1. La Prophétesse Blanche

Chapitre 5 : Le Protecteur

Nous arrivâmes dans la première grotte en courant. Les Tehani s'étaient massés au fond, dans un climat de terreur. Face à eux, une vingtaine de Rebelles avaient tiré leur épée, avec à leur tête le détestable Hunold.

Acheq s'arrêta à la sortie du tunnel, donnant entre les deux forces.

— De quel droit venez-vous sur nos terres !? rugit-il en s'avançant vers Hunold.

Je fronçai les sourcils. La tension était telle qu'ils étaient sur le point d'en venir aux mains. Chez les réfugiés, les hommes les plus musclés s'étaient placés devant les femmes et les enfants. Tout en guettant une chose invisible à mes yeux.

— Du droit que vous, sales petits rats, avez osé kidnapper la Prophétesse Blanche !

Les guerriers hochèrent la tête avec une rumeur de haine. Les Tehanis dardèrent aussitôt des regards soupçonneux sur moi.

— Hé ho ! m'exclamai-je en rejoignant Acheq. J'ai l'air d'avoir été enlevée ? Non. Alors, rangez vos armes !

— Laisse tomber, Flora, nous avons notre propre Protecteur, murmura Acheq.

— Ha toi, tais-toi ! Si tu ne m'avais pas piqué mon collier, nous n'en serions pas là !

— Il vous a volé !? tonna Hunold, une lueur cruelle dans le regard. Tuez-les, mes frères !

Les guerriers Rebelles firent un pas en avant. J'en fis de même avec Hunold, le toisant avec colère.

— Ordonne encore une fois de faire du mal aux Tehanis et je te le ferai amèrement regretter, cloporte.

— Ces êtres sont la chienlit du royaume. Bouge-toi, la diseuse de bonne aventure, où tu risques de te blesser.

— Flora, ne te mêle pas de ça, lança Acheq. Nous avons l'habitude de...

— Toi, la ferme ! Quant à toi, Hunold, tu te rends compte de ce que tu dis ?

Un mauvais sourire trancha sa barbe de trois jours miteuse, sa peau crasseuse rehaussant son air de sauvagerie malsaine.

— Un accident est facile à orchestrer, ma belle.

J'étais sur le point de rétorquer lorsqu'il pointa son épée sur moi... Et qu'il se retrouva soudain trois pieds aux dessus du sol, tenu à la gorge par un homme gigantesque.

Faisant un bond en arrière, choquée par le brusque retournement de situation, je déglutis nerveusement. Le nouveau venu était enveloppé dans une longue cape couleur sable, semblable à celle d'Acheq. Son visage était lui aussi dissimulé, derrière un turban et un foulard laissant uniquement ses yeux apparents. Il tenait Hunold au bout de son bras tendu, recouvert d'un gantelet de cuir articulé.

Malgré le poids conséquent du Rebelle, il ne paraissait pas fournir le moindre effort.

— Protecteur ! s'exclamèrent les Tehanis avec soulagement.

Protecteur ?

Un instant, je restai interdite devant ce colosse. Les Rebelles, eux, reculèrent prudemment. Qui que soit cet homme, il avait l'air d'avoir une solide réputation parmi tout ce beau monde.

— Lâchez-le, soupirai-je. Il ne mérite pas de se salir les mains.

Le Protecteur tourna la tête vers moi. Je fus saisie par la couleur de ses yeux. Ils étaient d'un bleu saisissant sur sa peau brune.

Il hocha la tête, puis reposa un Hunold suffocant. Le regard haineux du marin passa de moi au colosse de Tehani.

— Je vous tuerai... Je vais te tuer, sale diseuse de bonne aventure !