Chapitre 1

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Los Angeles est exactement comme je me l'imaginais : des longues routes bordées de palmiers énormes ; des villas modernes à chaque cinq mètres ; des gratte-ciel -évidemment- ; beaucoup de magasins, un soleil de plomb, et surtout beaucoup trop de monde. Cette ambiance me rappelle vaguement les Champs Elysées de Paris en pleine heure de pointe. Seule différence, ici, il n'est même pas onze heures, et ce sont littéralement toutes les rues qui sont concernées. Moi qui n'aime pas l'agitation et le chaos de la vie citadine, je vais être au paradis...

Je ferme les yeux en inspirant longuement. 

Trois ans ici. Trois ans.

La voiture tourne lentement à droite et j'ouvre les yeux pour apercevoir les fameuses lettres géantes du « Hollywood » au fond d'une longue avenue bordée de palmiers, qui semble s'étirer sans fin. Quand j'étais petite je rêvais littéralement de venir ici. C'était mon rêve le plus cher.  Mais là, je n'ai qu'une envie : retourner en France. Ironie de la vie, n'est-ce pas ? Je m'enfonce dans mon siège en soupirant.

- Tu veux de la musique ? demande soudain le chauffeur, se tournant vers moi avec un sourire douteux.

Je tressaille instantanément.

- La radio passe de super chansons en ce moment je vais te faire écouter...

Avant que j'ouvre la bouche pour protester, il monte le son et une musique de rap résonne dans l'ensemble du véhicule. Je me fige. Surtout, ne pas paniquer, ne pas s'énerver. Les notes retentissent rapidement, les paroles s'enchainent, mais je ne fais même pas attention à la mélodie ou à la voix, je me concentre sur ma respiration, qui s'est accélérée trop vite. J'inspire, j'expire, j'essaye de faire abstraction tandis que la musique continue. Le gars entame ce qui doit être le refrain et là, je craque.

- Vous pouvez arrêter ? j'halète tant bien que mal.

Il ne semble pas m'entendre, ou du moins il ne me répond pas. Les harmonies se succèdent avec intensité, la mélodie monte, c'est le refrain.

- Oh hé, vous pouvez éteindre s'il vous plait ?!

Je commence sérieusement à paniquer, mes mains sont moites. J'entends les tambourinements effrénés de mon cœur dans mes tempes, et je déglutis avec difficulté. Il se tourne vers moi, un sourire mielleux aux lèvres.

- Pourquoi ? Elle est bien celle-là, c'est une chanson des...

- Je m'en contrefous de qui elle est, juste éteins cette putain de radio ! je crie, paniquée

- Oh allez quoi, t'énerve pas babe...

- MAIS TU COMPRENDS QUOI QUAND JE TE PARLE ?! JE SAIS QUE JE NE SUIS PAS AMÉRICAINE, MAIS MERDE QUOI, ÉTEINS CETTE FOUTOUE RADIO ! ÇA TE COUTE QUOI ?!

A peine ai-je dis ces paroles que je regrette immédiatement. Il fallait que je m'énerve de la sorte dès mon arrivée, évidemment.
En plus, L'air ambiant n'arrange en rien la situation, j'ai l'impression d'étouffer. Cette voiture est comme une cage trop étroite qui semble se resserrer au fur et à mesure que les paroles se succèdent, et les notes sont comme des coups de poignard. Une pure merveille vous dis-je.

Je ferme mes yeux en serrant mes dents, et agrippe le siège pour calmer les tremblements de mon corps. 

- Wow ! J'adore ce type de fille : sexy quand elle se met en colère...

Mon corps entier se crispe. J'ouvre les yeux et le regarde, trop horrifiée et paniquée pour réagir. Je suis néanmoins obligée de planter mes ongles dans le cuir du siège pour me retenir de le gifler. Son visage terni par la cigarette et ses yeux jaunes sont pétillants, comme excités par la situation qui n'a rien de charmant, ni d'exceptionnel, ce qui ne me rend pas la tâche aisée. La musique continue à résonner dans la voiture et lorsque je sens la panique affluer de nouveau en complément de la colère et du dégout, je m'empresse d'attraper mon portefeuille et de lui lancer une liasse de billet à la figure.

Time LostOù les histoires vivent. Découvrez maintenant