Chapitre XIV - Premier jet

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    A peine rentrés, je pouvais déjà ressentir les effets négatifs de la présence appuyée d'Abraxius dans mon esprit. Naïra commençait à se montrer fébrile, sursautant au moindre bruit, prête à attaquer le moindre inconnu qui se montrerait un peu trop suspect. Elle me proposait également de partir me cacher dans la forêt pour me soustraire au regard de tous et attendre tranquillement que la menace passe. Bien entendu, j'étais contre cette idée. Outre le fait qu'elle souhaitait dormir dans des flaques de boue et manger des lapins ou des écureuils crus, ce qui me donnait la nausée rien qu'à y penser, rester seule ferait aussi de moi une proie facile. Nous ne savions toujours pas le processus exact qu'utilisait le sorcier pour voler des âmes, et donc s'il le faisait à distance ou non.

    Rester dans la meute, où il lui serait impossible de s'approcher sans attirer l'attention d'autres membres, me semblait la meilleure solution.

    Pendant que je commençai à remonter le long escalier qui menait aux bureaux, au premier étage, une voix rauque me stoppa net :

  - Miss Valentine ? Si cela ne vous dérange pas, j'aurais besoin de vous poser quelques questions au sujet de ce qui s'est passé aujourd'hui.

    Bien entendu. On ne pouvait pas tromper le flair d'un alpha.

    Je me retournai et me contentai de lui sourire. Derrière lui, Sir. Albert Coalman était livide et ses mains semblaient dotées d'une vie propre tant elles tressautaient et se tordaient. Mais, après tout, certains secrets n'étaient pas voués à rester inconnus pendant si longtemps, surtout s'il s'agissait de mon nouveau supérieur. Et le mien n'en était plus vraiment un depuis de longues années. Seulement un sujet quelque peu tabou au sein de la meute.

    En quelques enjambées, Lord McDonnell me rejoignit et passa son bras sur le mien. Peut-être était-ce là sa manière de s'assurer que je ne m'enfuirais pas, peut-être était-ce simplement une question d'étiquette. Dans tous les cas, je le laissai faire et l'accompagna dans le reste des marches.

    Dès que nous entrâmes dans mon bureau, Henry se releva puis s'immobilisa tout aussi rapidement quand il identifia la personne à mes côtés.

  - Henry, où sont partis Mr. Gilson et Mr. Twain ?

  - Mr. Twain a rejoint Miss. Jane Winston, elle s'occupera de lui pour les prochains jours. Quant à Mr. Gilson, il est parti avec Lady Elizabeth Hepburn pour prendre le thé avec les vampires. Il ne sera pas de retour avant un moment.

  - Merci beaucoup, Henry.

    Il s'approcha pour récupérer nos vestes et chapeaux, les posa sur le porte-manteau puis partit s'isoler dans un coin de la pièce pour préparer le thé. Je pris donc place dans mon fauteuil, tandis que Lord McDonnell prit place sur la causeuse - qui grinçait toujours autant. Son expression était des plus graves et solennelles quand il me demanda :

  - Vous n'êtes pas vraiment une louve-gaou, n'est-ce pas ?

  - C'est exact. Je possède une âme renard et une âme loup, ce qui fait de moi une hybride. J'imagine que vous avez déjà rencontré d'autres personnes avec la même condition physique, si vous avez deviné aussi tôt que j'étais particulière.

  - Nous avions un cas dans mon ancienne meute, il n'a malheureusement pas dépassé son onzième anniversaire. D'après ce que j'ai pu comprendre, son âme renard est devenue folle et a dévoré les deux autres âmes, puis s'est laissée mourir.

    Cela pouvait malheureusement arriver, bien que ces cas étaient minoritaires.

  - Si cela ne vous dérange pas, je serai très curieux de savoir comment une hybride française aussi âgée a pu survivre aussi longtemps et comment elle s'est retrouvée dans la meute la plus influente de Londres, ajouta-t-il en posant ses mains jointes sur son ventre.

Le voleur d'âmesWhere stories live. Discover now