CHAPITRE UN .3

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Tranit le remercia d'un signe de tête. Elle n'avait pas eu le temps ni même la volonté de rencontrer les défenseurs qu'elle avait vaincu. À simplement regarder dans la direction dans laquelle ils se trouvaient prisonnier la faisait frissonner de dégoût.

Elle souffla, comme pour chasser ses mauvaises idées hors d'elle et reporta son attention sur l'extérieur. Des dizaines de tentes avaient été dressées le terrain entourant le rempart.

Le sol avait été tassé depuis des lustres et cela offrait un espace suffisant pour y bâtir un véritable village de toile. Les tentes étaient de celles que les chevaliers utilisaient en campagne, capables d'accueillir trois ou quatre personnes.

Il y en avait des dizaines et nombreuses étaient celles affichant un fanion rappelant un attachement à Louvie-Juzon, au Banca. Tranit se souvint de ces centaines de jeunes chevaliers ou écuyers ayant souhaité prêter serment directement à Saert dans l'espoir d'obtenir une meilleure place qu'en suivant placidement Erwan ou Awèl.

Après leurs égarements qui s'étaient terminés par une frayeur monstrueuse pour l'un d'eux, Erwan les avaient rappelés non loin de lui, mais ne leur faisait sans doute pas encore assez confiance pour leur permettre de séjourner à l'intérieur des murs.

Tranit vit aussi plus loin, en contrebas un autre village de tentes bien moins ordonné mais accueillant plusieurs autres dizaines de combattants. Des alliés, des volontaires.

La jeune femme reconnut le fanion haït par Adacie, celui du Lasseube. Elle frissonna en découvrant un peu plus loin d'autres tentes surmontées d'insignes religieux. Un gorsèd, une assemblée druidique, avait pu être constituée. Des jugements risquaient donc d'entraîner la peine de mort ?

La jeune femme entendit des exclamations de surprise derrière elle. Les choses étaient devenues assez graves pour en arriver à cette extrémité ?

Tranit se souvenait des réticences de son père à participer à des tribunaux militaires. Il estimait que les juges religieux sans aucune expérience guerrière avaient parfois des exigences trop rigoureuses envers les combattants.

Des mousquetaires à cheval virent à leur rencontre et la troupe fut conduite non loin du tribunal. Des potences avaient déjà été dressées, alors que plusieurs dizaines de combattants se rassemblaient pour assister aux cérémonies.

Pour ceux n'ayant pas encore combattus, une bonne exécution pouvait être une distraction bienvenue. Plus loin, dans une sorte d'enclos, des hommes en simple chemise se trouvaient sous bonne garde.

Tranit allait demander à l'officier des mousquetaires qui ils étaient mais le jeune lieutenant lui indiqua un chariot, un peu en retrait des autres, qu'elle reconnut.

Erwan était déjà là et semblait l'attendre. Ce n'était pas trop tôt. Tranit fit signe à Luin de prendre la tête de leur groupe et elle talonna sa monture, heureuse de pouvoir revoir le jeune homme et discuter avec lui.

Sans doute que sa présence serait comme un baume sur sa douleur. Si après Adacie ou son père il y avait bien quelqu'un capable de la comprendre, ça devait être lui.

Tranit laissa son dorkis entre les mains d'un hussard et elle grimpa dans le chariot qui flottait encore au-dessus de l'herbe drue mais courte recouvrant les terres alentour.

Le vestibule dans lequel un petit salon avait été aménagé était vide mais une voix fatiguée parvint de la seconde partie du véhicule.

— Tranit, c'est bien toi ?

— Oui, Seigneur...

Tranit s'interrompit en voyant Erwan sortir de sa chambre. La splendeur de son uniforme ne pouvait masquer son visage hâve et creusé, comme s'il n'avait pas dormi depuis des jours. Il avait maigri aussi !

Les Larmes de Tranit - 7Donde viven las historias. Descúbrelo ahora