Chapitre 31

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- Je n'en reviens pas, s'exclama Zuri en parcourant du regard la revue que Sofka lui avait amenée. Je pensais que tous les travaux de ma mère s'étaient perdus pendant la guerre.

Il y avait des larme au coin des yeux de la botaniste alors qu'elle caressait doucement le nom de sa mère, Eshe, à la fin de l'article.

- C'est le professeur Rodriguez qui l'avait. C'est un magicologue, il a gardé une sacrée bibliothèque sur le sujet. Je peux lui demander de voir s'il a d'autres articles qu'elle aurait écrit.

- Ce serait génial, acquiesça Zuri avec un sourire ému.

Sofka se haussa sur le comptoir de la boutique et tapota doucement l'épaule de son amie, un peu désorientée par la situation. Bien sûr, elle savait que derrière la bonne humeur de Zuri, il y avait une sensibilité qu'elle gardait précieusement gardée.

- Tu veux en parler ? demanda-t-elle d'une voix douce.

- Je ne me souviens pas bien d'elle, répondit Zuri. Mon dernier souvenir, c'est quand elle m'a amené à la gare pour quitter la ville avant les bombardements. Il y avait du monde partout, des cris d'enfants, et elle qui était toujours calme était frantique. Je ne comprenais pas bien ce qu'il se passait, je croyais qu'elle voulait juste se débarrasser de moi.

- Elle voulait te protéger, comme tous les parents qui ont fait évacuer leurs enfants au début de la guerre.

- Je sais bien, soupira Zuri. Mais j'avais six ans à l'époque, je ne comprenais pas le danger. Je pensais juste que ma mère voulait pouvoir travailler tranquillement sans devoir s'occuper de moi. Elle travaillait beaucoup.

- Il me semblait qu'elle était botaniste, se souvint Sofka, pas magicologue.

Zuri hocha la tête.

- Elle étudiait les plantes et leurs propriétés magiques. D'après ma tante. J'étais trop petite pour me souvenir, c'est elle qui m'a raconté. Elle n'est pas très portée sur les études, contrairement à ma mère, donc elle ne comprenait pas toujours sur quoi sa soeur travaillait.

- Le professeur Naqiyya est toujours en activité à Avillon, tu pourrais lui rendre visite pour en savoir plus. Je suis sure qu'elle t'accueillerait les bras ouverts. Elle était contente d'avoir la visit de Fukuda, je crois qu'elle est un peu solitaire.

- J'y songerais, répondit Zuri. Merci.

- Non, c'est moi. Je suis désolée de t'embêter avec mes questions. J'étais surprise en tombant sur le nom d'Eshe, c'est tout. Ca ne peut pas être lié à notre affaire puisque...

Sofka se mordit la langue en réalisant son manque de tact.

- Puisqu'elle est morte depuis plus de vingt ans, compléta Zuri d'un ton plat.

- Voilà. Mais elle semblait vraiment prête à passer à la pratique, d'après ses articles. Quelqu'un a pu s'en inspirer et reprendre ses recherches.

- Tous ses travaux étaient à la maison, répondit Zuri en secouant la tête. Il ne reste plus rien à part ces articles, Sof. Tout ce qu'on avait à l'époque a été perdu dans les bombardements. Je n'ai gardé que ce qu'il y avait dans la petite valise que ma mère avait préparé avant de m'amener à la gare.

Ne sachant plus quoi ajouter, la gorgone ouvrit les bras et laissa Zuri s'y blottir.

La Gorgone et la BotanisteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant