LES HEROS SONT CEUX QUI MEURENT(juillet 845)Darius Zackley

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Toute cette agitation est bénéfique finalement, cela occupe les soldats, cela fait remuer un peu toute cette jeunesse si oisive en temps normal ! Ha ! Quand j'étais jeune, on saisissait toutes les opportunités de faire quelque chose d'utile

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Toute cette agitation est bénéfique finalement, cela occupe les soldats, cela fait remuer un peu toute cette jeunesse si oisive en temps normal ! Ha ! Quand j'étais jeune, on saisissait toutes les opportunités de faire quelque chose d'utile.

De ma fenêtre, j'observe la file de réfugiés qui s'acheminent jusque dans nos réserves afin que les gardes leur remettent de la nourriture bon marché. Ce que les nobles ont bien voulu leur laisser. Quand je pense que si on convertissait tous les domaines et terres privées de ces merdeux en champs cultivables, il y aurait bien assez pour tous, et même trop ! Mais il ne faut pas compter là-dessus, ils ne sont pas prêts de lâcher leurs privilèges pour ces loqueteux. Je suis bien content de ne pas disposer d'autant de patrimoine, et je ne me sens coupable de rien en ce qui concerne le sort de ces gens.

Et si on leur ouvrait les portes jusqu'à Mitras ? J'imagine la tête que tireraient le roi et sa cour devant ce peuple affamé et terrifié sur le seuil du palais ! J'aimerais bien voir ça !

J'ai élu temporairement domicile dans le QGR le temps que tout cela se tasse. cela risque d'être long mais j'aime être au coeur de l'action. Et puis avec tous ces messagers et subordonnés qui ont besoin d'une signature ou d'une autorisation pour les choses les plus futiles, mieux vaut que je sois présent.

Je soulève ma carafe et verse du vin dans mon verre de cristal. Je prête l'oreille aux bruits dans le bâtiment, les cavalcades, les ordres criés... J'aime cette ambiance. C'est peut-être la seule chose positive que la chute du Mur Maria a apporté. La chute de Maria... Voilà bien une chose que je ne pensais pas possible. Lorsque j'ai appris la nouvelle, j'ai dû m'assoir. Une très mauvaise plaisanterie, me suis-je dit. Mais c'était vrai. D'où viendraient tous ces gens sinon ?

Je me saisis du journal du matin et le parcoure de nouveau des yeux. Rien de bien nouveau. Le dernier tirage intéressant traitait de l'investissement exemplaire des membres restants du bataillon qui se sont montrés héroïques lors de l'évacuation des plaines ; et il date d'il y a deux semaines déjà. Apparemment, rien n'a transpiré, et j'en sais toujours plus que les gratte-papiers.

Je sais que Keith va jeter l'éponge, mais il ne m'a pas donné le nom de son remplaçant, s'il doit y en avoir un. Il a raison, après tout, on est encore sûr de rien. Mais je me doute qu'après de telles prouesses, le régiment va tenir encore un moment, et il aura besoin d'un chef. Il doit bien avoir quelqu'un en tête... Et à vrai dire, moi aussi...

On frappe alors à ma porte et mes pensées s'interrompent. Comme s'il avait le don de les lire, Erwin Smith s'avance dans la pièce et me salue. Et bien, on peut dire qu'il tombe toujours à pic, celui-là. Et qu'il présente toujours bien, pas une mèche de travers ! J'ai entendu dire que même sur le champ de bataille, il ne perd jamais de sa superbe, et ce n'est pas dur à imaginer en le voyant devant moi.

Il me tend une feuille de papier frappée du sceau des brigades spéciales et d'un autre tampon administratif dont je ne me souviens plus de la provenance. Il m'explique d'une voix claire et bien articulée qu'il a besoin de ma signature afin de permettre au bataillon d'emménager temporairement au QGR.

Je vois, trouver un autre quartier général pour le régiment prendra sans doute du temps car ce n'est pas le priorité de nos supérieurs. Je sais à quel point les explorateurs tiennent à leur indépendance et leur tranquillité, cela doit lui coûter d'en arriver là. Mais ils n'ont pas le choix ; et puis, ils ne sont plus si nombreux actuellement, ils ne prendront pas de place.

Je pose la feuille sur mon bureau sans même la lire et la signe d'un trait de plume. Le bataillon a droit à tout mon soutien et avec les temps durs qui s'annoncent, il pourrait bien devenir notre première ligne de défense contre les titans. Car si cette attaque a eu lieu, elle peut se répéter... Rien que d'y penser, je réfrène péniblement un frisson en rendant le document à Erwin.

Pas question de montrer de la faiblesse devant ce gamin. Il a de l'ambition, c'est certain, et avec ses capacités, il pourrait même bien me remplacer un jour... Je vais le tenir à l'oeil, tout en soutenant sa candidature au poste de major. Car c'est lui le plus apte, évidemment. Keith ne l'a pas dit clairement, mais je le sais. Je me souviens encore de son stratagème contre ce traître de Rovoff... et c'est aussi lui qui a mené les opérations d'évacuation, avec une maîtrise et un naturel étonnants. Il en a dans le crâne.

Oui, le bataillon d'exploration a besoin d'Erwin Smith. Et j'ai besoin du bataillon. Alors autant s'entraider, n'est-ce pas ? Il me fixe de ses yeux bleus inquisiteurs, attendant que je lui ordonne de disposer. Il y a des tas de choses derrière ces yeux-là, bien plus que ce qu'il paraît... Un petit secret sans doute. Je le découvrirai peut-être, et qui sait, il me sera utile un jour. Il me salue de nouveau et se retire. J'aperçois brièvement dans le couloir, affalé sur un banc contre le mur, le truand des bas-fonds que je l'ai aidé indirectement à capturer, et qui le suit partout maintenant. Quel est son nom déjà ?

Je me saisis du journal afin de le retrouver. Ah oui, Livaï. Le héros qui a sauvé les humains des plaines de Maria. Un peu ronflant, mais pas autant que le plus gros titre du jour : "Livaï, le soldat le plus fort de l'humanité". Voyez-vous ça ! Qui l'aurait cru ? Il y a pas à dire, ce Erwin a du flair !

Les Chroniques de Livaï ~ Tome 2 [+13]Where stories live. Discover now