12. Sa tourmente.

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Dans ce long couloir aux murs rouges, les allers et venues sont étrangement silencieux. Tous passent devant cette porte fermée à double tours depuis la fin de la course. Elle laisse filtrer des cris de rage qui font grimacer les employés de la Scuderia pressant le pas.

Charles est acculé. Il a refusé qu'Andrea lui tienne compagnie, préférant s'isoler. Il est épuisé. Il est lassé de, à nouveau, avoir échoué.

Cette quatrième place aurait pu être salvatrice. Mais elle ne laisse qu'une profonde cicatrice.

Charles est un compétiteur. Il est là pour gagner. Pour s'approcher un peu plus de son rêve de tutoyer les étoiles.

Mais la Ferrari n'est pas assez rapide. Et il commet des erreurs, tout comme son équipe. Le monégasque a bien conscience qu'il pratique le plus collectif des sports individuels. Une écurie qui le porte en triomphe lorsque tout lui réussit. Une écurie qui cherche des excuses quand rien ne va plus.

Alors, dans sa driver room, Charles évacue. Il ne cherche même plus à étouffer sa rage dans son oreiller. Il la laisse sortir. Des cris. Des coups de poing. Des coups de pied. Il a besoin de se décharger. Tout ce poids est bien trop lourd à porter.

Il repense à cette qualification désastreuse en Espagne. À ces points qui se sont envolés.

Il repense à la qualification manquée de la veille à laquelle il doit sa position aux portes du podium.

Il repense au début de saison compliqué.

Il repense à l'année dernière et à son rêve brisé.

Et son cœur est déchiré. Il a l'impression qu'il ne va jamais y arriver.

Il suffoque. Il peine à respirer. Il sent son cœur s'emballer. Chaque battement résonne dans sa poitrine avec une étouffante intensité. L'air lui manque. Il est oppressé. Il tombe au sol, ses sanglots remplaçant ses cris.

Le monde autour de lui semble se refermer. Il n'est plus conscient de son environnement. Son champ de vision se réduit à un tunnel étroit et la sortie semble si loin. Ses mains tremblent, incapables de trouver un point d'appui stable pour se relever. Des gouttes de sueur perlent sur son front alors qu'il se laisse submerger par son anxiété.

Les images douloureuses du passé se mêlent au tumulte de ses pensées. Charles sait exactement quand son corps l'a ainsi trahi pour la dernière fois. Et ça ne fait qu'empirer son état. La perte déchirante de Jules et de son père ressurgissent violemment, ravivant ses blessures encore à vif. Les souvenirs empreints de tristesse et de douleur se mélangent à la réalité, l'entraînant dans un tourbillon dont il ne peut s'échapper.

Il essaye désespérément de reprendre le contrôle, de calmer les battements erratiques de son organe vital. Les paroles réconfortantes de ses proches s'immiscent faiblement dans ses oreilles, tentant de le ramener à la réalité. Mais cette crise de panique est comme une vague déferlante qui submerge de toutes parts, détruisant chacune de ses pensées rationnelles.

Charles est désespéré. Sa détresse vient d'emporter son ancrage. Et il ne sait pas ce qui va pouvoir l'aider à se calmer.

Il ferme les yeux. Il tente d'inspirer. De chercher le calme au milieu de cette tempête qui fait rage dans sa tête.

Et puis, au centre de la houle, sous ses paupières closes, un point lumineux. Il est petit, à peine perceptible mais cela semble être sa seule porte de sortie. Le monégasque se concentre sur sa chaleur. Il est attiré. Il veut avancer. Il veut le toucher.

Et à chaque pas qu'il fait vers lui, le centre brillant semble grossir. Il prend de la place. Il le réchauffe. Il le console. Il lui murmure des choses.

MELODIES OF DESTINY - CHARLES LECLERCWhere stories live. Discover now