Chapitre 39 :

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Quelques jours plus tôt :


Carlos n'en pouvait plus. L'espace confiné de la base de la Clé Ensorcelée l'oppressait. Ces murs en pierres noires, cette odeur de souffre perpétuelle, cette constante obscurité. Ces gens, qui tournaient en rond tels des moutons, et qui ne parlaient que d'une seule chose : la Clé. La Clé, et tout ce qu'elle impliquait. L'immortalité. La bonne santé. Le pouvoir. La supériorité.

Gonflant leurs poumons, cette petite étincelle crâne dans leur regard, ces gens croyaient dur comme fer qu'ils allaient bientôt être au-dessus de tous les autres.

Mais Carlos n'en avait plus rien à faire. Cette obsession commençait sérieusement à l'insupporter. Ils n'y arriveraient pas. Il en était maintenant convaincu. La petite blondasse qui traînait avec son ancien groupe d'amis était terriblement bornée, et il était désormais sûr que si quelqu'un s'emparait de cette foutu Clé, ce serait elle. Et encore. Peut-être bien que cette Clé n'était qu'un mythe. Une légende pour les enfants. Ou alors, peut-être était-elle trop bien cachée. Pas faite pour les Sortilistes. Ailleurs, bien plus loin.

Il n'en savait rien. Et il n'en avait plus rien à faire. Cette folie lui montait à la tête, et il n'en voulait plus.

Il voulait une vie simple. Il voulait reprendre les cours, et faire comme les adolescents normaux. Déjà qu'être Sortiliste n'avait rien de normal. Il voulait avoir une vie simple ! Il voulait être fier de ce qu'il avait accompli. Il voulait arrêter d'être bloqué sur Piekrah ou en Espagne, alors que sa vie se trouvait sur Natilma.

Il voulait revoir Aïssa, apprendre à la connaître, à connaître ses goûts, ce qu'elle aimait et ce qu'elle n'aimait pas, ce qu'elle voulait faire dans la vie et ce qu'elle avait vécu. Il voulait revoir son frère, retrouver le temps perdu, passer un peu plus de moments avec lui, même s'il savait que sa vie n'était pas en Espagne.

Il voulait... Il ne savait pas ce qu'il voulait avec Zachary, ni avec la bande, mais il regrettait leur amitié et toutes leurs aventures. Beaucoup.


Ressassant encore une fois ces pensées, le jeune homme souffla et se retourna de nouveau dans son lit. Il n'arrivait pas à dormir. Il retourna son oreiller pour poser sa tête sur le côté froid et essaya de trouver une position confortable. Il avait trop chaud. Il dégagea sa couette d'un coup de pied mais au bout de quelques minutes, la rabattit sur lui. Il avait froid maintenant. Il se retourna une énième fois et souffla à nouveau.

Lassé, il finit par attraper son texteur qui traînait sur sa table de chevet. Il était trois heures quarante-six. Il n'aurait pas de messages à cette heure ci. Il s'apprêtait à le ranger immédiatement pour sortir son portable humain afin de voir si Aïssa avait répondu à son dernier SMS – malgré l'heure. Cependant, une notification attira son regard.

Il cliqua dessus avant de voir le nom de Zachary s'afficher sur son écran. Il en resta interloqué mais ouvrit tout de même la conversation et y découvrit un ficher. Intrigué, le Pyrokinésiste cliqua sur le document. Il s'agissait d'une photographie dans un bureau mal éclairé avec, au centre, un document officiel sur lequel il était écrit :

« Je sous-signée Delfymie Arto, décisionnaire principale de justice, accepte le retour de Carlos Puog sur l'entièreté du Monde des Sortilistes pour y séjourner et y vivre à plein temps à partir du 28 juin 2024.

« J'atteste personnellement que son exclusion n'est plus en activité pour cause de d'annulation des suspicions. »


Son visage s'illumina d'un sourire. Il lut alors les quelques lignes qui accompagnaient l'image. Il était écrit :

« Chose promise chose due

« Il y a la même pour Alen et Selma

« À ton tour maintenant.

« »


Une bouffée d'adrénaline monta à la tête de Carlos. Ces mots lui firent du bien. Un léger sourire flotta sur son visage, simplement éclairé par son appareil électronique. Il relut une fois le document attestant sa nouvelle liberté et son sourire s'agrandit.

En un instant, il avait l'impression que tous ses problèmes étaient résolus. Tous ses questionnements, tout ce qui emplissait sa tête en continu, étaient réglés.

Il prit le temps de digérer l'information avant de répondre. Légèrement excité, il envoya un brève « Merci !! » puis posa son texteur sur sa table de chevet. Il fouilla le tiroir et y dégota son portable humain. Il ouvrit les réseaux sociaux, miroita quelques publications avant de cliquer sur le profil d'Aïssa. Un nouveau sourire fleuri sur ses lèvres lorsqu'il vit son beau visage et ses longs cheveux bruns. En quelques secondes, il écrivit :

« Coucou mademoiselle,

« J'espère que tu vas bien

« J'ai un long week-end et quelques jours de repos bientôt, je pense que je vais rentrer en Espagne voir mon frère et ma mère, ça fait longtemps

« Ça te dirait qu'on se fasse un ciné ?

« Je pense bien à toi en tout cas, à bientôt »

L'adolescent relut une fois son message avant de l'envoyer puis posa son téléphone. Il s'apprêtait à se recoucher mais au bout de quelques secondes, une faible lumière envahit la pièce. Il avait reçu une notification.

Aïssa avait déjà répondu. Fébrile, il ouvrit le message.

« Hello, toi aussi tu fais une insomnie ? ;)

« Bah écoute carrément ! Ce serait super chouette

« Tu me rediras quand tu en sauras plus »


Le jeune homme sentit son cœur s'accélérer. Il avait rendez-vous avec Aïssa. Elle avait accepté.

Il avait hâte de la voir.

Et il avait hâte de retrouver les hauts bâtiments de Natilma. Ils auraient davantage d'espace avec sa tante et sa cousine. Et peut-être Raym.

Peut-être l'homme redeviendrait-il son oncle. Ils vivraient alors tous les quatre pendant quelques temps, puis il prendrait son appartement. Il construira sa petite vie, il se trouvera un métier qui lui plaît. Il se fera un réseau, s'entourera des bonnes personnes.

Ce sera bien. Ce sera vraiment bien.

Tous ses problèmes apaisés, Carlos se rendormit immédiatement, le sourire aux lèvres. 

Octo/ tome 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant