Chapitre 5 - PDV Ellie Samuel -

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Chapitre 5

- Ellie Samuel -

J'ai traversé les couloirs silencieux de l'école, en ce dimanche matin, l'aube peinait à prendre sa place dans le ciel parisien. Je marchais vite, le bruit de mes pas semblait faire trembler les murs. J'ai ignoré les cris de mon estomac et je suis sortie dans la cour intérieure, l'heure n'était pas à la fête et le cœur, autant que l'esprit, n'y étaient pas non-plus.

Je me suis présentée devant le bâtiment annexe, qui abritait en son sous-sol l'arène des jeux semestriels. Kyle Bazin, professeur de sport, mais également coach de l'équipe de basket et surveillant des heures de retenues, me regardait d'un mauvais œil.

– Voyez-vous ça, Samuel ! Comme on se retrouve, tu as perdu quelque chose ? Tes privilèges peut-être ? La princesse se rebelle, c'est mauvais pour toi, tu le sais, n'est-ce pas ?

Il prenait un réel plaisir à me rabaisser ainsi, il aimait ça, faire croire à ses élèves qu'ils ne sont que des moins-que-rien. Il a levé les yeux pour regarder derrière moi.

– Cleenart, alors comme ça, on n'a pas l'habitude de se lever de si bonne heure ? Toujours en retard à ce que je vois, vous faites une fine équipe tous les deux, ce qui est sûr, c'est que l'on a une belle brochette de guignols cette année !

Aucun sentiment n'a transparu sur le visage d'Aiden, je lui ai fait un petit sourire en guise de bonjour qu'il a royalement ignoré. Vexée, j'ai baissé les yeux au sol.

– Très bien, a hurlé le surveillant en frappant dans ses mains, vous n'êtes que des avortons, je vous fais d'ores et déjà savoir que je ne tolérerai aucune transformation, aucun écart de conduite et surtout, aucune désertion ! Soldats, vous ne comptais plus en tant qu'individus, jusqu'à la tombée de la nuit, vos vies m'appartiennent, est-ce clair ?

Ce type est complètement givré, ai-je constaté. Qu'allait-il nous demander de faire ? Serait-ce si terrible ? J'ai regardé Aiden, toujours impassible. Comment faisait-il ? Ne pas savoir ce qui l'avait mis dans cet état était insupportable. Pourquoi avait-il fallu que je sois gelée ce soir-là ?! Pourquoi avait-il fallu qu'il fouille dans ma mémoire ?

On nous a fait nettoyer le grand escalier de la verrière avant le réveil des autres élèves. Notre « vigile », posté tout en haut des marches et veiller au grain. Aiden avait la pratique, il passait la brosse rigoureusement sans obtenir de remarques désobligeantes sur sa façon de frotter le sol.

– Samuel, mettez-y du cœur ! Ce marbre a besoin d'amour, pas de maltraitance !

Je n'avais qu'une envie, lui faire ravaler ces paroles d'un revers de brosse. Le produit d'entretien rongeait la peau de mes mains et me brisait les ongles. Laver le marbre nous a pris deux heures, Kyle jubilait de me voir transpirer ainsi. Il a cherché du regard une nouvelle tâche à nous confier : désherber – à la main, cela va de soit – la cour intérieure était pour lui une excellente idée.

Le temps s'écoulait au compte-gouttes et le silence pesant n'aidait pas. Nous avons arraché des mauvaises herbes toute la matinée, mes genoux, égratignés pas les graviers me piquaient. Je grimaçais de temps à autre à cause de la faim qui me tenaillait le ventre. Pourquoi avais-je tant dédaigné le réfectoire ? Le coach nous regardait nous acquitter de notre besogne depuis le mur où il était avachi. Il jetait des coups d'œil sa montre de temps à autre, plus par réflexe que par utilité. Aiden me fixait quelques fois, les yeux débordants de colère et, lorsque nos regards se croisaient, il le détournait, sans rien laisser transparaître. Le froid matinal me gelait les entrailles, je devais être la seule à ressentir cette sensation de fraîcheur, car aucun d'eux ne bronchait. J'étais exaspérée, ce calvaire n'allait jamais s'arranger... Et, au bout d'un moment, l'inattendu s'est produit :

Âme d'Argent : L'Orpheline Where stories live. Discover now