Épilogue

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Cela faisait quatre jours que j'avais quitté Londres pour retourner à Barnard Castle où j'avais retrouvé Olly. J'ai eu l'impression d'être avec un enfant de cinq ans pendant ces jours off. Il avait carrément pris des congés pour rester avec moi. Si Olly n'est pas le meilleur ami, je ne sais pas ce qu'il est. Plus le temps s'écoule et plus, je le considère comme le frère que j'ai toujours rêvé d'avoir.

D'ailleurs, sa réaction à ma narration sur ce qui s'était passé entre Shawn et moi en est la preuve. Il a pleuré. Mais de rire. M'a insulté à deux ou trois reprises. Encensé Shawn tout du long des différentes anecdotes. Et a fini par applaudir ce qui m'a bien entendu fait lever les yeux au ciel.

Un grand frère, certes, mais crétin sur les bords quand même. Enfin je ne devrais pas trop le critiquer parce qu'il est génial avec moi. Quand il m'a accompagné à la gare ce matin, il m'a pris dans ses bras et m'a soufflé :

— Je ne connais pas ce Shawn, mais je suis vraiment heureux que vos chemins se soient croisés.

— N'importe quoi !

— Sérieusement, il a l'air trop cool. Juste ce qu'il te faut !

— Olly, je croyais que je devais pas être romantique, lui rappelé-je au souvenir de tout ce qu'il a pu me dire à propos de Blaise.

— Tu ne dois pas l'être avec un mec qui est amoureux d'un autre. Mais ce gamin, là...

Je souris à l'utilisation du surnom de Shawn. Il va me tuer s'il l'apprend un jour.

— Il est réellement fou de toi et...

Il m'a donné une petite tape sur le bras et m'a dit presque de manière solennelle :

— C'est peut-être le bon, lui.

Je ricane tout seul alors que je traverse à présent la gare King's Cross pour rejoindre mon quai. J'ai mon sac de voyage à l'épaule, mes lunettes de soleil sur le haut de mon crâne, les mains dans les poches, mais surtout un fin sourire sur les lèvres à l'idée que je vais retrouver Shawn sur ce quai.

J'ai passé des moments fantastiques avec Olly, mais je suis plus qu'heureux de revenir sur cette tournée. De partir à l'étranger. De faire le tour de l'Europe. Mais surtout de pouvoir à nouveau prendre Shawn dans mes bras. L'embrasser. C'est à tout ça que j'ai pensé dans le train qui m'a amené à Londres ce matin, mais surtout pendant les quatre jours loin de lui.

Enfin quatre jours, onze heures et huit minutes. Soit six mille quatre cent vingt-huit minutes. À peu près. Mais qui compte ? Qui ça intéresse de savoir combien de temps j'ai passé loin de Shawn ? Personne. Absolument personne. Surtout pas le mec que je suis et qui n'a eu aucune nouvelle pendant ces six mille quatre cent vingt-neuf minutes parce que je suis un crétin. Je ne lui ai pas demandé son numéro avant que nous nous séparions dans sa loge après le dernier concert à Londres.

Mais ce qui me rassure, c'est qu'il n'a pas plus réclamé le mien. OK, ça ne me rassure clairement pas. Au contraire. Moi je n'y ai pas pensé pour la simple et bonne raison que je suis rarement sur mon téléphone, mais Shawn est constamment dessus. À envoyer des SMS à tout plein de monde que je ne connais pas. À jouer à Pokemon Go. À prendre des photos et les poster sur Instagram ou Twitter dont ses messages privés sont fermés.

Je me frotte le visage en arrivant à la douane. Je jette un coup d'œil autour de moi et ne reconnais personne. Les autres doivent déjà être dans l'Eurostar. Je regarde l'heure et renifle, mécontent. Six mille quatre cents... Trente-sept minutes... Mon train part dans une demi-heure.

