GENESIS : L'Europe

Les démons nous poursuivent jusqu'en enfer.

Sous l'éclairage blanc et aveuglant des LED accrochées au plafond, le corps d'Ezéchiel retombe lourdement au sol. Ma poitrine se soulève à un rythme effréné, mon cœur bat dans mes oreilles et la colère s'est muée en haine, elle coule dans mes veines. Un grognement presque animal sort de ma poitrine alors que mon regard reste fixé sur mon second, toujours au sol, haletant comme un bœuf et dont le torse nu commence à se colorer de bleu sous mes coups.

Nous sommes rentrés de la soirée écourtée par la fusillade, quelques heures plus tôt, sans un mot, nous n'en avons pas besoin. Descendu dans les sous-sol de la maison provençale, dans la salle d'entraînement, mon corps réclame sa délivrance de la tempête émotionnelle qui malmène mon esprit, les souvenirs se bousculent encore devant mes yeux.

Cependant cette soirée m'a appris deux choses importantes, nous avons échoué lors de l'extermination de la secte des "Enfants d'Azraël" et le descendant de l'ancien régent de la secte est l'un des chefs de l'ordre du "Nouveau Monde".

Ezéchiel m'a rejoint après avoir soigné Médusa et Fanatique qui ne semble pas avoir des blessures graves. Ces derniers n'ont pas dit un mot sur ce qu'ils ont entendu lors de notre échange avec l'un des rescapés de notre passé mais je sais qu'ils ne sont pas dupes, ils se doutent de quelque chose.

- C'est impossible qu'il s'en soit sorti, m'avait dit ce dernier alors qu'il me rejoignait sur le ring. Il...

Le premier coup est parti dans sa mâchoire avant qu'il ne puisse finir sa seconde phrase, les prémices de longues séries d'échanges. Les coups et la violence sont notre moyen de communication quand nous n'avons pas les mots pour un échange verbale, nos poings et nos pieds parlent pour nous et souvent mieux que nous dans ce genre de situation.

Les coups ont plu pendant un temps que je ne sais quantifier mais nos corps sont tuméfiés et douloureux pourtant je sens que notre haine et notre rancœur n'ont pas diminué d'un iota. Les questions s'immiscent dans mon esprit, prenant progressivement le pas sur mes souvenirs et rebondissant sur les parois psychiques de mon esprit.

Comment cela est-il possible ? Pourquoi réapparaître maintenant ? Après tout ce temps...

La frustration de ne pas pouvoir répondre à ces putains de questions se mélange brusquement avec la rancœur et la haine. Hormis Ezéchiel et moi, les seuls à avoir réchappé à cette boucherie nocturne ne sont que de simples enfants ou femmes de la communauté dont le rôle était trop peu important au sein de celle-ci.

Qui plus est, nous avons continué de surveiller leurs vies, à chacun d'entre eux pour vérifier qu'aucun d'eux ne parlent de nous à qui que ce soit, Ezéchiel et moi sommes censés avoir périt cette nuit avec la grande majorité de la communauté sectaire. Beaucoup des survivants sont en thérapie, surtout les enfants, mais d'aucun a prononcé notre nom ou bien, a été en lien avec l'ordre.

Mon second se jette sur moi m'assenant une droite qui manque de me faire perdre mon équilibre m'obligeant à reculer. A travers elle, je peux sentir toute sa haine envers la secte mais aussi envers lui-même et notre échec cuisant.

Mes appuis retrouvés, ma riposte en percute de plein fouet son estomac en libérant toute la frustration dont mon corps et mon esprit sont animés face aux questions tourmentant mon cerveau en manque de sommeil.

- C'est impossible qu'il s'en soit sorti, répète rageusement Ezéchiel aussi essoufflé que moi.

- Il me semblait bien vivant pour un mort, Ezio, rétorquais-je sur ton sarcastique et mauvais en m'appuyant sur les cordes du ring avant de lui hurler rageusement : Il l'est, Ezéchiel !

Un grognement rageux me parvient de la part de l'homme se tenant face à moi, un grondement que je sais venir du plus profond de ses entrailles. Ses mains fourragères brutalement dans sa tignasse, un geste qu'il a toujours eu quand le contrôle de la situation lui échappe.