XVI-1 : Le Sanctuaire

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L'Obscur est le pendant de la Lumière

Fourbe et traître, il n'a de cesse que d'essayer de corrompre l'œuvre du Tout-Puissant

L'Obscur dissimule, ment et trompe

Il déforme la réalité, empêche de la percevoir

Il mène au froid, au néant, à la mort

Ses apôtres maudits n'ont de cesse que de répandre le Chaos, le Mal et la Souffrance par-delà l'Univers. Ce sont les Anges Déchus, aussi nommés Itinérants

Grand Livre de la Lumière, chapitre 2, verset 2


Césape abattit plusieurs branches, avant d'aboutir à une petite clairière circulaire emplie de lumière. Un tapis vert clair uniforme s'étendait, dénué d'arbres ou de broussailles. Seule exception à cette régularité déconcertante : une fleur unique, aussi grande qu'un homme, trônait en plein centre. Ses pétales roses chatoyants exhalaient un parfum enivrant.

L'herbe tendre arrivait aux genoux du gigan. Il s'avança, sans se soucier de l'avertissement de Galaniel.

« C'est étrange, ici. Tout y est trop calme, trop mesuré pour être vrai.

— Bof, ce n'est rien qu'une fleur, vous n'allez pas en faire tout un plat. »

Le jeune homme tourna son regard vers Alyne. L'elfine ne connaissait pas cet endroit, et encore moins sa flore ou son éventuelle faune. Elle fit quelques pas, et balaya du regard les frondaisons des arbres attenants. Quelques lézards dorés parcouraient les troncs d'argents, de petits animaux à fourrure bleue sautillaient d'une branche à l'autre. Rien d'inquiétant en apparence, donc. Comme pour confirmer sa supposition, un grand oiseau rouge au long bec doré survola la clairière et les gratifiant d'un croassement rauque.

Césape s'était déjà approché de la fleur jusqu'à la toucher, comme attiré par un aimant invisible. Jamais il n'avait senti de parfum aussi voluptueux.

« Vous feriez mieux de venir, leur lança-t-il. Je vous assure que ça en vaut le détour. Et puis si ça se trouve, c'est les Voyageurs qui ont conçu cet endroit pour qu'on puisse faire une pause. D'ailleurs, on a encore tout le temps nécessaire avant d'arriver, n'est-ce pas ? »

Galaniel jeta un regard interrogateur à Alyne, qui haussa les épaules. Finalement, tous deux se décidèrent à le rejoindre. Césape semblait en extase.

« Humez-moi donc ce parfum. Je n'ai jamais rien senti d'aussi délicieux. »

Il effleura la fleur du bout d'une de ses pattes griffues, et la sentit frémir. Puis le sol trembla, si bien que Césape perdit l'équilibre et roula aux pieds de ses compagnons, médusés.

« Je vais très bien, ne vous en faites pas. Ce n'est qu'un petit séisme. Vous n'avez pas ça, chez vous ? »

Il se releva, puis se retourna. La terre s'était soulevée devant eux, alors qu'une gigantesque tête végétale s'extirpait du sol. Sur le dessus subsistaient l'herbe régulière de la plaine ainsi que la fleur, devenue simple ornement ridicule. Quatre orifices rougeâtres perçaient la masse végétale, encadrés de mousse et de lichen, et semblaient dévisager les trois arrivants.

Mais le plus impressionnant restait ce gouffre infernal, une gueule béante aux dents presque aussi grandes qu'un humain.

« Euh... C'est quoi ce truc ? »

Par réflexe, Césape attrapa sa hache à deux mains, de même que Galaniel, qui dégaina aussitôt son épée. Seule Alyne laissa ses deux doubles lames dans son dos ; ses mains blanches se couvrirent néanmoins d'étincelles.

La Prophétie du VoyageurWhere stories live. Discover now