Chapitre 6 - Richesses forestières

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Le reste du voyage fut plus paisible. Avoir un allié de plus était manifestement un atout majeur. Ils débarquèrent un mois après à Brest. Il leur restait environ deux semaines en calèche pour retrouver la province de Paris.

Durant leur périple terrestre, ils passèrent leurs nuits dans des auberges. Obax, gants aux doigts pour ne pas trahir sa couleur, se surprenait à chaque fois par son appétit grotesque. Elle rattrapait les dernières années de sa vie où la famine l'avait menacée.

Lors d'une soirée, où nourriture et alcool fusaient, Basile et son oncle l'interrogèrent une dernière fois, arrivant le lendemain chez eux.

-  Dis-nous encore une fois.

-  Le royaume de France a pour roi actuel Henri IV. Nous sommes grâce à la restauration de l'autorité monarchique et au redressement économique de Sully. Le pays est plus calme et prospère.

-  Quelle est la plus grande action du roi ?

-  L'Edit de Nantes et la liberté de culte aux protestants.

-  Quelle est ta religion ?

-  Le Christianisme.

-  C'est bien.

Le reste de la soirée se passa avec tranquillité. L'aube du lendemain vint doucement, durant ce mois de janvier l'hiver était blanc mais le soleil, avec ses rayons argentés, apportait une chaleur réconfortante.

Il faisait clair quand ils arrivèrent devant la demeure d'Eudes De La Mirage. Obax n'en croyait pas ses yeux, c'était la plus belle bâtisse qu'elle n'avait jamais vue : un manoir de style galant perdu dans la brousse forestière. De nature rococo, le manoir comportait de nombreuses fenêtres sur toutes les façades beiges. Le jardinet, adossé à la façade première du manoir, était rasé de près, les arbustes étaient courts et en son centre se dressait une fontaine d'où jaillissait une eau limpide et froide.

Le conte les invita à pénétrer à l'intérieur.

Un tourbillon de richesses vint presque à faire chanceler la jeune femme. Elle n'était jamais allée chez son maître en Afrique, mais elle n'était pas sûre qu'il avait pu un jour posséder tous ces trésors.

L'entrée du manoir menait sur un grand hall aux dorures et fresques pastels. L'intendant, dressé droit comme un poteau, attendait son maître et ses ordres. Il les conduisit dans un petit salon où du thé et des confiseries leur seraient servis plus tard.

Sous une architecture d'influence orientale et gothique, la pièce était lourdement décorée. La fantaisie des lignes courbes et asymétriques, les volutes, les coquillages et feuillages en moulures, les teintes claires de blanc, d'ivoire et d'or, les motifs de fleurs, fruits, rubans, et autres rajoutaient à la frivolité du lieu. La pièce comportait de nombreux miroirs et peintures sur des thèmes légers, comme la joie de vivre, qui incitaient au confort. Elle put apercevoir de nombreux anges chérubins et des symboles de l'amour dessinés avec délicatesse dessus.

Obax passa en revue les figures de porcelaine, les petits objets décoratifs intitules qui alourdissaient la pièce. Les meubles quant à eux étaient empreints d'une asymétrie raffinée, de style rocaille, ils étaient reconnus pour leur flamboyance. Le conte possédait des fauteuils voyeuse et également des bergères de formes gondolées. Tout aspirait à la paresse.

Tout n'était qu'éclat.

-  Ce salon a été fait, ainsi que le reste de la demeure, a été redécoré par les plus grands ornemanistes et architectes décorateurs de France, précisa fièrement le conte qui s'était aperçu de l'admiration de sa protégée.

Basile et Eudes souriant en regardant l'extase innocent d'Obax. Elle n'avait jamais connu la moindre richesse, la moindre splendeur.

-  Allons t'habiller.

Pendant qu'elle avait tourné en rond dans le salon, le conte avait fait appeler son intendant. Il lui avait ordonné de faire chercher les bonnes pour habiller comme il se devait leur invitée.

Obax fut conduite dans une chambre, vaste et somptueuse comme le reste. Lorsqu'elle dévoila son visage aux inconnues, deux hoquetèrent de surprise et de frayeur, mais une resta stoïque.

-  Je te présente Madame Mathilde. Elle a été ma gouvernante quand j'étais jeune, aujourd'hui elle a voulu rester avec moi. Madame Mathilde, voici Obax. Elle nous vient tout droit d'Afrique et c'est une virtuose du clavecin. Je compte sur vous pour faire d'elle une beauté, avec un léger sourire.

Il savait pertinemment que Madame Mathilde ferait son travail sans poser de questions. Elle avait connu ses frasques, elle y était habituée. Quelque part, cette vieille fille était presque devenue comme lui. Elle comprenait des choses que le monde ne pouvait admettre.

-  Commençons par un bain, Mademoiselle Obax.

Après avoir été pomponnée pendant des heures, la jeune femme se montra à nouveau aux yeux des deux hommes. Alertés par les bruits de talons, ils sortirent du petit salon pour déboucher sur le hall. Là, en haut des escaliers, une nouvelle Obax s'y tenait.

Sa robe bouffante, au corset serré, laissait entrevoir une poitrine ronde. Le décolleté était lacé, rajoutant plus de charme à ses rondeurs féminines. Les manches, également volumineuses, appartenaient à la chemise blanche qu'elle portait en dessous son pourpoint. La jupe, fendue sur la cotte, était soutenue par la vertugade. Le satin cramoisi, avec lequel était fait la robe, était constellé d'or azuré et d'émeraudes. Sa chevelure, domptée grâce à la patience tenace de Madame Mathilde, tenait avec une plume.

-  Tu es magnifique, souffla Basile.

Les mots lui manquaient plus les battements de son cœur s'accéléraient. Eudes De La Mirage applaudit de contentement et de fierté. Elle était plus que ravissante, pas assez pour la cour à cause de sa couleur mais cela viendrait. Il suffisait que le peuple l'entende jouer pour que tous l'apprécient.

-  Je suis prête pour affronter le monde, déclara Obax, sûre d'elle.

OBAXOn viuen les histories. Descobreix ara