Un soupir m'échappe et je repère un portique ouvert et vide avec marqué le numéro de mon Eurostar. Je souris, soulagé, et contourne les queues. Je me dirige vers l'hôtesse qui patiente et la salue. Elle me répond en balayant tout mon corps du regard. Je déglutis, mal à l'aise, mais je ne laisse rien paraître. Je referme juste ma veste en cuir sur moi.

Quand ses yeux remontent au niveau de mon visage, elle m'adresse un sourire et me demande mon billet d'embarquement. Moins de dix minutes plus tard, j'ai passé la dernière ligne de sécurité. Je cours presque dans le terminal, impatient. Mais je crois que je suis pressé de rejoindre Shawn. À cette pensée, je me fige soudainement. Je vais retrouver le gamin. C'est cool. Vraiment. J'en rêve depuis que je suis parti de Londres, il y a quatre jours plus tôt. Mais je dois agir comment ? Est-ce que je l'embrasse ? Le prends dans mes bras ? Ou alors une simple poignée de main ?

Oh que les relations humaines me gonflent !

Je verrai sur le moment. Je le laisserai décider pour nous deux. Je descends l'escalier qui mène au quai, moins rapidement que précédemment. Tout en vérifiant pour la centième fois le numéro sur mon billet, je me dirige vers la voiture qui est réservée à la Fée Clochette et aux membres de la tournée.

Je n'ai pas fait dix pas quand mon regard se lève de mon bout de papier, je le remarque enfin. Il est sur le quai, les bras croisés devant lui et un sourire aux lèvres en me fixant. Il tape du pied, d'impatience avant de me crier :

— Tu dois être là-bas dans trois putains de minutes, me dit-il en faisant un geste du doigt vers le wagon à côté duquel il attend.

Je ris à la reprise de ma phrase, mais au lieu de le rejoindre maintenant, je reste un instant immobile pour me gorger de son physique, de lui. Je ne lui dirai jamais, mais il m'a manqué, bien plus que je ne pouvais l'imaginer avant de le retrouver. Je soupire d'aise et efface finalement la distance qui nous séparait. Je me mets à quelques centimètres de lui et lui murmure :

— Tu as une drôle de manière de montrer aux gens qu'ils t'ont manqué.

Il lève les yeux au ciel en marmonnant un piteux « Dans tes rêves ».

— C'est vrai qu'avec Dylan, vous n'avez pas eu l'air de vous embêter pendant cette pause, rétorqué-je en me tournant pour faire mine d'aller dans le train.

— Hep !

Il me retient par la main et je me sens soulagé. Je serre la sienne et laisse sa chaleur m'imprégner avec plaisir.

— Alors comme ça, tu m'as espionné ?

Je hausse les épaules comme si cette idée était la plus stupide du monde. Elle l'est sûrement et c'est d'ailleurs pour ça que je l'ai eue.

— On m'a rapporté vos différentes visites londoniennes.

— Mais oui...

Il caresse le dos de ma main avec son pouce et ça m'apaise.

— C'était le deal, déclare-t-il de manière énigmatique.

— Le deal ? répété-je bêtement.

— Dylan m'a fait un chantage. On devait faire tout ce qu'il voulait à Londres.

— En échange de quoi ?

Je me recule, méfiant.

— Zain !

En reconnaissant la voix de Yasmine, je me détourne de Shawn. Elle arrive à grandes enjambées vers moi. Je lui souris avant que je comprenne qui se trouve derrière elle. Instinctivement, je retire ma main de celle de Shawn en me tournant vers lui.

Mon cœur tambourine dans ma cage thoracique alors que mon estomac semble prêt à régurgiter tout ce qu'Olly m'a forcé à manger ce matin. Une peur immense m'envahit. Une peur que je n'avais pas ressentie depuis une éternité.

— Je suis désolé, soufflé-je sans savoir pourquoi.

Ou plutôt si... Shawn va souffrir, tout comme Yasmine et moi. Parce que c'est toujours ce qui se passe lorsqu'il est dans les parages. Quand il sourit comme il le fait à cet instant. Anouar.

Fool For You - BLT 3Where stories live. Discover now