Litanie

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J'ai tenu ma promesse d'un chapitre par semaine minimum ! Ouf ! Donc ette fois, c'est au tour d'instant d'éternité. J'ai beaucoup hésité à écrire et à publier ce chapitre, le contenu en est assez violent et dur je pense, donc âmes sensibles, s'abstenir. S'il n'y a aucune scène explicites, ce chapitre aborde des thèmes assez sombres, c'est l'un des plus noirs de l'histoire.

Bonne lecture à vous, en espérant qu'il vous plaira malgré tout.

Disclamer : les personnages de cette fic appartiennent à Quantic Dream et sont issus du jeu vidéo Detroit become human.

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Litanie

Séquence mémorielle - archives – 16 octobre 2041 :

Je ne savais pas, avant ce soir-là, que le désespoir pouvait avoir une lueur aussi éclatante. Bien que j'essaie d'occuper mon processeur en accumulant les tâches ménagères, les reconstructions de la scène d'aujourd'hui ne cessent de se jouer devant mes yeux, de façon quasi-obsessionnelle, et je ne peux m'empêcher de les regarder. Je les retourne dans tous les sens, j'analyse la scène sous tous les angles pour chercher à comprendre comment j'aurais pu éviter cela.

« Connor, arrête ça, tu ne pouvais rien faire. C'était... c'était son choix. Sa façon de dire stop à toute cette merde. »

Je me retourne brusquement, bien trop rapidement pour un humain. Hank m'observe, les bras croisés, et je réalise soudain que je suis accroupi dans le salon, en train d'examiner les restes d'une silhouette invisible à ses yeux. Un autre m'aurait pris pour un fou. Mais le vieil inspecteur connaît mes capacités et mes méthodes. Il m'a vu faire tant de fois, avant... Je me relève et je ferme l'application d'analyse. Je sens l'inquiétude poindre dans son regard. Je tente un maigre sourire rassurant, mais sans succès. La flamme de ce cri de colère continue d'assombrir mes traits malgré moi.

« Le gouvernement devait se réunir à ce sujet, aujourd'hui... »

Hank hoche la tête, pensif. Puis, il allume le téléviseur, laissant le bruit de fond de l'écran venir éteindre le silence pesant dans cette pièce.

« Ce n'est pas de ta faute. »

J'esquisse un sourire las. Ce n'est pas de ma faute... Tout comme pour Daniel. Le déviant de Carlos Ortiz. Rupert. Ralph. Le déviant de la tour Stranford. La jeune Traci que j'avais réanimée le temps d'un interrogatoire... Ces victimes qui ont sombrées dans les flots du port industriel avec Jericho... Celles que les balles des forces spéciales ont abattues grâce à ma localisation... mes méthodes de traque. Mes signalements. Ma mission. Je ferme un instant les yeux. Cette litanie m'avait quelque peu quitté, tous ces soirs chaleureux auprès du vieux lieutenant. Elle ne me hantait désormais que lors des nuits glacées de solitude, lorsque Hank buvait trop pour me tenir compagnie, ou lorsque je fermais les yeux pour me mettre en veille. Mais ce soir, plus que jamais, elle revenait munie d'une nouvelle force, tempête de flamme dansant follement sur le cercle lumineux de ma tempe. Cette lueur écarlate semble inquiéter l'humain. Il s'avance vers moi, mais je me recule légèrement. Je ne mérite pas vraiment sa compassion, et ces paroles vaines n'apaisent en rien le feu de la culpabilité qui brûle en moi.

Ce n'est pas de ma faute.

...Quel ramassis de conneries.

Hank soupire devant mon comportement distant et abandonne, visiblement agacé de ne pas arriver à m'apaiser. Il s'éloigne en direction de la salle de bain. Ce soir, son dos voûté semble malgré tout s'acharner à vouloir supporter le poids de mes erreurs. Il courbe sous les conséquences de mes actes, pourtant, il me soutient toujours, immuablement. Là où ma solide carcasse de métal s'effondre, écrasée par ce sentiment de honte qui me dévore, le fragile corps de chair et d'os se relève toujours. Je m'en veux un peu de ne pas être capable de le laisser m'aider. Sans Hank, aujourd'hui, je ne serai plus qu'un amas de fils, d'acier et de plastique pourrissant pour les siècles à venir dans une décharge à ciel ouvert. Grâce à lui, je me contente de me putréfier sous le toit protecteur d'un foyer.

[DBH] Instants d'éternitéWhere stories live. Discover now