Chapitre 4 - Riley

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« Être là-bas,

Vivre là-bas,

Juste là-bas

Toi et moi c'est pas une mauvaise idée »

Diam's – Evasion

Un petit clic et les paroles de ma dixième chanson seront publiées sur mon blog. Espérons que celle-ci plaise tout autant que les autres. J'ai reçu beaucoup de commentaires positifs sous mes précédents posts. Il faut dire que cette semaine de repos forcé m'a laissé pas mal de temps pour peaufiner mes textes. Selon les dires de mes abonnés, j'écris « divinement bien ». Mes mots percuteraient leur âme et transcenderaient leurs pensées. Quelles idioties ! Je ne fais pas dans la magie et encore moins dans la divination. Je ne fais que retranscrire d'une manière plus ou moins jolie, tout ce que je ressens. Et en ce moment, ce qui encombre mon esprit n'est pas fait de licornes et de nuages roses.

Le vacarme que fait ma mère et ses « amis » en bas me fait grincer des dents. Je n'ai qu'une envie, fuir cet endroit sans pour autant savoir où aller. Amber est en week-end avec ses parents. Si elle avait été là, j'aurais pu squatter chez elle cette nuit et dormir l'esprit tranquille. Si au moins il ne pleuvait pas à torrent, je serais déjà au Saxo. Mais à cause de la pluie qui s'abat sur la petite ville d'Everston depuis trois jours, le club est inondé et a dû fermer pour ce soir. Et moi qui était ravie de reprendre du service, me voilà à nouveau confinée à la maison. Quelle plaie !

La dernière fois que j'ai parlé à ma mère c'était pour lui annoncer que Grace refusait de me faire bosser tant que je ressemblerais à un monstre. Lui balancer que je n'aurais plus de quoi payer ses précieuses bouteilles pendant une semaine l'avait fait blêmir. C'en était presque jouissif. Elle m'avait présenté ses excuses mais je n'en ai pas tenu compte. Néanmoins, je dois reconnaître que contrairement à ce que je pensais, elle ne m'a pas ordonné de lui acheter une seule bouteille de la semaine. Je sais qu'elle boit toujours, son haleine est comme un parfum qui s'imprègne dans les murs de la maison, mais au moins, elle me laisse tranquille. Je sais que ça ne durera pas. Je sais qu'elle reprendra son cercle vicieux dès que je recommencerai mon job du soir et que j'aurais donc de quoi la fournir en alcool.

Un rire sonore me fait presque sursauter. Je louche sur mon casque, envisageant un instant de le poser sur mes oreilles, le son au maximum. Mais la perspective d'être totalement isolée me fait flipper. Je dois rester vigilante car il arrive que les « amis » de ma mère prennent ma chambre pour la salle de bain et tentent de m'attraper dans leur filet par la même occasion. Avoir de la chair fraîche à portée de main les réjouît dans leur délire alcoolisé, peu importe que je n'aie que 16 ans. Le nombre de fois où leurs mains se sont baladées sur mes fesses me donne souvent des cauchemars. S'ils n'étaient pas rappelés à l'ordre par ma mère qui, étrangement, arrive à retrouver son rôle dans ces moments, je crois que j'aurais pu ajouter « violée » à mon mur des horreurs.

Au moins maintenant, grâce à l'inconnu qui m'avait sauvée la dernière fois, je dispose d'un verrou et d'une clé. Même si ce système m'offre une sécurité relative, je ne suis pas sure qu'il fasse le poids face à un malade dopé à l'adrénaline. Au moins, il me laissera le temps de fuir me réfugier sur le toit. C'est déjà ça.

Je pose la tête sur mon bureau jusqu'à ce que le bruit d'une notification me fasse bondir. Serait-ce LUI ? Par lui, je veux parler de SingerGuest21, un abonné avec qui j'aime discuter depuis qu'il a posté un premier commentaire sur mon blog. Nous partageons la même passion : la musique. Lui aime les instruments, moi les mots. Il m'a fait promettre d'écrire pour lui le jour où il deviendrait un chanteur célèbre. Je lui ai fait promettre de ne pas m'oublier si ce jour devait arriver. Nous nous sommes mis à imaginer ce que seraient alors nos vies, comme un jeu de rôle qui ne deviendra jamais réel. Nous le savons, mais rêver ne coûte rien.

Over The RainbowWhere stories live. Discover now