Chapitre 13

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 Après plusieurs heures d'attente passées dans une pièce de la maison du transport, Handel vint chercher le groupe en annonçant qu'ils avaient fini de charger l'aéronef et qu'ils pouvaient à présent embarquer. Si Mélandrie avait trouvé le temps d'attente long, l'ancien dieu noir du commerce la fit relativiser en affirmant qu'ils avaient, au contraire, de la chance. Mis à part celui qu'ils allaient prendre, aucun autre de ses vaisseaux ne devait se rendre à Asphora avant plusieurs jours.

Même si elle n'avait pas à gérer cette situation, l'ange de miséricorde ne put s'empêcher de réfléchir à ce qu'elle aurait fait. Aurait-elle réfléchi à un autre moyen de rejoindre rapidement Asphora ou bien aurait-elle abusé de son statut d'ange de miséricorde pour réquisitionner un vaisseau ? Le second cas aurait sans aucun doute attiré l'attention sur elle, elle était donc soulagée de ne pas avoir eu à faire ce choix.

Comme l'avait demandé le gérant de la plateforme, Mélandrie avait sorti ses ailes pour faire comprendre à quiconque irait rapporter la transgression du règlement qu'il n'avait pas le choix de les accepter à bord. Ainsi, si le groupe attirait l'attention, ça n'était plus en raison de la présence d'Illiandra parmi eux, mais bien parce qu'un prétendu serviteur du père des dieux était à leur côté.

Le fait que la moitié des personnes qu'elle croisait se prosternait devant elle lui montra immédiatement à quel point le statut des anges de miséricorde était au-dessus des autres et lui rappela aussi son passé. Voir tous ceux qu'elle rencontrait s'agenouiller, voir même aller jusqu'à poser leur tête contre le sol avait été son quotidien pendant au moins une décennie lorsqu'elle avait enfin réussi à se créer un avatar. Elle avait réussi, aux termes de longs efforts, à limiter ces pratiques aux cérémonies, remplaçant cette posture, dans la vie de tous les jours, par une simple révérence qui pourrait être faite devant n'importe quel seigneur pour ceux qui voulaient continuer à lui montrer du respect.

— Vous voyez que j'avais raison de vous vénérer ! S'exclama soudainement Kahina qui n'avait presque pas décroché un mot depuis leur arrivée à la plateforme de décollage.

— Ils ne me vénèrent pas, ce doit juste être la règle ici, sourit Mélandrie en voyant le sursaut de confiance en elle qu'avait eu sa protégée. Je suis loin d'être la divinité de ce monde. Ceux qui ont les mêmes ailes que moi sont un peu comme les prêtres ou les chamans de chez toi. Dans ma ligne temporelle, les habitants de nos terres te faisaient exactement la même chose lorsqu'ils te voyaient.

— Mais je ne suis qu'une simple prêtresse, même une apprentie !

— Une apprentie qui était la seule à pouvoir communiquer clairement avec sa divinité, compléta l'ancienne conscience de la terre-mère. Tu es rapidement passée d'apprentie prêtresse à grande prêtresse qui parle en mon nom.

— Savoir que ces personnes agissent ainsi pour vous ne me dérange pas, au contraire, mais je me sens mal à l'aise rien que de penser que cette attention puisse être pour moi.

— Je ressens la même chose. Je n'ai pas été élevée en étant ainsi révérée, cela ne me paraît pas naturel. S'ils avaient été mes sujets, je serais allée les relever un par un pour leur dire d'arrêter, mais mieux vaut faire profil bas et me comporter comme n'importe quel ange de miséricorde qui passerait par là.

— Toi ça ne te paraît pas naturel, mais j'en connais certains que ça doit rendre nostalgique. Même s'ils ne sont pas vraiment à leurs pieds, mais à ceux de la personne d'à côté, lança Lief.

— Mauvaise pioche, indiqua Ouros. Je ne demandais que la politesse, mes anges s'inclinaient ou s'agenouillaient parce qu'ils le voulaient, pas parce que je leur ordonnais.

— Moi j'étais comme ta fille, je les relevais, indiqua Illiandra. Même s'ils étaient mes serviteurs, je ne voulais pas avoir ce genre de relation avec eux.

Mélandrie Tome 4 : Les fils du destinWhere stories live. Discover now