Les jeux de la couronne. T1

Chapitre 6

Après deux longues heures de combat intensif, j'ai enfin réussi à vaincre le Conquérant namusien. C'est beaucoup trop long. Je n'ai pas réussi à me concentrer sur mes mouvements. Mon adversaire plongeait dans l'eau pour en ressortir à un endroit improbable et me faisait perdre l'équilibre en me jetant des torrents d'eau. Puis il m'attrapait la cheville pour m'entraîner au fond de l'eau afin de me noyer. Plus d'une fois, j'ai voulu retirer le casque pour reprendre mes esprits. Je sais bien que ce n'était pas réel, mais j'ai l'impression que mes poumons sont en feu quand je respire. Mes cheveux sont trempés. La salle doit être pourvue d'accessoires en tout genre, couplés à la réalité virtuelle du casque. Je suis épuisée... Je me mords la lèvre.

Vais-je réussir ?

Je soupire de désespoir. J'aurais pu mourir des dizaines de fois pendant ces deux heures...

A présent, je suis étendu sur mon lit à ressasser ma défaite. Est-ce qu'un jour, je serai capable de les battre aux Jeux ? Je suis prête à faire les sacrifices nécessaires, mais suis-je prête à sacrifier ma vie pour cette cause que je défends ?

Quelqu'un frappe à ma porte. Je sens déjà les courbatures qui se réveillent lorsque je me lève. Mes pas sont lourds et lents. J'ouvre la porte brusquement. Ma mère sursaute puis me regarde de haut en bas.

— Ton entraînement est terminé, je suppose ? demande-t-elle d'un ton froid.

— Oui, je lui réponds après lui avoir fait signe d'entrer.

Je vais devoir me montrer extrêmement prudente. Ma mère n'a pas vraiment accepté que je m'entraîne avec les autres delliens. Je crois qu'elle a peur.

Elle prend soigneusement place sur les bords de mon lit. Elle est tout le contraire de Luther.

— Tu as dit que je pouvais assister aux sélections !

— Y assister et y participer ce n'est pas du tout la même chose, déclare-t-elle alors qu'elle me fusille du regard.

Elle marque un point. J'ai légèrement modifié notre marché. J'ai même le désir de ne pas le respecter du tout. J'essaye quand même d'argumenter.

— Oui, c'est vrai. Tu as raison. Mais, maman, tu sais que les Jeux me fascinent ! Avoir la chance d'être ici et de suivre le même stage que les candidats est un privilège qui ne se refuse pas.

— Pourquoi es-tu tant fascinée par les Jeux ? Je ne comprends pas, je t'ai répété des millions de fois que c'était dangereux. Quand vas-tu enfin m'écouter ?!

Elle parle d'une voix douce, mais je perçois la colère et l'inquiétude dans son ton. Je n'ai pas du tout envie de me disputer avec ma mère. Je tente toujours d'éviter les conflits parce que j'en ai horreur, mais lorsque cela concerne les Jeux, j'ai du mal à faire des concessions.

— Ne t'inquiète pas. Tout le monde pense que je suis de la même famille que Luther et ce statut m'empêche d'être sélectionnée.

— C'est bien ce qui m'inquiète, ma fille. Luther a pris grand soin de tous les convaincre que tu es sa « nièce ». J'ignore ce qu'il a derrière la tête, ni quel plan il prépare, mais s'il te plaît, ne te laisse pas influencer par son zèle dévorant. Je sais qu'il te rabâche les mêmes idées sans arrêt, mais tu dois être plus intelligente que lui. Ta vie est plus précieuse qu'une compétition.

Sur ces paroles, ma mère quitte la pièce en me laissant perplexe. Je me demande si elle se doute de quelque chose. Je tremble, rien qu'à l'idée qu'elle sache tout. Et je tremble encore plus à l'idée qu'elle ne se doute de rien. L'angoisse me ronge de l'intérieur. Que dois-je faire ? Suivre mon désir de participer aux Jeux, sachant que mon niveau actuel ne me permettra pas de survivre ou renoncer en vivant avec des regrets ? Et pourtant... Je n'arrive pas à avoir peur, comme si j'étais destinée à participer. C'est un sentiment étrange que je ne peux expliquer, mais je dois le faire.