Chapitre 18

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Nous nous dirigeons vers le vaisseau, le Triomphe, qui nous emmènera sur Vilaz pour le prochain Jeu. J'embarque avec tous les candidats restants. Les autres, surtout des Explorateurs, sont rentrés chez eux. Certains ont peut-être perdu la vie... Je ne le saurai jamais.

Nous avons une quinzaine d'heures de vol. La plupart des participants sont montés dans leur chambre pour se reposer. Je suis installée, au calme, dans un canapé du salon d'accueil afin de lire un recueil de légendes delliennes de mon auteur préféré, un homme du nom de Lastalaica. Je commence ma lecture.

« Il était une fois, un jeune homme pauvre dont les parents malades comptaient sur sa jeunesse et sa force pour leur apporter nourriture et vêtements. Le garçon quittait la demeure familiale à l'aube afin de labourer les champs. Il cultivait une plante étrange dans une grande serre. Bien souvent, il ne voyait pas la lumière de Titan, trop obnubilé par ses fleurs, ses fruits et ses légumes. Il rentrait au crépuscule, le dos courbé, les mains pleines de terre et les bottes usées. Un jour, alors qu'il rangeait ses outils, il entendit un bruit suspect au fond de son champ, vers la serre où poussait sa plante mystérieuse. Laissant tomber tout son matériel, il courut en toute hâte. Il craignait qu'un voleur lui dérobe son gagne-pain. Il ne pouvait s'empêcher de penser à ses vieux parents qui le verraient rentrer sans le sou, le lendemain. Il passa furtivement près de la porte de la serre et l'entrouvrit discrètement. Ce qu'il vit l'étonna »

— Toujours en train de lire.

Je lève la tête, agacée d'être interrompue dans ma lecture. Ardalôn se tient devant moi, les mains dans les poches, Inti enroulé autour de son poignet.

— Toujours en train de parler pour ne rien dire, je rétorque avec un sourire mielleux.

Je me suis habituée à nos petites chamailleries futiles. Pourtant, je n'ai pas l'intention de le laisser m'interrompre. Je sens le canapé s'affaisser lorsqu'il s'assoit à mes côtés.

— C'est étonnant, reprend-il.

Je soupire d'exaspération. Je ne vais jamais être tranquille.

— Quoi !? dis-je toujours les yeux rivés sur mon recueil.

Je ne lui ferai pas le plaisir de le regarder à nouveau.

— Tu ne te prépares pas à la prochaine épreuve ? me demande-t-il, un sourire taquin aux lèvres.

— Je te retourne la question, je réponds du tac au tac.

Il croise les bras, sûr de lui et je devine que je n'aurais pas dû poser la question.

— Ce n'est pas moi qui ai failli mourir dans le labyrinthe.

Je lève les yeux au ciel. Pourquoi est-ce qu'il ramène toujours tout à moi ? J'ai l'impression que cela lui fait plaisir d'énoncer toutes mes faiblesses à chaque fois qu'il madresse la parole. Il se tourne vers moi et je referme mon livre, à contre-coeur. J'ignore quand j'aurai l'occasion de le lire à nouveau.

— Écoute-moi, Elwing. Je ne dis pas ça pour t'embêter...

Il se fiche de moi en plus. Je croise les bras à mon tour tout en redoutant ce qu'il va me dire.

— Mais je ne crois pas que lire soit un moyen efficace de te défendre...

J'ai l'impression d'entendre Luther me sermonner. Tu ne sais pas tout ce qu'on peut faire avec un livre, mon pote !

— ce que je veux te dire, c'est que j'ai l'impression que tu ne te rends pas compte que c'est dangereux pour toi, finit-il.

Je n'en crois pas mes oreilles. Depuis quand Ardalôn souhaite-t-il m'aider ? Je ne me gêne pas pour le lui faire remarquer.

Les jeux de la couronne. T1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant