Billie

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Bon, voilà. Nous étions officiellement en couple. Qu'est ce qu'il y a à dire de plus sur cette période? A la fois beaucoup et si peu.

Au lycée, les gens nous regardaient surpris, mais pas méprisants ou choqués, dégoûtés.

On faisait notre vie, toutes les deux dans notre coin sans demander l'approbation de personne. Mes amis avaient accepté mon choix, en espérant qu'elle puisse me rendre heureuse. Il est vrai que j'avais tellement souffert à cause de l'amour qu'ils respectaient notre relation. Tant que j'étais bien dans ma peau, peu importe qui partageait ma vie. Et comment.

On a vécu peu, mais on a vécu. Et intensément. Au fond, c'est tout ce qui compte, non? Même si aujourd'hui tout est fini, ça n'est fini que parce que ça a existé.

J'ai été heureuse. J'ai été fière. Elle m'a fait tant de bien. J'ai pu me montrer au monde comme je suis, et à ses côtés. Qu'est-ce que j'aurais pu espérer de mieux?

Mais pourquoi dire qu'il y a si peu?

Parce qu'en dehors de ça, un mois de relation ne permet pas de vivre tant que ça. Du moins, pas dans notre situation. Je n'ai toujours pas fait mon coming-out auprès de mes parents. Je n'étais pas prête. Je ne le suis toujours pas. Alors à part au lycée, on n'a pas pu se voir. Et se voir en cours est bien différent du monde extérieur. 

Et puis elle a tout foutu en l'air. Elle a tout brisé, tout piétiné. Elle a démoli, détruit brique par brique ce qu'on avait bâti ensemble. Ce que moi-même j'avais bâti au fond de moi. Ma confiance en moi, ma joie de vivre, ma confiance en les autres aussi, tout ça a été arraché, piétiné, écorché vif.

Écorcher vif. C'est cela. Je suis une écorchée vive. Ma peau se détache lentement, mes os apparaissent au grand jour. Ma carapace s'est dénaturée, désolidarisée de mon être, et maintenant mes faiblesses et mes plaies sont béantes, visibles et accessibles au monde entier. Chaque particule du monde extérieur est une agression, une remise en cause de ma capacité à rester maître de mes émotions.

Mais je ne lui en veux pas. J'en suis incapable. Je l'aime trop pour ça.

Si seulement nous étions deuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant