Huit

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Le jour suivant, Nathaël se leva de très bonne humeur. Il fit ses devoirs sans difficulté, malgré le fait qu'il soit un peu distrait, et lorsqu'il fut l'heure de son habituelle promenade au parc, il empoigna son sac et partit précipitamment de la maison.

Il parcourut le trajet en un rien de temps, presque en courant, et ne ralentit que lorsque les premiers arbres apparurent dans son champ de vision.

Il s'arrêta entièrement lorsqu'il l'aperçu à sa place, se tenant droite, comme à l'accoutumée.

Il passa nerveusement une main dans ses cheveux d'or, faisant retomber quelques mèches sur son front. Son regard bleu était couvert d'un léger voile d'inquiétude, et les quelques plis sur son front montraient sa nervosité.

Il prit une longue inspiration pour se ressaisir et tenter de calmer les battements rapides de son cœur.

Lorsqu'il fut fin près, il s'avança vers elle. Mais aujourd'hui, il ne continua pas son chemin pour aller s'asseoir sur son banc. Il prit place à ses côtés.

D'abord tendu, il se détendit légèrement en humant la délicate odeur de violette que dégageait Adèle. Alors, d'une main un peu tremblotante, il prit son cahier de croquis et commença un nouveau dessin de la jeune fille, de profil, cette fois-ci.

Le silence, rompu uniquement par le gazouillement des oiseaux et le bruit du crayon esquissant sur du papier, était étonnement agréable.
Nathaël se sentait bien, là. Il était heureux.

Lorsqu'il eut terminé son dessin, il le tendit devant lui pour l'admirer. Le jeune homme en fut remarquablement surpris. Il était encore plus réussi que les autres.

Alors qu'il se délectait de cette sensation de fierté et de joie qu'il éprouvait en voyant le fruit de son travail, une voix retentit.

— C'était un bien injuste jugement, celui qu'on fait les trois filles.

Le timbre était posé, doux et un peu grave. Il fallut à Nathaël deux secondes pour se rendre compte que c'était Adèle qui venait de parler, et deux de plus pour assimiler ce qu'elle venait de dire.

— Oh, je... j'ai l'habitude, balbutia-t-il, alors que les battements de son cœur repartaient au galop.

Adèle replaça tranquillement une mèche de ses cheveux derrière son oreille et, les yeux toujours clos, continua:

— C'est dommage que les personnes jugent sans connaître. Ils perdent tellement d'opportunités de rencontrer des gens qui pourraient changer leurs monde.

Nathaël hocha la tête, bien qu'il soit conscient que la jeune fille ne pouvait pas le voir. Il ne savait que répondre, alors il préféra garder le silence.

Adèle se tut pendant un instant.

— J'étais comme ça... avant, murmura-t-elle, d'une si petite voix que le garçon se demanda s'il avait bien entendu.

Et il sut que si lorsque la jeune fille se tourna vers lui, et ouvrit les paupières pour la première fois.

La respiration de Nathaël se coupa, malgré le fait qu'il savait.

Ses pupilles étaient claires comme du cristal, presque transparentes.

Ses yeux étaient éteints.

— Il faut croire que la vie m'a donné une leçon...

BeauWhere stories live. Discover now