Priori Incantatum || Draco Malfoy

X- Le courage d'une Lionne

Appuyée contre une meurtrière, Elfeda fixait l'emplacement de Gywnbleidd, son hibou. Ses yeux clairs étaient embués de larmes. Elle avait fait un effort surhumain, jusqu'ici, pour ne pas craquer. Les entraînements poussés de Quidditch, les querelles avec les Serpentard, les persécutions de Rogue, rien n'aurait pu fissurer son moral. Rien, hormis l'ignorance de ses parents.

Après s'être réveillée d'un cauchemar au réalisme effrayant, Elfeda était partie à la volière. Elle avait évité ses amis avec brio, avait sauté un repas et s'était réfugiée dans son tædium vitae. Rose s'inquiétait probablement à l'heure qu'il était et peut-être que George aussi. Néanmoins, Elfeda ne s'en préoccupait pas. Peut-être que son côté égoïste ressortait à chaque fois qu'une tache sombre s'imprimait sur son cœur.

La main tremblante, l'Écossaise effleura la lettre qu'elle tenait entre ses doigts. Elle ne cessait de caresser le cachet de son pouce, comme pour s'assurer qu'elle fît le bon choix. La jeune fille n'aurait jamais pensé avoir autant de mal à envoyer une fichue lettre. L'angoisse de se faire rejeter, encore, était bien trop grande. C'était en partie pour cette crainte qu'elle n'avait pas encore inscrit l'adresse de sa famille. Ce n'était pas nécessaire, pourtant, Gwynbleidd connaissait la route pour l'avoir exécutée des centaines de fois. Or, inscrire l'adresse de la forteresse paraissait important. Comme si elle voulait se rappeler qu'elle y avait bien une place. Poudlard n'était pas sa maison. Là-bas était sa maison. Ou plutôt, le Terrier était sa maison. Le reste, n'était qu'un domicile impersonnel.

Finalement, après avoir refreiné les perles salées au contour de ses iris, Elfeda ne tint plus. Son doigt tira sur la bague que lui avait offert George, elle tourna plusieurs fois l'anneau pour se donner une contenance ou pour s'empêcher de craquer, en vain. La gorge serrée, Elfeda laissa les larmes couler sur ses joues aussi froides que la glace. Pitoyable, se disait-elle. Elle était pitoyable.

Le regard flou et humide, Elfeda fixa la lettre qu'elle serrait avec force dans son poing. Et avant même que l'idée ne lui traverse l'esprit, sa baguette incendia le parchemin. Une flamme impressionnante avala goulument le document, n'en laissant aucune trace. Comme si cette lettre n'avait jamais existé. La Gryffondor renifla, et repoussa les cendres d'un coup de pied. Ses prunelles azuréennes se posèrent sur son hibou qui l'observait de ses grands yeux orange.

— Quoi ?! explosa-t-elle avec fureur.

Gwynbleidd, outré par cet élan de colère envers sa personne, fit grincer ses serres sur la pierre froide et se rempluma. Ce rapace avait beaucoup de fierté, tout comme le reste de la famille de Coucy et il ne tolérait pas qu'on s'emporte ainsi en sa présence. Elfeda se fichait bien qu'il soit vexé, elle n'avait plus de patience pour de telles enfantillages. Elle-même était encore une enfant. Une stupide enfant.

Étranglée par la cravate rouge et dorée, Elfeda souffla avec difficulté et tira sur son pull pour le déplisser. Elle devait songer à aller en cours. Hagrid l'attendait. Et elle aimait cette matière. Soins Aux Créatures Magiques. Elle était douée. Sûrement la meilleure de toute l'école. Enfin, c'est ce que le garde-chasse lui disait. Rose était aussi d'accord. Elfeda était la seule à avoir réussi chaque examen, chaque pratique, même les plus complexes. Elle ne reculait jamais devant le danger, du moins pas celui que représentait les créatures. Sinon, elle était d'une lâcheté imprévisible. Comme toujours.

Elfeda ramassa son sac et s'apprêtait à partir quand elle manqua de bousculer Draco Malfoy. Aussitôt, elle effaça les larmes qui dévalaient encore son visage tiré et ignora le Serpentard. Cependant, le blond n'avait pas l'air décidé à la laisser sortir, l'obligeant à croiser son regard. Toujours ces yeux vides indifférents. La seule différence c'était ces cercles noirs qui tombaient sous ses cils. Et ce costume noir, comme si l'uniforme n'était plus assez bien pour lui. Comme s'il n'avait plus rien à faire ici.