C H A P I T R E | 23

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« Les hommes libres peuvent partir, et quelquefois ils restent. Voilà la plus belle preuve d'amour : prendre la liberté de rester alors qu'on peut s'en aller. »
— Camille Laurens

AARON

J'étais assis sur le canapé, les mains posées sur mes genoux. J'attendais. Voilà plus de deux heures que Katerina était partie et je n'avais pas de nouvelles. Je ne comprenais pas pourquoi ça lui prenait autant de temps. Je n'étais pas bien, mon instinct me disait qu'il s'était passé quelque chose.

Mon téléphone se mit à sonner. Je courus le chercher. C'était Katerina.

— Aaron ? pleura-t-elle, Viens me chercher je t'en supplie, j'ai besoin de toi !

— J'arrive, ne bouge surtout pas. Ça va aller mon ange, j'arrive !

Je mis rapidement mes chaussures et descendis les escaliers précipitamment. Je ne savais pas ce qui s'était passé pour la mettre dans cet état, mais je comptais le découvrir très vite.

— Katerina ? criai-je en entrant dans la demeure.

J'entendais du bruit en provenance de l'étage. Je montai les escaliers quatre à quatre et entrai dans sa chambre. Elle était assise par terre, les cheveux ébouriffés, les larmes dévalant ses joues. Elle serrait deux feuilles contre sa poitrine. Lorsqu'elle me vit, elle se leva mais trébucha. Je l'attrapai et elle pleura de plus belle. Ça me faisait tellement mal au cœur de la voir dans cet état.

— Je suis là, tout va bien, chuchotai-je en lui caressant les cheveux. Tout va bien.

Je la posai sur le lit et m'accroupis à côté d'elle.

— Tout ne va pas bien Aaron, sanglota-t-elle. Je... Mélodie, elle...

Elle ne put terminer sa phrase tellement ses sanglots étaient forts. Je continuai de lui caresser les cheveux et de chuchoter des paroles que je souhaitais réconfortantes. Je ne savais pas quoi faire pour apaiser sa douleur. Si j'avais pu l'affronter à sa place, je l'aurais fait sans hésiter. Je ne pouvais pas supporter la vue de ses larmes, je me sentais impuissant de la voir si triste et de ne pas savoir comment l'aider.

— Je suis désolée, tu avais vu juste. Je suis tellement désolée si tu savais ! C'est Mélodie qui...

— Je sais, c'est pas grave, répondis-je les larmes aux yeux.

Je savais de quoi elle parlait. Lorsque Cadence était venue au garage, elle avait insinué le fait que Mélodie l'avait aidée à me piéger. Lorsque j'étais allé chez ma mère pour la nuit, après m'être disputé avec Katerina, je lui avais parlé de cette hypothèse et elle était devenue pâle. Elle m'avait demandé de ne pas l'interrompre car elle devait m'avouer quelque chose : elle savait tout concernant mon arrestation.

Quelques années auparavant, une semaine après mon arrestation pour être exact, Sophie Parker, la mère de Kate, était venue rendre visite à ma mère. Elle venait lui demander l'autorisation de plaider en ma faveur. Ma mère n'avait pas compris pourquoi l'avocate la plus réputée d'Oldham venait lui proposer de travailler gratuitement. Elle lui a alors tout raconté : le fait que sa fille, Mélodie, s'était donné la mort, mais qu'elle était aussi la complice de Cadence. Qu'elles avaient toutes les deux mis en scène un vol dans l'unique but de me pourrir la vie. Sophie Parker était venue s'excuser et essayer d'arranger les choses. Ma mère s'était bien évidemment énervée, mais sa colère était très vite retombée. Elles étaient toutes les deux mères et la mienne ne voulait pas imaginer la douleur que provoquait la perte d'un enfant. Elle ne pouvait la blâmer pour les fautes qu'avait commises sa fille. Sophie Parker avait ensuite fait tout son possible pour alléger ma peine. Je n'avais pas compris pourquoi elle se battait autant pour un pauvre gamin, mais c'était pour essayer d'arranger la plus grosse connerie que sa fille ait jamais faite.

Je savais au fond de moi que c'était à cause de Mélodie et Cadence que j'étais allé en taule, mais entendre ma mère me le confirmer, ce n'était pas la même chose. Je n'en voulais pas à Mélodie, parce que je savais quel genre d'emprise psychologique pouvait avoir Cadence sur les gens. Je ne pouvais pas lui reprocher d'avoir suivie mon ex dans son coup, car si elle me l'avait demandé, je l'aurais fait aussi.

Ma mère m'avait dit de ne pas en vouloir à Katerina car elle n'était pas au courant, mais surtout car elle n'y était pour rien. Elle ne savait rien de mon arrestation, ni des agissements de Mélodie. Après tout ce que venait de me raconter ma mère, l'idée d'en vouloir à Katerina ne m'avait pas traversé l'esprit. Elle n'avait rien fait, je ne pouvais pas me fâcher contre elle pour des actes qu'elle n'avait pas commis, c'était complétement idiot.

— Tu ne sais pas. Je suis désolée, je ne savais pas je te jure, dit Katerina en s'asseyant et en me tendant les deux lettres.

— Je sais que Mélodie est liée à mon arrestation, je ne t'en veux pas. Je ne veux pas que tu t'excuses, je sais que tu n'y es pour rien d'accord ? répondis-je collant mon front contre le sien. Repose-toi. Je vais t'apporter un verre d'eau. On parlera après, d'accord ?

Elle acquiesça et je descendis dans la cuisine.

Je savais que Katerina avait la fâcheuse manie de toujours prendre sur elle, de se rendre responsable de tout. Je craignais qu'elle réagisse comme ça, c'était pourquoi je ne lui avais pas parlé de ma discussion avec ma mère. Je ne voulais pas remuer le couteau dans la plaie alors qu'elle semblait aller beaucoup mieux.

Je rejoignis Katerina et la trouvai endormie. J'espérais que ses démons ne viennent pas gâcher ses rêves.

Je me réveillai très tôt. Katerina dormait encore. Je sortis du lit le plus silencieusement que possible. Je ne voulais pas la réveiller. Je descendis dans la cuisine et commençai à préparer le petit-déjeuner. Je n'étais pas aussi doué que ma copine, mais j'avais quelques bases en cuisine. J'étais en train de mettre la table lorsque Katerina arriva dans la salle à manger.

Elle avait les yeux rouges et gonflés. Elle était crispée, ne me regardait pas dans les yeux. Je ne pouvais pas la laisser se détruire sous une culpabilité qu'elle n'avait pas à endosser. Je m'approchai et l'enlaçai. Au début elle ne bougea pas et resta comme figée, mais elle finit par se détendre et me rendit mon étreinte.

— Tout va bien. Tu n'as pas à t'en vouloir. Je vais bien. Nous sommes ensemble, c'est tout ce qui compte.

— Pourquoi tu n'es pas fâché ? Tu ne m'en as même pas voulu une seconde !

— Pourquoi je devrais me fâcher avec toi ? Tu es Mélodie ? Tu as aidé Cadence ? Non. Donc il n'y a aucune raison d'être en colère, dis-je en prenant délicatement son visage dans mes mains. Je ne veux pas te voir comme ça, tu ne dois pas te sentir coupable.

— Je ne te mérite pas, répondit-elle les larmes aux yeux.

— Oh que si, terminai-je en l'embrassant.

C'était un jour d'étéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant