Dernier Défi

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Il n'avait jamais cessé de se battre et il ne cesserait jamais. De son regard brûlait une détermination et une rage qui faisait fuir les plus couards de ses ennemis. De sa posture voûtée ressortait l'agressivité d'un grand fauve. De son visage déformé par la haine, se dessinait un sourire sauvage et carnassier. Sa lame tronçonneuse en main, le guerrier la fit rugir à plusieurs reprise en hurlant un défi hilare à la foule d'idiots assez inconscient pour se ruer vers lui. Le vert émeraude de son armure luisait sous le soleil déclinant de ce monde dont il avait oublié le nom. Ce guerrier était un des meilleurs de l'Empereur, et il était déterminé à le rappeler à Ses ennemis, quel que soit leur nombre ou leur force.

La marée de corps hurlant rencontra le guerrier solitaire. Il ne broncha pas, ne recula pas. Son sourire prédateur toujours fixé sur son visage ensanglanté. Il tailla, frappa, dépeça brutalement par dizaine tout les cultistes. Sa concentration était absolue, chaque parcelle de son esprit était concentrée sur chacun de ses mouvements, économisant ses forces tout en distribuant la mort de façon optimale. Toutes les fibres musculaires de son corps misent à contribution dans cet effort, dans ce défi. La clarté envahit soudainement son esprit au cœur du carnage. Il saisissait le comportement de certain de ses frères astartes d'un autre chapitre, il comprenait et réalisait pourquoi et comment ce moment, cet instant précis de pure bravade, revêtait une importance aussi particulière pour eux. Cette compréhension instinctive mena le guerrier vers de nouveaux sommets de fureur. Il rayonnait de puissance brut. Lui aussi pouvait partager la joie du Dernier Défi.

Le guerrier fit rugir de plus belle son épée tronçonneuse afin de couvrir le tumulte de la bataille qui faisait rage. Il ne se battait plus pour sa survie ou pour un objectif stratégique, il se battait pour savoir. Savoir combien d'entre eux, il emporterait avant de succomber. Il devait y en avoir plus. Plus d'ennemis, encore plus. Sinon, il ne saurait jamais.

La lumière mourante du soleil accrocha le jaune moucheté de sang de son épaulière, et la tête de fauve représentée dessus semblait rugir de concert à son désir de tuerie. Le guerrier de Kalaris frappa de son arme, de ses jambes, de sa tête et de tout ce qui lui permettait d'infliger des dégâts à l'océan d'esclaves qui l'encerclait. Lorsque la chaîne de son épée eut perdu toutes ses dents et se mit à fumer, il s'en servit comme d'un gourdin, éclatant les crânes comme des fruits trop mûre. Comme il aurait aimé que son Père puisse être là.

Un rappel à l'ordre s'imposa à lui sous la forme d'une éruption de douleur au niveau de la cuisse. Les cultistes visait de leurs lames les points faibles de son armure. La seule réaction qu'il eut à répondre à cela fut de rire de plus belle en écrasant de son pied l'imprudent qui avait osé le blesser.

Le space marine sauta de plus belle dans la mêlée et écrasa sur son passage des dizaines de corps. Il grognait et soufflait, mais ne stoppait jamais. Ses poings, perclus de douleurs d'avoir été trop serrés et frappés contre les os et les armures rudimentaire, distribuaient la mort à un rythme effréné. Jamais. Non, jamais. Jamais il ne s'arrêterait. La douleur de chaque centimètre de ses muscles était une bénédiction, le rappel qu'il était encore vivant et en état de se battre. Plus ses adversaires lui causaient de souffrance et plus il les remerciaient pour le maintenir conscient. Les systèmes intégrés de son armure avait depuis longtemps abandonnés leur itération des dommages que son corps subissait en continue. Elle ne se contentait plus que de diriger toute son attention sur comment traiter les lésions les plus urgentes par l'administration de puissants cocktails de stimulants et d'analgésique.

Sa fureur ne connaissait plus aucune limite, l'expression la plus pure de ce que son monde natal lui avait offert. Sans une hésitation, il avait dédié ce Dernier Défi à Kalaris et à son Père, le Kalish. Que Yhor fasse résonner les cris de ses ennemis à travers les âges ! Que Khermos étreigne sa fureur et l'emporte jusque dans les étoiles ! Jamais ! Jamais il ne s'arrêterait !

Il ne lui restait plus beaucoup de temps avant que sa fin ne le rattrape. Seul son esprit et sa rage brûlante faisaient encore mouvoir son corps meurtri. Il devait conclure et rapidement. Il lui fallait la bonne proie. Pas un de ces pitoyables adversaires incapables de le tuer à dix mille contre un. Non, il lui fallait la main qui les guidait. La sombre volonté qui menait cette piétaille à l'abattoir.

Le guerrier tourna sur lui-même en frappant afin de s'aménager un espace. Il se voûta un peu plus en choisissant une direction au hasard. Les muscles de ses cuisses et de ses mollets se contractèrent, un instant plus tard suivit de ceux de son armure. Il grogna et souffla comme un grox, expectora sang et vapeur par le nez et la bouche. Il n'avait plus rien d'humain, si tant est qu'un astartes puisse être qualifié ainsi. Il était recouvert des pied à la tête de sang et de tripes, il ne souriait plus, la concentration avait remplacée la rage et la moquerie. Il était une bête sauvage et indomptable.

L'astartes serra les poings et la mâchoire. Il s'élança avec tellement de force qu'il créa, l'espace d'un infime instant, une bulle de vide suite au déplacement d'air rapide. Sa charge renversa et déchiqueta tout ceux qui se trouvait devant lui. Il devait trouver sa proie. Où était-elle ? Là ? Non. Alors il l'aperçut, et sa vision ne se focalisa plus que sur elle. Ses pupilles se dilatèrent tant et si bien que ses yeux n'étaient plus que deux puits obscurs sans lumière. Il hurla et couru toujours plus vite. Sa posture était si voûtée qu'on aurait pu croire qu'il galopait à quatre pattes.

La proie le suivait du regard. Il ne le craignait pas. Un astartes en était de toute façon incapable. Mais le guerrier fauve avait bien l'intention de faire connaître ce sentiment au moins une fois à un traître avant de trépasser.

Sa charge l'entraînait de plus en plus vers sa proie. Il était proche, mais les humains corrompus tentaient de le freiner en se jetant devant lui. Il n'eut d'autre choix que de heurter au fur et mesure chaque mur de chair dressé devant lui par les mortels. Jamais. Jamais il ne s'arrêterait. Pas avant d'avoir fait goûter la peur à ce traître. Cette peur instinctive de la proie sentant le prédateur s'approcher inexorablement.

Il sauta brutalement, volant par-dessus la mer de tête, qui se leva à l'unisson pour suivre son mouvement. Il tomba violemment sur sa cible et se mit au travail sans plus attendre. Il le saisit à la gorge de ses crocs et lui arracha un épais morceau de chair. Il esquiva la contre-attaque maladroite du space marine du chaos avant de lui courir autour, en écrasant toute tentatives des mortel de s'immiscer dans son combat. La proie s'était relevée en tenant sa gorge d'une main. Il hurlait pour que ses sbires le protègent de lui. Trop tard. Le prédateur était en chasse, et rien ne pourrait le priver de son trophée.

Il repassa à l'attaque et refit tomber la proie avec lui, le frappant des poings et de la tête. Mordant dans les joints exposés de son armure. Il arracha un autre morceau de chair et s'acharna de plus belle. Il défonça l'armure du traître à mains nu avant de se rendre compte que ses poings en avait plus que souffert. Il ne pourrait plus jamais les desserrer. Il s'en moquait. Sa proie était probablement morte, mais il s'échina à le désosser membre par membre devant les cultistes effarer et en prise au désarroi d'avoir vu leur maître se faire écharper aussi facilement par une créature qu'ils avaient pourtant tant malmené.

Sa besogne accomplis, le fils de Kalaris se releva du corps encore fumant de sa proie et regarda autour de lui chaque visage. Il cracha du sang à leurs pieds et se mit à rire faiblement en s'essuyant la bouche avec son avant-bras. Il avait accompli son objectif, mais il était encore vivant. Son Dernier Défi pouvait encore continuer. Juste un peu plus. Quelques minutes. Non. Quelques secondes. Il n'avait pas besoin de plus. Il ne voulait pas s'arrêter maintenant. Non.

Jamais il ne s'arrêta. Même à terre, jamais il ne s'arrêta.

Certains disent que les sables ferrugineux de Gemmae résonnent encore du hurlement bestial du King Fang.

Sarbédia : Prélude vers l'abysseWaar verhalen tot leven komen. Ontdek het nu