51. Choc

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Voilà le dernier chapitre ! :D bonne lecture !

Nous avons dû retarder notre départ d'une semaine, à cause de ce qu'il s'est passé durant le dîner. Cela m'a permis d'assimiler tout ce que mon frère m'a révélé, même si j'ai encore vraiment du mal à l'appeler ainsi. De toute manière, on ne s'entend pas, et ça m'étonnerait beaucoup que ça change. J'ai pris de la distance avec les autres parce que je me sens coupable. Nell à beau me répéter que non, elle n'arrive pas à me convaincre. Même Veenyr a essayé de me le faire comprendre, mais je ne fais que m'isoler dans la serre. Pour dire, j'y ai passé presque la semaine entière, sous ma forme animale.

En vérité, n'est-ce pas ainsi que l'on finit ? Seul. Peu importe à quel point on essaye, on n'arrive jamais tisser des liens assez fort avec les autres pour qu'ils durent dans le temps. Il suffit d'un mot, d'un mouvement de trop et tout s'effrite. C'est comme ça que j'ai toujours vu les liens entre les personnes ; ce sont simplement de nombreux élastiques qui les maintiennent en contact. Et un jour, ces élastiques lâchent, brisés par le temps. Parfois, c'est douloureux, parfois ils sont tellement usés qu'ils se détachent mollement. On n'est jamais sûr de ce que pensent réellement les autres, de pouvoir leur faire confiance. Cette valeur est pourtant primordiale, mais j'imagine que lorsque l'on a trop côtoyé la trahison, elle n'existe plus. Alors pourquoi les autres m'accorderaient la leur ?

Je ne suis pas humaine. Je ne suis pas non plus métamorphe. Finalement, ce voyage n'a pas été une source de découverte comme je m'y attendais, mais rien d'autre qu'une vaste blague. J'aurais préféré rester ignorante. Ne pas rencontrer ces gens qui m'ont soutenue, alors que je ne sais même pas si je peux croire en moi.

Pourtant, j'avance, parce qu'il le faut. Maintenant, je ne peux plus faire marche arrière, je suis bloquée. Alors je pose le pied sur le sol caillouteux, et j'avance en silence, m'éloignant de l'hélicoptère qui s'envole, emmêlant mes cheveux désormais si singuliers. Je me sens si petite, prise au piège entre ces deux flancs de montagne. Lorsque je lève les yeux en direction du sommet à gravir, les images du Kazakhstan me reviennent en tête. J'affronte la même température, le même ciel gris. Tout en haut, le portail nous attend, prêt à nous mener dans l'autre monde qui me paraît pourtant si loin.

Je me demande ce qu'il se passerait si la terre se mettait à gronder, comme la glace dans ma tête. Si les rochers s'écarteraient pour laisser la place à des crevasses béantes, aussi profonde que les abysses.

- Tu viens ? M'interpelle Veenyr.

Je reviens sur Terre, ne m'étant pas rendu compte que je m'étais arrêtée. Je garde le silence et reprends mon ascension. Mes pensées vont à mes parents, à mon petit frère. Je revois ceux-ci rire, pleurer. Comment se déroule leur vie sans moi ? J'ai l'impression que la partie de mon existence me reliant à eux n'a jamais été qu'un rêve lointain. Je me suis fait la promesse de revenir, mais je n'ai aucune idée de ce qui m'attend de l'autre côté de ce passage. L'avenir est tellement incertain en cet instant précis, que j'ai peur. Pour la première fois de ma vie, j'ai peur du futur, de l'inconnu. C'est comme si ma soif d'aventure s'était envolée avec les quelques réponses qui m'ont été apportées. Je n'ai plus envie de savoir, de découvrir. Je veux juste être heureuse, pouvoir m'épanouir. Mais est-ce possible pour moi ? J'ai peur que l'on m'impose des choix que je ne veux pas faire, que l'on me force à regarder des choses que je ne veux pas voir. Si tout cela se déroule, alors j'aurais fuis mon quotidien pour un autre, peut-être plus difficile. Alors, est-ce la fin d'une vie insouciante ?

Le vent brûle mes joues rougies, alors qu'il fait de plus en plus froid. Il n'y a pas de chemin, il faut escalader. Heureusement, le terrain n'est pas si difficile pour le moment. Je m'aide de mes mains pour être sûre de ne pas dégringoler, mais l'entreprise devient de plus en plus compliquée. En voulant attraper une pierre, celle-ci se détache et roule le long de la pente, entraînant dangereusement d'autres morceaux de roche. Déséquilibrée, je me rattrape de justesse sur un endroit saillant, et ma peau se coupe. Je ne lâche pas, de peur m'effondrer et de me blesser gravement. Je pousse sur mes bras et parvient à m'élever sur une petite plateforme où les autres se sont arrêtés. Je m'assois sur le sol pour récupérer un peu, mais quelque chose dans l'atmosphère me dérange. Je ne saurais dire si c'est une odeur, ou tout simplement la température, mais je me sens d'un coup vraiment étrange.

Sul'Een T1: Les Sanglots De L' ÂmeOnde histórias criam vida. Descubra agora