14 - Un coup de poker ?

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Professeur, de retour dans son hangar...

Assis sur ma chaise, je ne bougeai plus. Épuisé, vidé, crevé, et l'ajout de tous les synonymes ne pourrait pas expliquer mon état. Sans force, je ne tournai même pas la tête en direction des trois serbes qui déblayaient le tunnel. En 10h, leur travail avait été exemplaire et efficace alors que leur équipe était réduite par la garde de l'infirmière. Celle-ci n'offrait pas de résistance spécifique et en aucun cas la violence n'était exercée contre elle. Cela me rassurait. Oui, les gens pourraient me qualifier de psychopathe ou pire mais je m'en fichais. Certes, j'utilisais la terreur, les armes, le kidnapping pour aider à un braquage mais je ne voulais pas de victime. Raté. Un membre en avait pâti ainsi qu'une innocente dont j'aurais souhaité être le gendre.

Je venais de vivre un des pires moments de mon existence et il persistait à l'intérieur de mon corps, de mes organes, de mon cerveau, de mes muscles. Des sons se déversaient dans mon crâne à le faire exploser : des pleurs, des cris, des rires, des pleurs, des pleurs et encore des pleurs. Je voulus m'arracher les cheveux, hurler, m'effondrer, taper, envoyer les ordinateurs valdinguer sur le sol sale. Je souhaitai me rendre dans la tente de la police, faire face à Raquel et lui dire que c'était moi le Professeur et que tout cela devait s'arrêter. Je voulus entrer dans la Fabrique, les faire sortir immédiatement. Stopper cette folie meurtrière en somme. Reprendre le contrôle. Le contrôle. Je ne le possédais plus, le Professeur sombrait en même temps que Sergio laissait place à des émotions démesurées pour lui. Mais je ne bougeai pas, le regard vide, fixé sur le sol.

Alors tiraillé par la peur, la haine, le danger, la culpabilité, l'amour, la fraternité, la tristesse physiquement et moralement, deux solutions s'offraient à moi. Soit, je me ressaisissais et reprenais les pions en main pour arriver à échec et mate ; soit je me laissais couler dans les méandres des sentiments jusqu'au point de non-retour.

En deux secondes, la décision fut prise.

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Raquel, 15h30, dans le quartier de la police...

Pour la énième fois depuis quelques temps, je passai plus d'une demi-heure au téléphone avec des collègues. Cette fois, ce fut une femme possédant un accent basque bien prononcé qui se chargea de la communication.

- Inspectrice Murillo ? Ici l'agent Beitia, je vous appelle depuis l'hôpital de San Sebastian pour vous transmettre des premières informations.

- Allez-y, je vous écoute.

- Il semblerait que le jeune Marquina ait séjourné plus de dix ans dans cet hôpital. Nous n'avons rien appris sur sa maladie. Cependant, nous avons retrouvé une infirmière qui va bientôt partir en retraite faisant partie de l'équipe médicale de l'époque. La plus jeune certainement car toutes les autres sont dans des maisons de retraite ou décédées à ce jour.

- Bien, que peut-elle nous dire à son sujet ?

- Elle s'est occupée de lui quand il avait sept ans et demi jusqu'à sa sortie peu de temps après la mort de son père. Elle n'a jamais plus eu de nouvelles mais elle a pu nous le décrire physiquement et psychologiquement aussi. Je pense que cela va vous intéresser.

- Continuez.

- Eh bien, depuis tout petit il ressemble assez à son père : brun, légèrement bouclé et porte des lunettes depuis son plus jeune âge. L'infirmière a remarqué plusieurs fois que le petit faisait preuve de logique et d'une réflexion digne des plus grands. Son père prenait soin de l'éveiller à multiples sujets par des livres ou des histoires. Ah et ils jouaient beaucoup aux échecs aussi. Par contre, elle affirme qu'en public et même avec les médecins, il faisait toujours preuve d'une timidité extrême. Elle pense qu'aujourd'hui, il pourrait être très cultivé mais encore réservé.

La casa de papel // Et si... (Serquel)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant