3h21

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Louis a conduit rapidement. Mais nous venons juste d'arriver sur le parking de la fête foraine. J'ai peine à croire qu'il soit trois heures passées et que tant de gens soient encore là pour s'amuser. En même temps, en repensant à notre situation, nous sommes peut être les moins aptes à nous amuser, à première vue. Surtout que Louis a gardé sa tenue de surf et se promène pieds nus. Je frappe mon front et continue à avancer avec lui, puisque, la chance étant avec nous, il a trouvé rapidement un emplacement.

"Dis-moi, avant que nous ne nous entendions plus dans ce brouhaha, quelque chose que tu m'as dit dans la voiture me perturbe."

"Vas-y, je t'écoute." Sous le coup de la colère, j'ai pu dire n'importe quoi. J'ai peur de ce que j'ai pu moi-même dire.

"Tu as insisté sur le fait que j'aimais les femmes. Ça te surprend?"

"Quoi?!" Je ne m'en étais pas rendu compte.

"Je répète, Harry. Est-ce que le fait que je sois en couple avec une femme te choque ou te dérange ?"

"Pourquoi ça ? Du moment que tu es heureux, je m'en fous!"

Il sourit et baisse les yeux sur ses pieds. J'avance dans la file.

"Et si j'aimais les hommes, comme toi? Tu en dirais quoi?"

"Je dirais la même chose. Tu peux même être zoophile, peu importe. Je ne veux que ton bonheur."

"Merci", me souffle-t-il. "Ce qui me fait beaucoup de bien avec toi, c'est que je sais que quels que soient mes choix, tu m'aimeras toujours autant et tu ne me jugeras jamais."

Tu m'aimeras toujours autant. "Plus qu'hier et moins que demain."

"Quoi?", me demande-t-il.

"Merde, ça m'a échappé. Désolé."

"Non, c'est mignon. Moi aussi, je t'aime plus fort qu'hier et moins que demain."

Il se hisse sur la pointe des pieds et embrasse ma joue. Je me sens rougir furieusement. Il attire ma taille contre lui pour me garder à ses côtés comme par peur de perdre.

"On fait quoi? On prend un forfait?", me demande-t-il, me faisant revenir à la réalité.

Je réfléchis. Les forfaits sont souvent plus avantageux.

"Ok, forfait temps ou attractions?"

"Attractions ! On peut être sûrs de faire plus de choses qu'en une heure, et en plus on peut griller dans les files d'attente."

"Vendu!", je dis en riant face à son excitation d'enfant à la soirée de réveillon de Noël.

Nous entrons et achetons un forfait pour dix attractions au choix. Alors que nous nous dirigeons naturellement vers un stand de nourriture, car nous avons tous les deux faim, Louis lève les yeux sur quelque chose qui s'élance dans les airs et je lis dans son regard son irrépressible envie de le faire. Pris par la peur du vertige qui me ronge depuis mon enfance, je serre les dents et le suis en silence. Lorsque nous arrivons, nous remarquons qu'un panneau indique la fille correspondant à notre forfait. Je me sens un peu mal de passer si facilement devant des gens qui doivent attendre depuis des heures. Louis m'attrape le bras. L'homme de la sécurité nous explique rapidement le principe de l'attraction.

"La boule en ferraille est rattachée aux deux poteaux de chacun cinquante mètres de haut. Quand elle est au sol et stabilisée, on vous appelle. On va venir vous attacher. Bien sûr, pour éviter tout choc brutal physique, la boule est équipée de sièges qui vous tiendront maintenus fermement. Vous pouvez vous donner la main si vous avez peur ou... pour, bref. Quand la boule s'élancera dans les airs, vous pourrez bénéficier d'un panorama à 360° sur la ville. C'est exceptionnel. Vous pourrez prendre des photographies avec votre smartphone quand les lumières vertes seront allumées au sommet des poteaux. Quand elles redeviendront rouges, vous aurez dix secondes pour ranger vos appareils avant d'être propulsés encore plus haut pour finalement revenir vous poser au sol."

J'avale ma salive. J'ai fortement les jetons de ce genre d'attraction. Louis me prend par la main et l'homme nous conduit dans la boule. Nous sommes ceinturés et bouclés jusqu'au thorax. Ma respiration se coupe quand j'entends les secondes défiler en ma défaveur. Et avant même que j'ai le temps de fermer les yeux, nous sommes élancés dans les airs. Je me rends alors compte que les doigts de Louis sont entrelacés aux miens. Il me sourit, de son sourire angélique, sa bouche en V, toute froncée, et fermée. Ses yeux brillent comme ceux d'un gamin.

"Je suis heureux d'avoir fait ça avec toi, Harry, vraiment", me dit-il en caressant ma main avec son pouce.

Je vais décéder à cinquante mètres de haut mais pas à cause du vertige, juste à cause du comportement de l'amour dérobé de ma vie.

"Selfie?", me propose Louis en tendant son téléphone en format paysage devant nous.

Je dégaine le mien aussi vite que possible et prends des photos de Los Angeles la nuit. C'est magnifique.

"Eh, Harold, par ici", me rappelle Louis en me tapant sur la cuisse.

Je me retourne. Il prend au moins dix photos et finit par m'embrasser la joue longuement en continuant à prendre des clichés. Puis quand le signal devient rouge, il se retire et range son appareil.

"Si j'avais eu du rouge à lèvres, tu aurais gardé la trace pendant une semaine, même avec deux douches quotidiennes."

Nous rions et décollons de nouveau dans un cri, avant de nous reposer sur le plancher des vaches.

Nous sortons de la boule sous les applaudissements (?) et les sifflets. Un homme revient avec quatre cornets géants de frites et regarde ses enfants attendre devant le cordon bleu pour accéder à la boule.

"Vous n'êtes pas encore montés?", demande-t-il surpris.

"Non, un type pieds nus en combinaison de surf et son pote décoiffé en débardeur nous ont grillé avec leur forfait Attractions."

L'homme ouvre de grands yeux. Nous nous mettons à rire et le saluons en recommandant aux enfants d'en profiter.

"C'est magnifique que tu aies surmonté ta peur pour moi, Harry."

Je rougis et frotte son dos.

"Ça n'est rien. Ça m'a donné des ailes."

Il me rapproche à nouveau de lui.

"On va où maintenant?"

"Faire quelque chose de moins... fou?"

"Ok alors, on va aller gagner un gros nounours en peluche au stand de tir?"

"Avec plaisir.", dis-je en riant.

Je n'ai plus aucune notion du temps qui passe, je suis juste avec lui et c'est ce dont j'ai besoin. Je ne pense même pas à demain, je vis le moment présent et il n'y a rien d'autre à faire.

Le Mariage De Mon Meilleur Ami [l.t&h.s]Where stories live. Discover now