5. L'enlèvement

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(Deux semaines après l'arrivée de Flix)

La sonnerie de sept heures retentit dans l'appartement. Flix se réveilla en sursaut, et poussa un long cri, avant de se rappeler que ce n'était qu'un réveil. Abhel, lui, n'avait pas fermé l'œil de a nuit, et était épuisé. Il n'avait cessé de réfléchir aux visions de Flix, car il était persuadé qu'elles détenaient une information très précieuse, et qu'il suffisait de faire preuve de patiente et de réflexion pour la découvrir. 

Il se prépara alors à partir pour sa journée de travail, car aujourd'hui, Abhel reprenait son travail de professeur. Enders lui avait ordonné d'arrêter les interrogatoires de Flix, qu'il jugeait comme devenus inutiles. Le loxodon n'était pas de cet avis, mais il se devait d'obéir aux ordres de son supérieur. 

- On se retrouve ce soir Flix, lança-t-il à celui qu'il considérait à présent comme son ami. Je t'ai laissé ton petit déjeuner sur la table !

- Merci ! A ce soir ! répondit-il timidement et encore un peu endormi.

Abhel sortit de l'appartement, et se dirigea dans la zone dites industrielles de Noblemur, à l'est. Ses cours avaient lieu dans un vieux hangar plutôt lugubre, éclairé par seulement quelques ampoules, qui ne fonctionnaient pas toujours très bien. Malheureusement, les moyens de la communauté ne permettaient pas l'amélioration de ces conditions. De plus, cet entrepôt était souvent abimé, car c'était ici qu'étaient formés le peu de soldats de la ville, et il devait être caché, car les hommes-rats n'avaient pas autorisé cela. 

***

Il arriva au hangar un petit quart d'heure avant huit heures, c'est-à-dire un peu avant de recevoir ses élèves, et installa le matériel dont il aurait besoin pour sa première leçon. Il sortit d'une grande armoire en fer rouillé des pistolets tirant des plombs, et autant de cibles. Il les installa un à un, bien en face. 

Huit heures sonna, et Abhel fit entrer ses élèves. Il leur expliqua rapidement ce qu'il attendait d'eux lors de la première leçon du jour. Les consignes étaient plutôt simples : ses disciples devaient s'entrainer à bien tenir leur arme, puis viser le centre de la cible. Ensuite, le loxodon fit faire des exercices physiques à ses élèves. 

Environ trois heures plus tard, une sonnerie retentit. Mais ce n'était pas la fin des cours. 

La voix d'Enders se fit entendre dans le haut-parleur le plus proche : 

- Tous les habitants de Noblemur doivent se rendre immédiatement sur la grand-place ! Je répète : tous les habitants de Noblemur doivent se rendre immédiatement sur la grand-place !

- Cela fait déjà un mois ? demanda un élève, inquiet. 

- Malheureusement... se lamenta un autre. 

Abhel les libéra donc, avant de se diriger vers le centre de la ville, où s'était déjà amassé la plupart des habitants. Il alla rejoindre Enders, car il faisait parti des trois porte-parole de Noblemur. Seuls Enders, un autre loxodon et lui-même avaient le droit d'adresser la parole aux hommes-rats. 

Pour lui, rien n'était plus horrible dans son quotidien que la venue de ses ennemis. Voir des gens se faire emporter sous les pleurs de leurs familles, sachant très bien qu'ils ne les reverront jamais, était l'un des plus grands supplices que l'on pouvait lui faire subir. Cela ne lui rappelait que des mauvais souvenirs.

L'homme-rat qui paraissait être le plus âgé, mais également le plus gradé, prit la parole :

- Chers habitants de Noblemur ! Comme vous le savez très bien, nous avons besoin chaque mois de cobayes pour faire progresser la science. C'est pour cela qu...

Un homme s'élança vers lui, un couteau à la main.

- Allez crever en enfer bande de dégénérés ! hurla-t-il.

Il n'eut pas le temps de faire plus de deux mètres en dehors de la foule, qu'une balle se logea entre ses deux yeux. Personne ne dit un mot, car tous savaient ce qu'il en coûtait de provoquer les hommes-rats, et ils n'avaient pas envie de déclarer d'autres pertes. 

Après un blanc de quelques secondes, l'hybride reprit comme s'il ne s'était rien passé :

- Je disais donc qu'aujourd'hui, nous allons prendre sept d'entre vous.

Certaines personnes dans la foule laissèrent s'échapper un petit cri d'exclamation. C'était en effet la première fois qu'ils en prenaient autant.

- Je suis extrêmement désolé pour vous mais nous avons vraiment, vraiment besoin de sujets.

Son ton montrait bien qu'il n'était absolument pas sincère. 

Il montra ensuite du doigt sept personnes, que les gardes firent venir près de lui. Ils se débattaient tant bien que mal mais cela ne servait à rien. Toutes les personnes présentes, elles, essayaient de ne pas montrer leur tristesse, pour ne pas empirer les choses.

- Il faut voir le bon côté des choses. Au lieu de mourir inutilement dans une tentative d'assassinat désespérée, vous allez mourir pour la science. 

Son visage se fendit d'un grand sourire machiavélique, qui ne dura que quelques secondes. Il reprit ensuite un air parfaitement sérieux, avant de rajouter :

- Et j'allais oublier ! Vous n'auriez pas vu un homme-rat désarmé à la fourrure blanche ? Nous avons vraiment besoin de lui, c'est très important.

Abhel sentit un frisson parcourir sa colonne vertébrale.

- Pas à ma connaissance, répondit Enders. Mais je vous préviendrai si tel était le cas.

- D'accord ! Dans ce cas celui-là fera l'affaire, dit-il à un de ses gardes sans prisonnier en montrant un enfant d'une dizaine d'années. Vas me le chercher.

Le militaire s'exécuta. Aucun habitant n'avait le courage d'adresser la parole aux hommes-rats, de peur de se faire fusiller, ou même de rompre la confiance d'Enders devant eux. Ils durent donc laisser le garde emmener le jeune enfant. 

- Maman ! Maman ! Aide-moi ! cria-t-il.

- Et faites le taire s'il vous plait, ordonna le chef.

Son subordonné lui plaqua sa main pleine de fourrure sur la bouche.

- Au revoir, chers habitants !

Les hommes-rats se retournèrent alors et sortirent de la ville, leurs huit prisonniers bien attachés avec eux. 


Les survivants de Rasmus, TOME 1Where stories live. Discover now