Chapitre 2

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 — S'il te plaît Mel, épargne le. Si tu ne le fais pas pour lui, fais-le pour toi.

— Pour moi ? Après tout ce qu'il m'a pris, en finir avec lui serait le minimum ! Hurla-t-elle en gardant son épée au-dessus de la gorge de Shed.

— Il a fait une erreur en te libérant, mais il ne pensait qu'à ton bien. Si c'est vraiment ce que tu souhaites, tu peux très bien recréer ta prison de cristal.

— Tu ne comprends pas... Vous ne comprenez pas... Vous ne pouvez pas comprendre !

À présent que sa mère l'avait rejoint, Mélandrie était passée de la colère à la tristesse. Sa prise sur son père n'était plus aussi assurée et sa main qui tenait la lame qui devait en finir avec lui tremblait. Avec sa fille dans cet état, Shed pouvait très bien se dégager et retourner la situation. Il resta cependant immobile, la regardant avec une compassion qu'il n'était pas habituel de voir sur son visage.

— Vu la fureur avec laquelle tu m'as attaqué, je comprends au moins que j'aurai dû te laisser dans ce cristal, admit-il. Si nous ne pouvons pas comprendre, explique-nous. Je ne bougerai pas, tu pourras faire de moi ce que tu veux, mais je veux savoir ce qui t'est arrivé.

— J'étais heureuse, voilà ce qui est arrivé, hoqueta-t-elle tandis que sa vision se brouillait à cause des larmes. Vous n'allez pas me croire, mais je n'ai pas passé trois jours dans ce cristal. J'y suis restée quarante ans ! J'ai pu redonner de l'éclat à ces terres désolées, faire arrêter le rituel de ces peuples qui étaient contraints de se débarrasser des moins forts à cause du peu d'âmes qui se trouvait dans le cycle. J'ai pu contribuer à la paix entre mes terres et celles du panthéon, j'ai pu élever des enfants en adoptant deux orphelins. Ma vie était parfaite jusqu'à ce que tu me libères. Tu avais décidé de respecter mon choix et, je ne sais pourquoi, cet événement a changé et me voilà repartie quarante ans en arrière. Voilà ce que tu m'as pris. Ma vie !

En pleurs, Mélandrie vit ses ailes reprendre leur couleur dorée avant de disparaître ainsi que ses lames se dissiper dans ses mains. Ayant perdu toute envie de combattre, elle se tourna pour faire face à Lief qui la prit dans ses bras et la laissa pleurer sur son épaule.

— Je ne peux pas y retourner, je n'ai pas la force de tout recommencer depuis le début. Je n'ai pas le courage de refaire tout le chemin en sachant ce qui va arriver. S'il te plaît, dis-moi que tu peux me renvoyer dans mon présent et effacer tout ce qui vient de se passer.

— Je n'ai malheureusement pas ce pouvoir, se désola sa mère.

Totalement dévastée, Mélandrie ne put dire un mot de plus et continua à pleurer dans les bras de Lief. Tout en passant sa main dans son dos pour la réconforter, l'ange rouge l'emmena avec elle et la déplaça de quelques mètres pour permettre à Shed de se relever.

Le dieu de la mort devait se dire qu'il n'avait aucun droit de consoler sa fille après ce qu'il lui avait fait. Il préféra donc les laisser seules et s'approcha de Malacine. Tous deux étaient à seulement quelques mètres, du moins assez près pour que Mélandrie puisse les entendre.

— Que lui est-il arrivé ?

— Tu fais vraiment un très mauvais père, répondit le dieu noir. Elle vient de te le dire !

— Pas ça abruti ! Je parle de son état ! C'est quoi cette forme qu'elle avait et qui a failli me tuer ?

— Mélandrie est une rareté parmi les raretés. Parmi les anges de miséricorde, il existe une infime partie d'entre eux qui est capable de gagner en puissance et de vaincre n'importe qui. Ce sont les anges du courroux.

— Elle en est donc un ?

— Oui et non. Comme tu as pu le voir, ses ailes ont retrouvé leur éclat, elle est donc redevenue un ange de miséricorde tout ce qu'il y a de plus normal. En réalité, pour beaucoup d'entre ceux capables d'user de ce pouvoir, il s'agit plutôt d'une malédiction qui survient à cause d'une forte accumulation d'émotions négatives.

Mélandrie Tome 4 : Les fils du destinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant