16 | Un beau moment

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Il a finalement proposé de laisser la porte ouverte, donc j'ai accepté d'entrer puisque c'était effectivement un peu plus complexe que ça en avait l'air de prime abord. Trois sachets de plantes séchées, autant températures d'eau différentes afin d'obtenir une décoction parfaite – pour enfin profiter d'une efficacité optimale – d'après lui, me récitant les paroles d'un dénommé Olrik. C'est bien entendu dans l'intérêt de Jérémiah que je l'ai autorisé à attraper ma main pour me faire prendre conscience de chaque chaleur idéale et c'était évidemment en visant le même objectif que ses doigts ont glissé plusieurs fois sur la peau de l'intérieur de mon poignet. Quoi d'autre, sinon ?

Putain. De. Bordel. De. Merde !

Ouais. Tu lui avais dit de ne plus jamais te toucher en plus.

Je suis au courant, merci ! Sauf que nous parlons de la santé du prince, tout de même !

Hum hum.

Qu'y a-t-il ?

Oh... je cherche le lien entre le soulagement du mal de mer de ton meilleur ami et les battements de ton cœur lorsque vous étiez proches.

Je ne vois nullement de quoi tu parles !

De ce désir plus si latent que Priam et toi éprouvez l'un pour l'autre.

Mais enfin ! Évite d'être ridicule !

Franchement, tu devrais suivre le conseil que Jérém t'a donnée le soir du bal. Autrement dit te défouler un peu avant que tout le monde ne se rende compte de cette tension sexuelle mal refoulée !

Comme s'il était intéressé !

Pour quelle autre raison serait-il là à te regarder sans cesse, sinon ?

Je suis prête à parier qu'il me surveille pour trouver une nouvelle occasion de m'insulter !

C'est ça !

Ouais ouais !

Je retiens quand même que tu n'as pas dit non à l'idée de recoucher avec lui !

Ta gueule putain !

***

Assise à bâbord près de la proue du bateau, je laisse mes pieds-nus se balancer lentement au-dessus de la mer. Mes paumes sont appuyées sur le bastingage, mon attention fixée sur les mouvements apaisants de l'eau. C'est hypnotique, ne trouvez-vous pas ? Pour tout vous dire, j'ai beaucoup trop chaud, mourant d'envie de sauter dans le but de me rafraîchir. Je pense que la chienne – allongée sur le sol – pense exactement à la même chose.

— Est-il sérieux de t'installer ainsi sur le bord ? me réprimande Anas qui vient d'arriver à ma droite, dépliant une fois de plus cette maudite ombrelle par-dessus ma tête.

Tu es si ennuyeux !

Il n'a pas tord, El, souligne Jérémiah, se plaçant de l'autre côté.

C'est un soupir désabusé assorti d'un grognement qui m'échappe alors que je lève les yeux au ciel.

— Imaginez un instant que je tombe, messieurs ! Que se passerait-il ?

Ils froncent les sourcils, m'observant sévèrement puisque déjà au clair avec l'idée que je m'apprête à dire quelque chose qui leur semblera stupide.

Détendez-vous les gars ! Je sais nager !

Vous pourriez crier « une femme à la mer ! », avouez que ce serait drôle !

Jusqu'au fond de l'eauOù les histoires vivent. Découvrez maintenant