P11- Un froid glacial

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Tout de suite, j'eus envie de le prendre dans mes bras, de pleurer sur son épaule, de contempler ses yeux à en mourir d'émerveillement, de me sentir protégée, entourée.

De combler cette sensation horrible de vide, comme s'il me manquait un organe, comme si ma respiration en était saccadée, irrégulière, comme si ma vie n'était plus comme avant, que plus rien n'avait de sens, de beauté, ni même d'intérêt.

Mais j'ai vite remis les pieds sur Terre, et effacé brusquement ce sourire de mes lèvres.

On était en froid tous les deux.
Je l'avais blessé, et lui aussi.
Et il attendrait sûrement quelques explications.

Et puis en posant le pied sur le trottoir, je me rendis compte que je n'avais pas vraiment envie d'aller lui parler, de me faire du mal encore...
Je finirais bien par l'oublier de toute manière, c'est qu'un garçon parmi tant d'autres après tout...

Alors je pressai le pas, sentant l'appréhension monter au fil de la vitesse de mes enjambées.
J'en avais presque les larmes aux yeux, et les baissant, je fis comme ci je ne l'avait pas vu.
Comme si je ne le connaissais pas.
Comme s'il n'existait plus.

Mais il m'attrapa par le bras.

Lukas - Eh ! À quoi tu joues ?

Je sentis la colère dans sa voix, forte, comme impossible à dissimuler.
Mais aussi une certaine désolation.
Et surtout, beaucoup de tristesse, et de contrariété.

Quelle cruche je faisais.
C'était mon meilleur ami...

C'était. Et ce ne sera plus.
Je ne voulais plus entendre parler de notre amitié finalement.
Ça me faisait trop de mal,
beaucoup trop.

Moi - Je dois passer, excusez-moi.
Lukas - Attends... quoi... ?

Il me lâcha, on aurait dit que soudain le monde s'écroulait à ses pieds.

Je dus retenir mes larmes tant bien que mal, et c'est pourquoi je partis aussi rapidement que mes jambes me le permirent.
Il ne me suivit pas.
Et en entrant dans l'enceinte du bâtiment, alors que la sonnerie retentit, je regardai derrière moi.
Personne.
Aucune trace de Lukas.

Et là, à ce moment précis, ce moment où tous mes amis s'attroupèrent autour de moi avec des sourires lumineux et des mines joyeuses et rayonnantes,
je réalisais que j'avais sans doute commis l'une des plus grandes erreurs de toute ma vie.

Alors mes larmes coulèrent, et silencieusement, je prenais conscience du monstre que j'étais.

La vie est un don,
un cadeau qu'on nous offre.

Mais tous les cadeaux ne nous correspondent pas forcément.

Après les cours, je partis vive comme l'éclair, au lac qui n'était pas très loin.
L'eau devait être glaciale.
Des flocons tombaient à la surface, s'enfonçant dans les ténèbres de l'eau d'un bleu profond comme la nuit.

Je pris une grande respiration.

J'allais le faire...

Maintenant.

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