Lollipop, celle qui ose

5.1- Le grand jour est là

C'est le jour J ! Nous sommes samedi. J'ai rendez-vous chez l'esthéticienne, je veux vraiment être parfaite pour ce soir. Arielle m'a conseillé cet institut, je ne suis pas une grande adepte de l'épilation à la cire mais pour une peau douce, rien de mieux. Alors quand il faut, il faut !

Une jeune femme m'installe dans une petite pièce où je pose mes affaires sur un fauteuil. Elle me demande de mettre un string jetable et de m'allonger. Mon dieu, c'est microscopique ! J'enfile ce bout de tissu immonde et m'installe. Maeva l'esthéticienne revient. Elle met ses gants qu'elle fait claquer en s'exclamant :

— Ça va faire un peu mal au début !

Ça ne fait absolument pas sadique, elle sait me mettre en confiance, celle-là !

Je me rappelle encore Arielle me dire : « Demande Maeva, elle est super douce et gentille. Elle te mettra de suite à l'aise ! ».

Tu parles ! Merci ma copine !

La sadique...euh pardon... l'esthéticienne désinfecte, talque puis elle applique sur mon intimité un genre de pâte mielleuse.

— Détendez-vous ! Ça va aller ! ironise-t-elle avant de tirer d'un coup sec.
— Aïe ! grince-je des dents avec l'envie de lui arracher les yeux !
— Il paraît qu'il faut souffrir pour être belle.

Étouffe-toi avec ta cire ! Mettre à l'aise, tu parles, c'est une serial killer du poil, surtout quand elle s'arme d'une pince.

Maeva continue mon maillot puis elle me demande de me retourner pour faire le SIF.

— Le SIF ? demandé-je alors que l'incompréhension se lit sur mes traits.
— C'est l'abréviation pour dire sillon inter fessier, annonce-t-elle avec un sourire diabolique.

Ah ben allons-y ! Il ne faudrait pas qu'un poil vienne gâcher ce moment tant attendu ! Imagine la scène, mon Monsieur Mystère qui se met à zozoter parce qu'il a un poil à moi sur la langue! Quel cauchemar ! Je dois être nickel !

Cette jeune femme qui m'était inconnue, y a moins d'une demi-heure a vu mon anatomie comme jamais ! Alors que M.M, lui ne verra rien ! L'ironie du sort certainement !

Je prends sur moi et elle poursuit. Nous passons au moment que je préfère, la manucure avec une pose de vernis semi-permanent. Ma récompense est plus que méritée !

— Quelle couleur souhaitez-vous ? me demande le bourreau en étalant son panel de couleurs.

Je lui indique un joli rouge cerise qui s'accordera à merveille avec la sulfureuse Lollipop que j'ai créée. Je sais que c'est moi...mais c'est une meilleure version de moi-même avec beaucoup moins d'hésitations. J'ai l'impression que Lollipop est un peu la petite voix au fond de moi, que je ne laissais pas s'exprimer. Celle qui a envie de crier : « Fais-toi du bien ! VIBRE ! Ose ! ».

Est-ce que c'est celle du démon tentateur ou celle de la raison ?...On s'en fiche car ce soir, je vais m'amuser, enfin j'espère!

Le soir venu, je prends une bonne douche chaude puis j'hydrate mon corps avec une crème parfumée senteur bonbon comme mon pseudo. Je m'habille de mon bel ensemble en dentelle noir que je recouvre d'une robe portefeuille sans accessoire pour faciliter le retrait et ne rien oublier avant de partir. À mes pieds, j'enfile des baskets car sait-on jamais, si je dois fuir... ! Enfin c'est la théorie d'Arielle mais vaut mieux être prudente !

Je me maquille légèrement même s'il ne me verra pas. Je rajoute un peu de parfum comme une signature olfactive que je pourrais lui laisser. Une trace indélébile de mon passage avec des notes délicieusement sucrées, tout moi ! Mes amis m'attendent à la sortie de ma chambre. Paul scrute ma tenue et bloque sur mes Converses.

— Bravo Arielle ! T'es contente de toi? Ta connerie a déteint sur elle!
— Quoi ! Au moins elle peut courir avec des baskets !
— Il ne manquerait plus que tu pues des pieds, rigole Paul en me regardant.

J'adore mes nouvelles Converses montantes bordeaux. Même si des escarpins auraient été mieux, elles sont confortables et en plus ça rassure Arielle.

— Tu nous appelles dans 2 heures et si tu ne réponds pas, on débarque tous les 3 avec les flics, me rappelle Arielle avant de me prendre dans les bras.
— Prends ton pied ma Lollipop ! Et surtout, aie confiance en toi ! m'encourage le blond sur le pas de la porte.

La boule au ventre et la gorge serrée, Paul pose ses deux mains sur mes épaules.

— Nicki, je sais à quoi tu penses.

— J'ai peur de ne pas lui plaire !

— Ôte-toi ça de la tête ! Tu es Lollipop, une femme fatale !

Un bon mantra à réciter ! Lollipop est une femme fatale et elle ose vibrer ce soir !

Je me remémore le scénario établi avec mon Monsieur Mystère qui le sera bientôt beaucoup moins ! Je l'ai informé un peu plus tôt dans la soirée d'hier par téléphone que je ne resterais pas plus de deux heures et que mes amis attendaient un appel de ma part, ce qui l'a bien amusé. M.M m'a rassuré en me disant que mes amis et moi faisions bien et qu'il serait respectueux.

Les jours qui ont suivi son invitation, nous avons échangé quelques messages et ce dernier appel hier pour bien fixer mes règles. Je suis très excitée de le rencontrer enfin ! Lui, mon fameux Monsieur Mystère ! Mais une question me taraude l'esprit : « Suis-je digne d'être la Lollipop que j'ai inventée ? », « Évidemment ! » me répond ma petite voix intérieure.

Le stress me submerge mais je ne faiblis pas, je me dirige vers notre lieu de rendez-vous. J'arrive à l'hôtel, c'est un bel endroit, assez classe, M.M ne se joue pas de moi. Je récupère le pass de la chambre, enfin il a pris une suite ! Il a voulu que je puisse me mettre à mon aise tranquillement et dès que je me sentirai prête, il rentrera par la porte communicante. Mon cœur bat la chamade, mon estomac se noue et ma gorge devient de plus en plus sèche. Je tremble presque quand je vois les portes de l'ascenseur s'ouvrir à l'étage. Je sursaute à la vue d'une vieille dame qui sort de sa chambre. Elle me sourit et me salue en empruntant l'ascenseur à son tour. Je passe la carte magnétique et ouvre la porte sur une spacieuse chambre joliment décorée. Plusieurs préservatifs sont posés sur la table de chevet, trois pour être exact.

Petit coquin ! T'as vraiment prévu qu'on s'éclate ! Hum !