CHAPITRE ONZE .4

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Il y eut un échange de saluts, puis la garde s'en alla. Tranit se leva pour s'étirer et regarda par une meurtrière le camp de toile qui semblait s'animer.

— De tous les gens étant ici, lesquels sont les plus nombreux ? Quelle seigneurie ?

— Ici ? Je crois que c'est une troupe de Sévignac. Un baron et ses trois fils. Un gros bataillon d'infanterie et une cinquantaine de chevaliers et écuyers. Les autres sont des fédérés, certains dépendant de Sévignac justement, d'autres non.

— Et à la porte nord ?

Le capitaine regarda ses plaquettes.

— Je crois que c'est un Béarnais. Les chariots ? Tu ne les as pas vus ?

— Non ! Des chariots ? Pour une guerre dans les montagnes ?

— Ça peut être très utile pour défoncer une grosse masse d'infanterie ou bloquer une charge de cavalerie, c'est ce qu'il m'a dit... Ah non, il a laissé son infanterie à la porte nord, mais ses chariots et sa cavalerie ont traversé le bourg hier et se sont installés près de la cité. Certains de ses chevaliers voulaient faire leur hommage eux-mêmes.

— Son infanterie ? Combien d'hommes ?

— Un petit bataillon, il me semble. Il pourra fournir une vingtaine d'hommes pour le service de garde.

— Je vais aller voir ce Sévignac, lui annonça Tranit, pour lui demander un service d'ordre. Une compagnie tous les deux jours, puis j'irai voir aussi ces Béarnais. Si leur seigneur est en ville, je lui demanderai son autorisation.

— Si vous pouvez nous obtenir une bonne compagnie de renfort, on s'en sortira sans problème. Les soldats montagnards sont très utiles, vous savez. Leurs deux pelotons de cavalerie ici, ça arrange bien les choses.

— J'en ai croisé assez depuis trois jours. Ils ont des gens à l'intérieur ?

— Quelques officiers surtout, leur état-major. Ils discutaient avec nos marchands hier et utilisaient la nouvelle taverne comme lieu de rendez-vous pour leurs messagers. Mais leurs troupes sont encore à l'extérieur de la cité. Ils ont l'air nombreux.

Tranit confirma, l'air sombre.

— Oui, très nombreux. J'ai été très surprise de voir avec quelle vitesse ils avaient appris cette mobilisation et avec quel empressement ils y répondaient.

— Beaucoup y voient un bon signe pour le projet du jeune seigneur de Lannemezan. Les dieux y seraient favorables !

Tranit porta instinctivement sa main droite au niveau du cœur pour conjurer l'augure ! Il était malsain de prophétiser quoique ce soit pour un non-druide, même si la phrase était du langage courant. Fille de druide, elle faisait très attention à ce qu'elle disait en parlant.

— Qu'ils aient guidé tes paroles !

La capitaine s'excusa d'un signe de main et conjura ses paroles.

— Qu'ils me pardonnent mon impudence.

Tranit remit son ceinturon avec son épée et sa dague puis s'engagea dans le camp temporaire des volontaires. Elle trouva le seigneur de Sévignac qui s'éveillait lentement et après lui avoir annoncé le changement de campement, obtint de lui qu'il aide au maintien de l'ordre dans la ville en fournissant une compagnie pour deux jours de garde.

Il avait assez d'hommes pour faire un roulement qui ne nuirait pas à l'entraînement de sa petite armée et ses hommes apprécieraient quelques piécettes ainsi que les rations supplémentaires.

Le seigneur s'engagea aussi à faire bouger les fédérés, ce dont Tranit lui fut redevable. Elle récupéra sa monture et se rendit à la porte nord pour discuter avec les Béarnais. Elle croisa de petites patrouilles de cavaliers montagnards, eux aussi tous vêtus dans les tons verts, qui reprenaient déjà leurs va-et-vient incessants, en affichant toujours cet air de satisfaction qu'ils affectionnaient.

Le bourg se réveillait bien plus vite que d'habitude. Avec ce surcroît de population, les marchands, les tavernes, les prostitués allaient faire d'excellentes affaires et donc les ennuis s'ensuivraient, comme toujours.


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Vixii

Les larmes de Tranit - 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant