Âme d'Argent : L'Orpheline

Chapitre 7 - PDV Ellie Samuel -

Chapitre 7

- Ellie Samuel -

Une aile... Une aile rougie... Une aile ensanglantée... Des plumes brunies... Une aile brisée, meurtrie. Le sang qui s'écoulait de la chair, l'odeur âcre qui s'accrochait tant bien que mal à tout ce qu'elle pouvait, à ma robe, aux rideaux, à la peau de tous, aux meubles, à l'air. C'était une odeur tenace, un effluve nauséabond, une puanteur intrigante, un relent de mort...

– Qu'est-ce que c'est ? a fini par demander Aiden, visiblement agacé par le silence.

Je ne pouvais pas détacher mon regard de cette chose... Cette... Partie de cadavre... Cette horreur...

– C'est une aile de paon.

Anthéa Foster semblait abattue, mais il n'y avait pas de réelle tristesse dans le creux de sa voix. Le sang avait imbibé les feuilles sur lesquelles le morceau de chair reposait. Il y avait ce dégoût profond qui restait absent chez elle... Cette curieuse impression... Ce masque plaqué sur sa figure, elle avait déjà vécu cette situation, elle n'était pas atteinte par la peur, par l'angoisse, par la terreur, la panique... Contrairement aux autres professeurs, bien trop écœurés par la situation pour regarder autre chose que le sol.

J'étais incapable de réagir, que faisait une aile d'oiseau sur le bureau de ma tante ? C'était tellement absurde. Cela n'avait aucun sens, cette situation restait incompréhensible à mes yeux.

– C'est une menace, a ajouté Alec Xenor sur un ton rauque, une menace de guerre... Imminente.

Aiden a serré les dents, je suis restée le regard dans le vague, néanmoins, j'ai eu la force de poser ma question d'une voix étouffée :

– Comment ça... Une guerre, comment ça... Une menace... Qu'est-ce que ça signifie ?

Ma tante a recouvert l'aile à l'aide d'un torchon immaculé, elle l'a ensuite déposée dans une bannette en plastique avant de la présenter à Kyle Bazin qui a quitté la pièce. J'ai reporté mon attention sur Anthéa, elle tentait d'essuyer les traces d'hémoglobine. Elle nous a fait asseoir en face d'elle, les enseignants se sont rassemblés autour de la directrice. Ils se sont mis à nous fixer. J'ai avalé ma salive avec toute la peine du monde.

– À la création des clans et lors des premières guerres, celui qui déclarait le conflit envoyait un membre sectionné de l'animal qui est associé à la famille originelle, depuis des siècles, ce rituel barbare a été abandonné... J'ignore comment cette aile de paon est arrivée ici, mais je pense savoir de qui elle vient.

– Du clan Bourgeois ? a proposé un surveillant.

Un simple hochement de tête a appuyé cette théorie, elle s'est levée pour contempler le ciel étoilé de sa fenêtre. Le parquet grinçait un peu, les rideaux en velours voletaient légèrement. Elle a croisé ses bras dans son dos avant de continuer :

– Ellie, je pense que tu es en danger ici, à l'école. Je crois même que cette menace t'est destinée, tu es l'héritière d'un clan, d'une mémoire, d'un patrimoine génétique... Mais également du mien. Tu ne peux pas retourner à New York, je pense que ce sont eux... Les assassins de tes parents. Je ne sais pas comment te maintenir en sécurité, le clan Bourgeois a déjà fait preuve de cruauté par le passé, ils ne s'arrêteront pas avant d'avoir atteint leur but.

C'est alors que j'ai vu la terreur dans le regard d'Aiden.

Sans que je ne la provoque, la Voix est réapparue, plus forte que jamais.

Laisse-moi partir... Laisse-moi être libre...

Je fixais le plafond vide de ma chambre. J'étais angoissée, une bataille... C'était donc à ça que se résumait ma vie à présent ? Survivre cachée entre les murs de l'école, exister dans la crainte d'être assassinée par un membre du clan Bourgeois ? Non... Je ne voulais pas de cet avenir, autant en finir maintenant...