Adèle et Nathaël se rencontraient tous les jours, à présent. Ils se retrouvaient à la même heure, au même endroit, là où ils s'étaient parlés pour la première fois.
Ils avaient vite développé une complicité à en faire jalouser les autres, et étaient en plus de cela très tactiles. Adèle nécessitait souvent un contact physique, pour compenser le sens qu'elle avait perdu lors d'un accident.
Elle touchait tantôt ses cheveux, tantôt son visage, mais se contentait généralement de tenir la main ou le bras du jeune homme. Ce dernier en était plus que ravi.
Au fil des semaines, il avait appris à connaître la jeune fille, qui se révélait être une personne ambitieuse et gaie, souriante et pleine de bonne volonté, en contraste avec son apparence douce et réservée.
Les deux adolescents passaient énormément de temps ensemble. Nathaël avait arrêté de fréquenter le groupe de populaires de son école, et ces derniers ne lui manquaient point. Il se sentait tellement mieux en compagnie d'Adèle. Il savait qu'elle l'écoutait attentivement lorsqu'il parlait, et il pouvait avoir avec elle des discussions vives et passionnées; des débats enragés sur des sujets par toujours très sérieux.
Ils partageaient aussi de longs moments de confidences. C'est ainsi qu'il avait su que la jeune fille était "une peste" avant son accident. Enfin, tels étaient les mots qu'avait utilisé Adèle pour se décrire. Elle avait raconté qu'elle passait son temps à juger les autres sur leur physique, dédaignant les personnes ayant mauvaise allure, et idolâtrant bêtement les plus belles tout en pensant qu'elles avaient forcément une vie de rêve et un ego surdimensionné.
Elle avait conté qu'après avoir perdu la vue, elle avait été forcée à interagir avec du monde sans savoir à quoi ils ressemblaient, et que c'est de cette manière qu'elle s'était rendue compte à quel point elle avait été aveugle, jusqu'à présent.
C'est avec les yeux fermés qu'elle avait appris à voir.
