7. Quand l'un remonte, l'autre coule...

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           À dix-neuf heures, les familles étaient généralement réunies dans cet immense immeuble. On pouvait apercevoir les lumières à travers les fenêtres et les voitures garées sur le parking privé du bâtiment. Quelques courageux sortaient sur leur balcon pour discuter au téléphone ou fumer une cigarette pendant quelques minutes. On voyait même quelques silhouettes aux fenêtres. Certaines familles riaient, des couples s'enlaçaient, des amis discutaient, des enfants s'amusaient, des bébés pleuraient... Mais ce soir, les bébés ne furent pas les seuls à pleurer.


Jungkook

— Bam, arrête de bouger, râlai-je. Ah, ce chien n'en fait qu'à sa tête...

Le vétérinaire qui s'occupait de mon chien m'avait fortement conseillé de lui brosser les dents de temps à autre. Sauf que ce petit filou ne tenait pas en place. Il gesticulait constamment, m'empêchant de frotter ses canines. Ajouté à cela ma mauvaise humeur et mon inquiétude... Vous l'avez compris, je n'avais pas la pêche ce soir. L'envie de laisser tomber ma tâche de maître me tentait tout particulièrement. En soupirant, j'abandonnai; je relâchai la gueule de mon chien, qui en profita pour se secouer dans tous les sens. Je jetai la brosse à dents dans l'évier et me relevai sur mes jambes.

— Allez, file, t'as de la chance que je ne sois pas d'humeur ce soir.

J'ouvris la porte de la salle de bain et Bam s'enfuit en trottinant puis j'éteignis la lumière avant de me diriger dans ma cuisine pour terminer mon kimchi maison.
  Je ne cessai de me demander pourquoi Jimin n'était pas venu. Nous avions convenu du rendez-vous la veille au soir, il ne pouvait pas avoir oublié. Cet homme renfermait trop de secrets pour que je puisse le comprendre. Il était à la fois transparent et mystérieux. Tout blanc et tout noir. La lumière et l'ombre.
Mon job consistait toutefois à cerner, analyser le comportement de cet homme et ses sentiments. Or, s'il ne coopérait guère, l'aider deviendrait compliqué. Je pensais que nous avions avancé, progressé, le jour où nous avons dégusté un chocolat chaud ensemble... Si cela n'avait pas été le cas, je l'aurais senti. Cependant, il se pouvait que j'eusse manqué un détail lors de notre discussion. Mais quoi ? Malheureusement, je l'ignorais.
En effet, il s'était montré réticent lorsque je l'ai approché devant son immeuble, également quand il devait me parler de ses problèmes mais il ne s'est point confié à contre-cœur, ça je l'ai bien remarqué. Lorsque je l'ai ramené chez lui, Jimin dégageait moins de tristesse, moins de désespoir.
Nous revoir aujourd'hui ne lui avait pas posé problème, d'après moi. Il aurait refusé, s'il ne souhaitait pas me voir. Car, tout le long de notre « rendez-vous », si je pouvais qualifier ceci de rendez-vous, j'ai bien compris qu'il se posait énormément de questions sur sa relation toxique. Au-dessus de sa tête planaient milles et une questions, interrogations; « Et si... », « Est-ce vraiment... », « Pourquoi... ». S'il était venu tout-à-l'heure, j'aurais pu taire certains de ses doutes. Après tout, c'était mon travail donc il ne pouvait douter de mes compétences... Ce qui était sûr, c'était qu'il n'aurait rien perdu à se livrer à moi. J'aidais les autres à remonter la pente, à trouver la lumière, à quitter l'obscurité. Et non l'inverse.
  Mon petit doigt me souffla que je n'aurais pas de réponses à mes questions avant un long moment. Je n'avais reçu aucun message, aucun appel téléphonique de sa part. J'ai même été jusqu'à vérifier ma boîte mail, au cas où; Rien. Je ne pouvais rien envisager, rien faire. Je doutais qu'il ne réponde si je venais à l'appeler ou lui envoyer un message. Je ne pouvais pas débarquer chez lui à l'improviste, ce serait atteindre à sa vie privée. Et je ne pouvais guère soupçonner que son copain fusse derrière tout ça car ils ne se voyaient plus depuis quelques jours. Il ne pouvait pas l'avoir empêché de venir, à moins que Jimin l'eusse prévenu qu'il avait rendez-vous dans mon cabinet mais j'en doutais fort bien. Son petit ami aurait trouvé un moyen de ne pas le faire venir, de le dissuader, de lui interdire de venir, si Jimin l'avait mis au courant.
  En finissant mon repas, je décidai alors de faire mes petites recherches sur ce couple car je me posais trop de questions. Je savais que je n'avais pas fini d'en apprendre, je ne naviguais qu'à la surface de l'iceberg. Comme avec internet et son dark web, je faisais partie de ceux qui ne pouvaient accéder qu'à la partie visible de ce couple.
  Je pris mon ordinateur portable tout en m'installant confortablement dans mon canapé. Bam s'assit à mes pieds et posa sa tête sur ma cuisse. Je caressai gentiment son crâne en lui souriant.

The Happiest Man - JikookWhere stories live. Discover now