MELODIES OF DESTINY - CHARLES LECLERC

7. Prendre le dessus.

Les applaudissements de la foule retentissent dans la salle plongée dans le noir et viennent couper le souffle de la jeune femme qui trépigne d'impatience dans les coulisses. Son moment arrive. L'artiste qui la précède salue son public et Emma n'a plus que quelques minutes avant de se lancer, sans filets.

Même s'il est bien trop tard pour faire demi-tour, son nom est sur toutes les affiches, l'idée de s'enfuir pour ne plus jamais revenir lui traverse l'esprit de manière fugace. Elle effectue de petites rotations avec ses épaules, essaye de détendre chaque membre de son corps et masse inlassablement la boussole gravée sur son poignet droit, un point connu pour ses vertus apaisantes.

Elle comble comme elle le peut, le vide laissé par Matthieu, qui habituellement, s'occupe de frotter le centre nerveux au niveau de son tendon d'Achille. La musicienne a bien conscience que cette préparation est surtout psychologique. En essayant de se convaincre que ce n'est pas bien important de respecter à la lettre chaque point de son rituel, elle décide de se concentrer sur ses exercices de respiration dans les dernières secondes qui lui restent pour parvenir à contenir son stress.

Une main au-dessus de son nombril, elle inspire jusqu'à sentir son ventre se gonfler. L'air doit pouvoir correctement circuler si elle souhaite réussir à tenir chacune de ses notes sans trembler.

Charles la regarde se préparer dans l'obscurité. De minces arcs de lumière lui permettent de deviner ce qu'elle est en train de faire. Il est content qu'elle ait accepté. Son talent mérite d'être dévoilé. Il s'approche et dépose ses doigts sur l'épaule de la brune avec une incroyable délicatesse. Cette dernière sursaute à son contact et il se pince les lèvres, culpabilisant immédiatement d'avoir pu la perturber dans ses habitudes.

Il croise ses yeux verts en amande et il y décèle un cocktail d'émotions. Du stress, bien sûr. Mais aussi de l'excitation. Un soupçon de reconnaissance. Et une envie folle nourrie par sa passion. Il est certain d'avoir le même regard avant de monter dans sa monoplace.

« Tout va comme tu veux ? demande-t-il. »

Elle hoche la tête, à court de mots. Emma est bien trop émue pour prononcer le moindre son. Elle panique en faisant ce constat qui va devenir un réel problème si elle n'arrive pas à se reprendre pour monter sur scène alors que les techniciens s'affairent autour d'elle pour finir de régler le micro et les renvois de son.

Le monégasque voit la tension tendre chacun de ses muscles et s'empare du poignet qu'elle massait quelques minutes plus tôt. Il détaille cette boussole qu'il frôle de la pulpe de ses doigts. Et alors que les muscles de la jeune femme se crispent un instant sous son contact, elle fixe son regard apaisant et se laisse aller.

« Je n'ai aucun doute sur le fait que tu vas être incroyable, souffle-t-il pour l'encourager.

- Merci Charles. »

Il sourit en entendant la délicatesse et la douceur avec laquelle elle prononce son prénom.

« Je serai le fan au premier rang, dit-il en montrant l'appareil photo qui pend autour de son cou. »

Emma a toujours eu besoin d'être rassurée avant de monter sur scène. La faute à un cruel manque de confiance en elle, elle a toujours eu quelqu'un pour l'apaiser et pour canaliser son stress. En arrivant seule à Paris, elle a vite pu se reposer sur la solidité de son amitié avec Matthieu, toujours présent pour la masser et pour la faire rire. Il lui a d'ailleurs envoyé un nombre incalculable de messages vocaux où il raconte des blagues toutes plus nulles les unes que les autres.

Aujourd'hui, elle a Charles et sa bienveillance. Charles et son sourire qui laisse entrevoir des fossettes naissantes à la commissure de ses lèvres. Charles qui lui adresse un clin d'œil et qui presse un peu plus sa peau alors que l'animateur vient de l'introduire, sans mention aucune de la raison pour laquelle est sortie de l'anonymat. Charles et sa prévenance.