Chapitre 8

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Je m'adosse contre le mur du couloir qui sent affreusement la pisse, pas encore prêt à entrer dans l'appartement. Pas encore prêt à affronter Matt et Leïla, faisant comme si j'allais bien.

Je ferme les yeux l'espace de quelques secondes, exténué et a la fois chamboulé. Chamboulé parce que tout ce que j'essayais d'enfouir au plus profond de mon esprit a refait surface en un rien de temps.

La tête enfoui entre mes mains, je me retiens sérieusement de vomir tout ce que j'ai ingurgité ce soir. Et puis mon ventre... J'ai l'impression que tout remue à l'intérieur.

Je ne peux pas m'empêcher de penser à lui, à tout ce qu'il a pu me faire mais aussi a tout ce qu'on a pu vivre. C'était tellement rien, mais à mes yeux c'était déjà énorme.

Le genre de sensation que tu n'as jamais ressenti avant, persuadé que c'était toi le problème. Et puis, il est arrivé, et il a montré que c'était possible. Que c'était possible que, moi aussi, je sois heureux.

Et il a tout ravagé sur son passage telle une tornade frappant les villes, retournant les habitations d'un simple claquement de doigts.

Comme si c'était facile d'oublier tout ça.

Flash-back.

Je dévale les escaliers, manquant de trébucher une bonne dizaine de fois. Une fois en bas, je me précipite vers la voiture et démarre au quart de tour.

Mon cœur bat la chamade alors que j'essaye de me convaincre que tout ça n'est qu'une blague, une blague de très mauvais goût.

Et puis, ça peut bien le faire rire, lui. Il a toujours pensé que je me foutais de lui alors qu'au fond...

J'essuie rapidement mes yeux qui ont tendance à s'humidifier tandis que mon pied appuie brusquement et maladroitement sur l'accélérateur.

- Avance, connard! Crié-je à l'automobiliste devant moi, qui respecte un peu trop les limitations de vitesse à mon goût.

Je dépasse, malgré la voiture qui s'amène sur l'autre voie, que je pourrais bien percuter de plein fouet si je n'accélérais pas aussi vite.

Oh, et puis merde. Je pourrais bien mourir. A qui je manquerais, après tout?

Je dépasse tout les autres, jusqu'à ce que j'arrive dans ce village. Ce village que je connais peu mais où il y a lui. Lui, que j'aime tellement.

Je gare ma voiture au beau milieu de la route et sort en furie, ne prenant même pas la peine de la refermer derrière moi.

Et plus je m'approche, plus j'ai le cœur qui s'accélère, me donnant presque la nausée.

Courir les quelques mètres restants. Oui. Il le faut.

Je cours le plus rapidement possible et, lorsque j'atteint enfin la porte, je me jette dessus.

- Ethan!

Seule ma voix résonne dans la maison, qui semble avoir été complètement retournée.

Le peu de meubles restants sont par terre et le lieu est poussiéreux, comme si plus personne ne vivait là depuis des lustres.

Non.

Pas ça.

J'attrape une photo de famille, qui semble ne pas avoir fait parti du voyage.

Et je l'aperçois lui, un grand sourire aux lèvres.

Je m'écroule, incapable de retenir toutes ces émotions qui s'emparent de mon être, me faisant petit à petit basculer. Et je hurle, je hurle jusqu'à m'en briser la voix.

Ils sont partis.

Il est parti.

Fin du Flashback.

Je prends mon courage à deux mains et ouvre la porte, prenant une profonde inspiration pour affronter tout ça. Allez, tu peux le faire. Tu peux sourire, tu l'as toujours fait depuis.

Il est huit heures du matin et Matt doit déjà être prêt à partir.

Le grincement de la porte se fait entendre, et j'entre dans l'appartement, allumant toutes les lumières derrière moi.

- Alors, ça fait la fête toute la nuit? Et c'est quand, que tu part bosser?

Bosser. Comme si à l'heure actuelle j'en avais quelque chose à foutre d'aller au taff.

- Matt, laisse moi décuver avant de me faire la morale.

- Non mais Luke! T'es censé aller bosser au lieu de te torcher toute la nuit, tu sais très bien que on a aussi besoin de cet argent! Tu vis ici, toi aussi!

Je me raidis et le fixe méchamment. Payer. Sans moi, ils n'auraient pas assez pour payer le loyer.

- Je me tire.

- Quoi?

Je me précipite vers la chambre de LEUR appartement minable que je ne fais que payer à leur place. J'attrape mon sac de sport, que je remplis de quelques affaires.

Payer, j'en ai marre de payer pour les autres.

J'en ai marre qu'on me fasse PAYER tout ce que j'ai bien pu faire dans le passé.

Qu'ils aillent tous se faire foutre.

Quelques affaires, ça fera l'affaire.

Je sors, faisant claquer la porte. Et j'entends déjà la voix de Leïla depuis son lit, qui semble avoir eu peur de ce geste qui a failli tout décrocher.

Je claque à nouveau la porte, la porte d'entrée cette fois ci, et me voilà, à peine rentré, de nouveau dehors.

The Boy 2 [BxB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant