend dans le sous-sol de l’immeuble. De la musique s’en échappe ainsi que des cris d’encouragements. L’odeur n’est pas très accueillante, mais elle me rappelle celle des caves dans lesquelles il m’arrive un peu trop souvent de traîner pour aider Alessandra ou Mattéo dans leurs tâches.

— Après toi, s’exclame mon hôte en forçant une révérence.

Il étudie soigneusement mes traits pour voir s’il y décèle de la peur. Je me marrerais presque face au ridicule de la situation. Pourtant, je joue le mec hésitant pour donner le change.

Le ProtecteurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant