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Harvey

Lorsque je sortais avec Stéphane, je rêvais constamment de nous deux. Je nous voyais voyager autour du monde, je nous voyais plus grands et parfois au beau milieu de notre enfance. Mes rêves avaient très souvent des fins heureuses, je ne perdais jamais une seule occasion de les lui raconter. Il les critiquait fermement très souvent. Il se moquait de mon subconscient farfelue.

Un jour j'avais fait un drôle de rêve. Je nous ai vu nous baigner à la mère puis j'ai vu des vers de terre sortir de ses yeux, de son oreille et de sa bouche. J'ai fui et je me sentais détruit dans le rêve. Lorsque je lui avais raconté ce rêve il m'avait répondu que je n'avais pas à avoir peur. Il m'avait fait croire que les choses ne pouvaient pas se gâcher aussi rapidement en une seule seconde.

Je l'ai cru. Même en grandissant, j'ai un peu continué à le croire. Je savais que les choses pouvaient changer rapidement mais je me disais qu'il y aurait toujours quelques signes pour annoncer un grand changement. Pourtant je me suis trompé et Stéphane m'a menti.

Il a juste fallut une seule seconde lorsque je me suis frappé la tête pour que ça ait des conséquences si lourdes que mes bras sont désormais trop fins pour les porter. Des conséquences qui me poussent à passer une nuit blanche dans un lit qui n'est pas le mien et à verser des larmes qui ne sont pas miennes.

J'essaye de dormir pour compenser la nuit blanche d'avant hier soir mais Je n'y arrive pas. Ma situation pitoyable finit toujours par me faire penser à nouveau. Je suis collé à l'intérieur de Marche Avec Moi et Joe, enfin José Martinez, est accusé de meurtre.

Il ne l'a pas commis, j'en suis certain. Néanmoins, je n'arrive pas à comprendre comment il est possible qu'on l'ait trouvé avec ce couteau dans ses mains, à côté du corps de cette femme. Tout comme je n'arrive pas à comprendre pourquoi nous sommes ici, dans l'univers de Marche Avec Moi.

J'essaye de comprendre ce qu'il peut bien nous arriver mais je ne comprends rien. A aucun moment, je n'ai capté un gramme de logique dans tout ce qu'il m'arrive depuis avant-hier. Tout ce que je peut faire maintenant, c'est de patienter pour voir où cette mésaventure va m'amener.

Je soupire d'un coup pris de colère puis pars dans la minuscule salle de bain de Henry. La mienne n'est pas plus grande mais je m'y sens cent fois plus à l'aise. C'est sûrement parce que c'est ma vraie salle de bain à moi.

Je souffle un grand coup et fouille les tiroirs du buffet de celui dont j'ai adoré lire l'histoire. Je finis par y trouver un ciseau que je prends avant d'aller me regarder dans le miroir.

Sans plus attendre, je commence à couper la touffe de cheveux bouclés qui se tiennent fièrement sur ma tête. J'utilise une telle rage que le ciseau pourrait se casser. Tout ce dont j'ai envie en ce moment, c'est de retrouver mon corps. Retrouver mes cheveux crépus courts que je déteste quand ils n'ont pas de gel, mes longues jambes qui m'assure mon mètre soixante dix-huit et ma peau noire de toujours.

J'ai marre que mon corps soit un mélange entre mon vrai corps et celui d'Henry Speechy. Je veux être moi même.

Je finis par confectionner ma nouvelle coupe de cheveux le poing libre fermé, extériorisant ma rage. J'ai cru que couper ces cheveux embarrassant aurait pu me calmer mais au final ça a eu l'effet inverse. Je suis à présent énervé contre le monde entier et déteste ces cheveux soyeux mal rasés.

Je jette le ciseau par terre, sachant que ça ne me calmera pas non plus. Mon réel problème est beaucoup plus grand que ça. Je ne peux le contrôler lui et je ne veux pas le jeter. Je veux l'avoir près de moi mais je ne peux pas le contrôler. Mon réel c'est mon petit ami. Mon réel c'est Joe.

Entre Les LignesWhere stories live. Discover now