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2012, désert d'Azmar, point de vue de Malik, 17 ans.

Une semaine après, une délégation étrangère est annoncée pour rendre visite à Jaffar, afin d'évoquer avec lui l'avenir du pays.

La veille au soir, je suis allée dans la tente de Safia qui s'est blottie contre mon flanc.
"- tu veux que je te raconte une histoire kinziun?"
Elle ne répond pas mais m'observe avec intérêt.
"- il était une fois, une princesse, vaillante et courageuse qui était enfermée dans un donjon très dangereux... Une nuit, on amena dans le donjon, un guerrier maudit..."
"- tu vas partir Malik"
"- quoi?"
"- ton histoire... C'est la nôtre..."
"- tu es beaucoup trop maline..."
Elle m'adresse un pauvre sourire.
"- tout le monde m'abandonne..."
Je ne peux rien dire et la serre contre moi.
"- cette fois-ci, pas de promesse. Je ne sais pas ce que je vais devenir. Dans le meilleur des cas. J'arracherai le pays aux mains de Jaffar, sinon..."
"- Jaffar! C'est le nom du monsieur qui m'a fait enlever!!"
Encore une raison de haïr ce fou et de l'éliminer.
"- si un jour il tombe entre mes mains, mon trésor, je lui ferai regretter chaque seconde de sa vie." C'est d'une violence folle, cela obscurcit  ma voix et ça devrait effrayer la petite mais Safia se calle contre mon flanc.
"- fais ce que tu as à faire, Rafiq... mais si tu peux... Reviens me chercher"
Un dernier baiser sur son front et je tourne les talons, soulagé d'avoir son aval, mais une responsabilité en plus sur mes épaules.

Les communications étant brouillées, c'est par le bouche à oreille que mon message doit passer. D'une tribue à l'autre, d'un pays à l'autre. Les tribues des frontières de chargent de prévenir mes cousins de l'Etat voisin qui m'apporteront sans nul doute leur aide et deux pays, alliés de mon père, que je vois mal basculer dans le camps de Jaffar.
Les nomades et moi faisons mouvement vers le palais. Officiellement, les nomades viennent prêter serment au nouveau roi, autoproclamé. Enrubanné dans nos keffieh, parés de tenues traditionnelles noires, les cimeterres brillants pendant à nos flancs, nous faisons une ligne parfaite sur la crête de la dune, avisant le palais, semblable à un mirage à quelques encablures de nous. Un diamant brillant dans le désert.

"- mes hommes sont les tiens, cheikh Malik. Et si ton trône a pour prix nos vies, nous te les donnerons." Déclare le chef de la tribue, me passant officiellement le commandement.
"- je me souviendrai de votre courage et de votre fidélité, messieurs"
Youssef est a mes côtes également. Je pose la main sur son épaule.
"- merci mon frère."
Il me salue d'un geste de la tête et je sais qu'il n'est pas utile d'en dire plus.

Je tourne mon attention vers le palais et on devine une colonne de véhicules officiels qui arrivent depuis la ville en arrière-plan. Un bref coup contre le flanc de l'animal, nos chevaux se mettent en marche et nous descendons rapidement la colline. Nous rejoignons les grilles du palais en même temps que les derniers véhicules étrangers.
Les gardes sont débordés avec l'afflux de visiteurs et n'arrivent pas à contrôler tout le monde. Youssef me glisse que beaucoup ont désertés lors du coup d'État et que Jaffar peine à recruter davantage, tandis que sa position à la tête d'Azmar est encore instable.

La tension monte et je sens l'adrénaline courir dans mes veines. Les contrôles se poursuivent devant le palais, tandis qu'on entend une femme encore invisible pester de l'intérieur.
Un garde nous arrête et contrôle les identités, mais une femme apparaît et hurle parce que la cérémonie qui devait commencer vingt minutes plus tôt ne peut débuter sans la présence de l'intégralité des invités... Le garde contrôle Khaled devant moi et au moment où il passe à ma hauteur, la femme se remet à hurler et il me laisse passer dans un geste d' agacement. Aicha.

Quand je passe à sa hauteur, elle m'adresse un clin d'oeil tout en continuant à invectiver les gardes qu'elle traite de tous les noms.

Série: L'otage. Tome 2. la sauveuse du CheikhOù les histoires vivent. Découvrez maintenant