52 | Vous retrouver

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Pas après pas, une averse en suivant une autre, les minutes se sont transformées en heures étant elles-mêmes devenues des jours s'étant à leur tour mués en... oui. Je peux parler de semaines désormais, deux venant de s'écouler au rythme de notre périple. Je crois que mon cœur bat de plus en plus vite et me demande parfois s'il y a un seuil où il s'arrêtera, vaincu. Épuisé par ce trop plein d'espoir me dévorant. C'est un sentiment – presque – pire que ma haine, vous savez. Pourquoi ? C'est simple. Car leur mort à tous les quatre avait ce côté définitif que rien ne pouvait ébranler, ma douleur étant inéluctable. Irréversible. Inexorable. Là, je suis assaillie par toutes les insupportables incertitudes du monde. La principale étant...

Vais-je vous retrouver ?

J'ai canalisé une partie de mon trop plein d'émotions en protégeant mes compagnons de la pluie tandis que nous avancions dans la jungle. Marchant devant en compagnie de la pétillante Flumme, j'érigeais avec satisfaction une sorte de dôme sous lequel ils étaient abrités. Vous vous posez probablement la question alors sachez qu'en effet, c'était épuisant. Au moins pouvais-je dormir la nuit, happée par la fatigue et les bras compréhensifs de Priam. Autrement, je pense que jamais je n'aurais réussi à trouver le repos. Malgré son importance, lui seul n'aurait pas suffit à m'apaiser, cette fois. Puisque le rythme de mon pouls dans mes tempes ne ralentit jamais, chaque seconde semblant créer un nœud supplémentaire dans ma gorge. Je suis d'ailleurs silencieuse la – très grande – majorité du temps. C'est une vieille habitude – cela dit – donc personne n'est vraiment étonné par cette attitude. Perdue dans mes pensées – mes sentiments – je ne parviens qu'à marmonner des « oui » ou « non » en fonction des situations, des questions posées. La seule comptant à mes yeux étant...

Suis-je sur le bon chemin pour vous retrouver ?

La flore est réellement splendide. L'observant avec attention – subjuguée par sa beauté – j'ai tenté de me souvenir si je suis déjà passée par ici, en vain. J'ai bien quelques bribes de souvenirs d'une fillette joyeuse sautillant entre des lianes et autres fleurs colorées, sauf qu'il m'est impossible de me rappeler avec exactitude de quelle forêt il s'agit. D'autant qu'il y en avait une aussi chez nous, à Téhéras. Et j'étais si petite alors que je prétendais être grande... Quoi qu'il en soit, celle de Lagas est plus inhospitalière qu'à Manas, les arbres plus hauts, les animaux plus gros. Autant de raisons en faisant cet endroit inexploré de ce continent et croyez-moi sur parole lorsque je vous dit qu'avoir un Faëra à nos côtés a probablement sauvé nos vies à plusieurs reprises. Quel pouvoir merveilleux que de pouvoir converser avec la faune ! Lorsque je serai à nouveau en capacité, je ne manquerai pas de le remercier. Puisqu'il a su – en prime – obtenir des informations pour nous diriger vers les hommes vivant dans cette contrée sauvage. Me permettant de me cramponner d'autant plus fort à...

Est-ce parmi eux que je vais vous retrouver ?

Mon appétit étant inexistant, Anas fait équipe avec Asoa pour obtenir que j'avale quelques bouchées régulièrement. Il y a un nombre incalculables de fruits délicieux, sur notre route. C'est sans entrain que je me force à être docile, consciente qu'ils ont raison. Quand j'arrive à me connecter au moment présent, je suis ébranlée par la beauté du lien se tissant devant moi. Il y a cet éclat nouveau dans les iris du soldat impassible ainsi qu'un léger rougissement improbable habillant les pommettes de la fougueuse brune lorsqu'ils s'effleurent. Puisque quand elle le touche, elle sait – ressent – semblant comblée. J'esquisse un sourire sincère, bien qu'au clair avec les difficultés que pourra rencontrer une idylle naissante entre des personnes originaires de deux continents aussi éloignés. Lui ne quittera jamais son frère – son sang – qu'il protégera envers et contre tout. Mais elle... sa loyauté envers sa reine – devenue rapidement une amie – et son roi – ancien amant qu'elle a aimé avant de se raisonner – l'autoriserait-elle à les quitter ? Je tente d'occulter que ces questionnements vont peut-être me concerner sous peu, mon esprit étant pour l'instant happé par...

Jusqu'au fond de l'eauOù les histoires vivent. Découvrez maintenant