Oiseau foudroyant - partie 2

53 10 12
                                    


RYRN


L'étiquette me forçait à conserver un sourire chaleureux, sous un regard serein, mais intérieurement, mon cœur s'affolait. Il tambourina comme un ivrogne à la porte d'une auberge dès que je croisai le regard doré de la princesse Gylda.

Comment une femme de plus de trente hivers pouvait-elle paraître si jeune et si petite ?

Et comment ce bout de femme plus frêle que votre cadette peut-elle vous effrayer de la sorte? s'enquit Garm au creux de mon esprit.

Elle ne m'effrayait pas. Mais sa présence... me stressait. Et elle se fit d'autant plus oppressante quand je touchai sa paume. Elle n'avait pas des doigts de princesse, mais de guerrière. Une peau soignée, dont on devinait néanmoins les cals là où un pommeau d'arme venait souvent se loger.

— Vous pensez qu'elle est la dirigeante des assassins que Listair a arrêtés de justesse avec Ader?

— Non ! soufflai-je dans un murmure alors que je repris place aux côtés de ma mère.

— Ce n'est pas le moment pour discuter avec ton barghest, me glissa-t-elle, appuyée d'un coup de coude furtif dans les cotes. Et fais en sorte qu'il ne sorte pas des ombres.

Je roulai des yeux, bien conscient que l'arrivée d'un prédateur titanesque ne serait en rien bénéfique au calme de cette rencontre.

— Ne restez pas dehors et entrez, lâcha Ahédan qui dirigeait nos invités vers la salle commune.

Les Velt s'installèrent sur la table ouest, tandis que les derniers arrivants prirent place à l'est.

Deux contre deux, pensai-je en m'asseyant au centre, au côté de mon père.

Je me retins de grimacer alors que je me retrouvais à la droite de Dastan. À dîner à côté de menteurs, j'aurais préféré Irfan à cet idiot de prince esclavagiste. Je laissai mon regard glisser vers Vardig, le roi lysceur, qui apparaissait avec mal derrière la carrure grassouillette du seigneur rüdien. Heureusement qu'il comptait de hauts bois de cerf pour se faire remarquer.

— Cela doit être très désagréable pour dormir, se moqua Garm.

Je pinçai les lèvres en un sourire aimable pour éviter de pouffer. Afrit, le prince et premier fils de Vardig, se faisait plus discret malgré sa chevelure de feu. Il me paraissait sympathique. Il semblait être un homme droit et respectueux envers sa sœur qui siégeait en bout de leur table. Je sentis mes joues s'enflammer derechef alors qu'elle relevait ses iris brillants vers moi. Consciencieux de garder un brin de consistance malgré mon teint qui rougissait, je la saluai d'un hochement de menton avant de détourner le regard vers les Velt. Face aux nouveaux invités, Laurn et Nessa ne pipaient mots, bien droits dans leur siège.

Et les langues des jeunes gens ne se délièrent guère davantage au fil du dîner. Irfan échangeait avec ferveur avec Rian et mon père, vantant l'un et l'autre, et offrait par petites touches des ouvertures au seigneur Vardig pour asseoir sa venue à des fins de paix et d'entente cordiale. Son jeu de comédien était tellement bon qu'il me donnait la nausée ! Comment un tel menteur parvenait-il à fermer l'œil la nuit ?

Je ruminai ma frustration en silence, tandis que le repas arrivait à son terme. Les assiettes vident, mais les verres pleins, les plus jeunes commencèrent à quitter la table. Ma sœur et Nessa s'éloignèrent vers le fond de la salle, non loin du barde. Quand Laurn les rejoignit, je décidai de me lever aussi. Je contournai les tables et m'élançai à sa suite, mais me trouvai déconcerté quand Afrit et Gylda croisèrent ma route. Je leur souris bêtement, incapable de prononcer un mot dans leur langue. Leur père semblait à l'aise avec notre dialecte, mais qu'en était-il de ses enfants ?

You've reached the end of published parts.

⏰ Last updated: Nov 09, 2023 ⏰

Add this story to your Library to get notified about new parts!

Prince et Dragon - Tome 3 : NyrsslïaWhere stories live. Discover now