Chapitre deux (2)

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Après avoir terminé de coiffer Hélène, j'avais mis en place la nouvelle poche de perfusion et laissé ses médicaments dans un gobelet. Mais en véritable guerrière, elle refusa les anxiolytiques et les somnifères prescrits par le médecin, se contentant de la prise des antalgiques, préférant veiller toute la nuit à cause d'une insomnie que s'abrutir sous davantage de comprimés.

Lorsque je quittai sa chambre, je retrouvai Caroline, l'aide-soignante du deuxième étage. Adossée à la salle de soin, elle semblait m'attendre depuis un moment. Contrairement à certaines pimbêches du milieu, elle se contenta d'un sourire bienveillant à mon égard, me rassurant immédiatement sur la suite de notre garde. Ensemble nous commençâmes notre tournée.

Notre rôle consistait principalement à veiller sur les patients les plus mal en point, prenant leurs paramètres vitaux plusieurs fois durant la nuit. Le but : être certaines qu'ils respirent encore au petit matin. Il fallait également veiller à effectuer les changes de certains patients grabataires, et s'assurer de répondre aux besoins de chacun.

En dehors de ça, il y avait assez peu de soins à prodiguer. Les nuits s'avéraient plutôt tranquilles par ici. Il arrivait parfois qu'un patient se déperfuse pendant son sommeil cela dit, et je détestais ça. Parce qu'avoir les pieds dans l'hémoglobine en pleine nuit, alors que les couloirs et les chambres étaient dans la pénombre la plus complète, ça me faisait toujours un peu flipper. Moi qui travaillais de nuit pour m'épargner quelques nuits blanches vaines, j'étais gâtée.

Au bout de trois heures de tranquillité et alors que Caroline semblait happée dans une romance à l'eau de rose, la fatigue eut raison de moi, m'entraînant dans la profondeur de ses abîmes.

Il fallait croire que le peu de temps passé auprès d'Hélène m'avait bouleversée car un message me tira du sommeil en sursaut à quatre heures et demie. Je m'étirais comme un chat, chassant les restes de sommeil, avant de tendre le bras vers l'objet maudit.

― Caroline ? Je descends fumer. J'ai le téléphone, tu m'appelles s'il y a quoi que ce soit.

Pas vraiment reposée, je décidais de m'avachir sur un banc du jardin thérapeutique. La rosée matinale s'était déposée en de fines gouttelettes éparses, çà et là, faisant frissonner ma peau sous sa blouse. Alors qu'une douce brise s'élevait, virevoltant dans les feuillages alentours, soulevant les quelques mèches échappées de mon chignon, je me surpris à esquisser un sourire.

La quiétude des lieux me gagnait, apaisant les angoisses sous-jacentes dont je souffrais. Alors que le commun des mortels appréhendait sa visite à l'hôpital, ces murs me protégeaient. Romane se plaisait à penser que mon esprit suivait sa propre thérapie, un peu comme s'il cherchait un moyen détourné de se repentir. Pourquoi pas.

Tout en allumant une cigarette, j'extirpais le smartphone et lus le message qu'avait envoyé Romane.

― Meuf, j'suis en bas de chez toi. Si tu veux savoir pourquoi, tu ferais bien de m'ouvrir rapidos ! ça caille sévère par ici.

Le message datait d'un peu plus de dix minutes et ça me faisait marrer de l'imaginer poireauter. La connaissant, elle devait danser d'un pied sur l'autre, marmonnant dans sa barbe à mon encontre sans dévier le doigt de l'interphone. La scène m'amusait presque assez pour ne pas lui répondre et voir jusqu'où s'étendait sa patience, mais contre toute attente, la curiosité l'emporta.

― Il est quatre heures et demie, Schneider. Qu'est-ce que tu fous en bas ?

― Me raconte pas ta vie et ouvre cette porte, merci.

Je pouffai de rire à la lecture de sa réponse. C'était le même message que je lui avais envoyé la veille. À la virgule près !

― Bien que tes mots d'amour flattent mon égo, j'ai le regret de t'informer qu'une vacation de dernière minute impose ma présence à la clinique. Je suis donc dans l'impossibilité d'accéder à ta requête dans l'immédiat.

Mariage en satin noirWhere stories live. Discover now