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Un silence accueille mon annoce.

– Et... qu'est-ce qu'il a de si spécial, ce jeu ? demande prudemment Lily.

– Le vendeur m'a dit qu'il a des propriétés fantastiques, et qu'il ne faut pas prendre ce jeu à la légère. Il a aussi dit que le meneur devait être bien choisi. Il doit avoir la confiance de tous les autres joueurs et doit être prêt à ne pas interférer dans le jeu.

– Je crois que c'est tout vu... sourit Sofiane.

– Oui ! renchérit Jules. T'as trouvé le jeu, c'est toi qui gères, chef.

– Alors, si vous êtes tous d'accord... Je le ferai avec plaisir !

Des cris de joie retentissent à l'intérieur de la cabane, ce qui me fait sourire. Avant de commencer à jouer, je leur annonce la dernière consigne qui, je m'en doute, ne va pas être approuvée de tout le monde.

– Avant que je m'en aille, le vieux monsieur m'a attrapée par le bras et m'a dit très sérieusement que le jeu ne pourrait fonctionner que si chacun des joueurs y compris le meneur avale une des pilules qui se trouvent dans la boîte.

Je soulève alors lentement le couvercle et attrape le sachet contenant des petites billes bleues.

– C'est une blague ? s'indigne Zia.

– T'es sûre que c'était pas un dealer ton vendeur ? plaisante Sofiane.

– Non, mais c'est mort. Jamais j'avale cette merde, moi, tranche Matt, ce qui lui vaut un regard noir de la part de Clem.

– T'as vraiment pas de couilles, dit-elle. J'en ai plus que vous tous réunis, conclut-elle en avanlant une des pilules.

Matt porte sa main à sa bouche. Quand Clem commence à baver, c'est la panique générale. Des cris résonnent et personne ne sait comment agir. Jusqu'à ce que nos cris soient couverts des rires de Clem.

– Je vous ai bien eus, bande de bolosses ! s'exclame-t-elle en s'essuyant la bouche du revers de sa manche.

– Ça se fait pas, tu nous as fait peur ! s'indigne Lily.

– Mais je suis toujours en vie, rétorque Clem avec un clin d'oeil. Bon vous vous décidez à les avaler ces cachets ridicules, où faut vous les mettre en intraveineuse ?

Chacun son tour, on avale notre cachet. On attend une minute mais rien ne se passe.

– Et maintenant, qu'est-ce qu'on est censés faire ? demande Nolan.

– Le vendeur m'a dit qu'on saurait pertinemment quand il faudrait commencer la partie. On doit attendre un signe, ou quelque chose comme ça.

– Et à aucun moment tu t'es dite que tu t'étais peut-être faite arnaquer ? demande Matt sur un ton sec. Sérieux, vous croyez quoi ? Qu'on va basculer dans une dimension temporelle une fois qu'on l'aura tous avalée ?

– Matt. C'est toi qui l'as pas avalée, c'est ça ? dit Zia sur un ton de reproche.

Zia... Toujours aussi perspicace.

– Je suis pas naïf, moi ! Je fais pas confiance à un vieil apothicaire prêt à vendre n'importe quoi à des idiots pour se faire du blé !

– Si t'es pas content, tu peux aussi te barrer, dit Jules.

– On va tous très bien, poursuit Sofiane, tu risques rien.

– Qu'est-ce que t'en sais ?! beugle l'idiot têtu.

– T'es juste une flippette, tranche Zia.

– Pardon ? répond Matt, piqué au vif, et par sa bien-aimée en plus.

– T'es juste lâche. Et ici, y'a pas de place pour les lâches, continue Zia en le foudroyant du regard.

– Moi, lâche ? s'indigne-t-il. C'est ce qu'on va voir.

Et il avale le cachet sans un mot de plus. Je lance un rapide coup d'oeil à Zia pour la remercier, et je décèle dans son regard une lueur de fierté, juste avant que ses yeux se ferment.

– Zia ? j'appelle.

Pas de réponse. Ses yeux restent clos.

– Zia ! je hurle en la secouant par les épaules, sentant la panique m'envahir.

C'est alors que je vois Jules s'endormir aussi. Puis Clem, Sofiane, Lily. Tous finissent par s'assoupir peu à peu. Il ne reste plus que Matt et moi éveillés. Il est affolé.

– Qu'est-ce que t'as fait ? Bordel, Chris, qu'est-ce que t'as foutu ?!

Mais je n'ai pas le temps de lui répondre car il s'écroule à son tour devant mes yeux. Je déglutis et cherche dans la boîte le livret dont le vieil homme m'a parlé. Je le feuillette et découvre que ce ne sont que des pages blanches à l'intérieur. À l'exception de la première sur laquelle figure une phrase en latin :

Interdum sit medium rei somnium tenvia posse distinguere.

Je la lis plusieurs fois dans ma tête sans en saisir le sens. Je décide alors de la lire à voix haute, espérant mieux la comprenne ainsi. C'est alors que dès que l'écho de mes mots frôle les parois de la cabane, celle-ci se met à trembler, à tourner, les lumières s'éteignent et bientôt tout devient noir. Je sens mes paupières s'alourdir, jusqu'à ce que je sois, moi aussi, emportée par le sommeil.

𝐐𝐔𝐀𝐍𝐃 𝐋𝐄 𝐉𝐄𝐔 𝐃𝐄𝐕𝐈𝐄𝐍𝐓 𝐑𝐄𝐀𝐋𝐈𝐓𝐄Where stories live. Discover now