Chapitre 4

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La jeune fille tira ses couvertures et se retourna sur le côté, enfonçant encore plus sa tête dans l'oreiller.

-Charlie? Ça va? M'entends-tu?

Elle poussa un grognement et ouvrit les yeux.

-Oui... J'ai juste un peu mal à la tête. Ou suis-je...?

Elle aperçut alors un plafond blanc cassé ainsi que la tête légèrement floue de l'infirmière. On aurait dit qu'elle venait de se réveiller d'un lendemain de veille. Le regard rassuré, la dame lui répondit:

-À l'infirmerie. Tu es restée endormie une heure et demie, nous n'avons pas réussi à contacter ta mère. As-tu d'autre famille qui pourrait venir te chercher?

Elle répondit par la négative. En effet, elle n'avait que sa mère, les autres membres de sa famille habitant à des lieux et des lieux de Montréal. Elle était dépourvu de présence paternelle, ce dernier les ayants quittées deux semaines après la naissance de Charlie. L'infirmière continua:

-Tu es sûre que ça va? Tu as... Tu as vraiment eu un sacré choc. Si tu t'étais vue... Te souviens-tu de ce que tu as fait?

Bien sur, elle se souvenait parfaitement de ce qu'elle avait vu, même si elle avait préféré l'oublier, mais ce qu'elle avait fait, elle n'en avait pas la moindre idée. L'infirmière lui expliqua donc en détails -Charlie aurait préféré en avoir moins- ce que le professeur et les élèves lui avait raconté. L'adolescente se sentit alors envahie par un profond sentiment de vulnérabilité. Non seulement cette voix pouvait faire ce qu'elle voulait d'elle, mais en plus ce n'était pas un rêve. Tout cela était réalité, et ça lui donna froid dans le dos. Elle se remémora alors d'un seul coup ce que la voix lui avait dit. Qu'est-ce que c'était qu'une Brytanye? À part un prénom, elle n'en avait aucune idée. Une sorte de... de pouvoir? Était-ce seulement possible? Si une simple voix qu'elle avait rencontrée (et elle ne croyait pas au hasard) dans la cave d'une minuscule bibliothèque que personne ne connaît pouvait faire tant de choses, alors là, c'était possible. Possible, certes, mais pas certain. Et puis elle se demanda; pourquoi elle? Qu'avait-elle fait? Pourquoi s'acharner sur elle? C'est alors qu'elle se souvint. La femme aux cheveux d'ébène, mourrante, et à son chevet, son petit copain. Ses parents. Peut-être n'était-ce que mensonge, tout cela. Une invention que la voix aurait créé pour la rendre plus faible et encore plus vulnérable qu'elle ne l'était déjà. Oui, c'était plausible, très, même. Certes, c'était horrible à dire et à penser, mais elle n'était pas particulièrement attachée à sa mère. Pour tout dire, cette dernière ne s'était pas vraiment occupée d'elle depuis sa naissance. Elle ne pensait qu'à l'alcool et aux jeux et faisait souvent passer sa fille en dernier. La voix de l'infirmière rompit ses pensées:

-Ta mère arrive, elle a appellé. Tu peux te reposer encore un peu elle sera là d'ici une demie-heure. As-tu une amie qui pourra prendre tes cahiers?

-Non, pas spécialement. Mais je vais mieux, mon mal de tête est parti. Je vais les chercher.

-Attend, tu dois te reposer encore un peu...

Mais Charlie était déjà levée et semblait en pleine forme. En pleine forme physique seulement, car mentalement, elle était plutôt perdue. Elle évolua donc d'un pas rapide dans le couloir sous le regard méprisant et sous les murmures des élèves qui se taisaient sous son passage. Elle prit ses choses en ressassant pour la dixième fois les événements; elle avait d'abord découvert une voix sans corps dans une cave piteuse, cette même voix la suivait partout où elle allait,  trouvé une lettre pour le moins étrange et s'était faite comme possédée. En plus de tout cela, elle avait découvert que sa mère l'avait peut-être adoptée. Ça faisait beaucoup, beaucoup trop en deux jours seulement.

Rendue à sa "chambre", elle sorti de son sac un papier ainsi qu'un crayon et y écrit, plus imulsivement que volontairement les mêmes paroles qu'elle avait prononcé devant la classe. Soudainement, des vergetures apparurent sur sa main droite, celle qu'elle avait utilisé pour écrire. Heureusement pour elle, cela ne lui faisait pas mal, mais quelque chose clochait. Elle n'avait pas voulu écrire ça, et elle n'avait aucune idée de ce que signifiait tout ce charabia. Effrayée de ne même plus pouvoir contrôler son propre corps, elle chiffona le papier et le rangea dans la pochette avant de son sac.

Après quelques autres minutes d'attente, sa mère arriva. Elle avait l'air déconfit. Sans un mot, elle l'invita à prendre place dans la voiture. Elle ne lui avait même pas demandé si ça allait. Elle ne lui avait même pas fait part de sa décision de lui faire faire des rencontres avec un psychologue. Rien. Pour tout dire, cela ne dérangeait pas trop Charlie, qui pour l'instant préférait rester dans ses pensées. Le ''paysage'' défilait sous ses yeux et elle se demandait si elle aurait été la même si elle avait vécu avec une autre famille, dans un autre environnement. Sûrement pas. Elle avait toujours senti qu'elle était bien différente de sa mère, mais de là à être adoptée... Non, sûrement pas.

Lorsque la mère et sa fille furent entrées à l'intérieur de l'appartement étrangement propre et pour une fois présentable, le silence fut rompu.

-Charlie, ma belle. Quelqu'un... quelqu'un doit te parler.

<<Ah, non, encore une chose...!>>, pensa la jeune fille.

Elle observa le regard de sa mère. Il était rare de le voir de la sorte. Le bleu de ses yeux avaient virés à un gris-bleu sade et triste.

-Bon, viens-en au fait. Qu'y-a-t-il? Ne me dit pas que l'on doit encore déménager! Si c'est ça, ne compte pas sur moi p...

-Attend. Il nous attend dans la salle à manger, lui répondit sa mère, un sourire triste collé aux lèvres.

La femme triste et la jeune fille inquiète se rendirent machinalement vers la salle à manger, où une troisième chaise avait été rajoutée à la petite table. Là, un homme au regard sage, les lunettes sur le nez et qui semblait assez vieux attendait, plongé dans le journal. Lorsqu'il les entendit arrivé, il leva les yeux.

-Bonsoir, mesdemoiselles, dit-il d'une voix grave avec un accent étrangé.

Charlie leva un sourcil et ne prononça pas un mot.

-Bonsoir, répondit sa mère en lui tendant sa main, geste que l'homme ne retourna pas.

-Vous pouvez vous assoir.

Il disait cela comme si c'était sa propre maison, ce qui frustra l'adolescente qui ne dit toujours pas un mot et qui ne bougea pas du cadre de porte. Sa mère s'assied.

-Ne tardons pas, commença l'homme. J'ai déjà tout expliqué à ta mère. Je ne passerai pas par quatre chemins. Tu es adoptée. Autrement dit, ta mère n'est pas ta mère. Si tu vois ce que je veux dire.

C'était comme si la Terre s'était arrêtée de tourner. Il disait ça comme ça, comme si c'était une évidence, comme si c'était normal. Elle regarda sa mère. Un regard lui fit comprendre que l'homme avait raison.

-Ta mère t'as "adoptée", mais n'a pas rempli les formulaires. C'était comme un engagement. Elle t'adoptait, et ton père lui donnait une importante somme d'argent. Nous ne savons pas pourquoi il ne lui a pas fait remplir les papiers, mais ta mère avait besoin d'argent. Elle a donc accepté.

C'en était trop. Elle s'était carrément faite vendre. Elle paniqua. Elle ne savait plus quoi faire. Elle entendit sa mère prononcer des excuses, excuses qui semblaient vraies, mais resta figée, le regard plongé dans celui de l'homme. Elle essayait de retenir les larmes, et c'était affreusement éprouvant. Cet homme était tout simplement horrible.

-Je suis ton grand-père. Tes parents ne me savaient pas en vie. Légalement, tu devras venir habiter avec moi, en Islande. Ta mère sera accusée de kidnapping. Tu referas ta vie.

Elle partit alors en courant le plus vite possible, claqua la porte d'entrée et sorti dehors sans même prendre de manteau, les larmes coulant à flots.

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Voilà voilà!! J'espère ne pas vous décevoir avec ce chapitre qui n'est pas vraiment à mon goût... Le chapitre 5 pour demain, qui sera bien meilleur, je l'espère! :) Continuez de me suivre et de commenter, ça me fait vraiment plaisir!

TraquéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant