LES YAKUZAS [ TOME 1 & 2 ]

CHAPITRE 22 - QUI MENT ?

" La vie est sage de nous tromper, car si elle nous disait ce qu'elle nous réserve dès le début, nous refuserions de naître.

Lucy - Elfen Lied "

Quelques minutes avant l'enlèvement :

NIKITA

Je déteste d'avance cet événement. Mais j'ai adoré avoir déstabilisé le caillou dans la voiture pour nous y rendre.

Son attitude m'a blessée, ses mots m'ont heurtés, et j'ai réalisé que je n'aimais pas la façon dont il me voyait.

" - Pauvre petite fille riche."

J'ai vraiment cru qu'il allait me pousser à commettre l'irréparable, mais comme toujours, Kuro est resté parfaitement impassible, jusqu'à ce qu'il ne le soit plus.

À chaque fois qu'on se retrouve proche l'un de l'autre par la force du destin, il paraît toujours un peu perdu, déstabilisé par ses propres réactions.

Kuro n'aime pas qu'on le touche, et il suffit de regarder sa façon de volontairement ignorer les femmes pour comprendre qu'il a un traumatisme d'ordre intime qui doit en impliquer une.

Je ne suis pas sûre de vouloir savoir.

Je ne veux pas l'humaniser, je préfère qu'il reste celui que je dois haïr pour m'avoir kidnappée, marquée au fer rouge, et mise en danger de nombreuses fois.

Même s'il n'est pas celui qui a brûlé ma peau, il n'a rien fait pour empêcher ça. Et si Nana n'avait pas partagé la douleur avec moi, je crois que je me serais évanouie tant c'était atroce.

Je le déteste, et pourtant mon corps réagit bizarrement quand il se retrouve près du sien.

Je ne suis pas vierge, mais je n'ai pas pour autant une expérience grandiloquente de l'intimité. Je fuis les contacts, mais je provoque le sien régulièrement par pulsion de le déstabiliser, de le comprendre lui et ses expressions indéchiffrables.

Dans la voiture, il ne m'a pas repoussé.

Si on avait continué de rouler quelques minutes, qui sait ce dont l'habitacle aurait été témoin.

Mais il a rougit.

Et ça, c'est une image que j'ai gardé précieusement dans mon esprit. Le grand Kuro Hitake, l'homme dont on dit qu'il ne ressent rien a vu ses pommettes se colorer de petites rougeurs délicates.

Assortie à ses yeux verts si lumineux sur l'instant, je sens ma poitrine se réchauffer d'une étrange émotion qui me laisse un goût de tentation dans l'esprit.

J'efface mes vilaines pensées en montant cet interminable escalier qui sépare le rez-de-chaussée du premier étage, et traverse le couloir avec ma petite troupe pour pénétrer dans les toilettes.

Je repousse Ghost qui cherche à entrer avec moi, même Nana s'y met alors que Savannah se marre discrètement. Je n'ai pas eu beaucoup l'occasion de la voir, et j'ai l'impression d'abandonner mon amie alors que je suis celle qui l'a traîné dans cette vie.

Nos soirées repas devant une vieille série me manquent, nos théories sur qui est Gossip Girl, nos fous rires en faisant des boutiques et essayant des fringues horribles.

Notre vie entière me manque.

Elle n'était pas parfaite, Savannah dans la prostitution et moi qui flirtait avec cette limite. Mais c'était la nôtre, même si je fuyais je n'étais plus dans une prison dorée.

Enfin seule, je verrouille la porte et tente de remettre de l'ordre dans mes pensées en me passant de l'eau fraîche dans le cou.

Mais je n'arrête pas de penser justement.