Chapitre 2 Cyndi

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Minuit.

Ma location est une petite maison en briquettes rouges, elle possède un garage semi enterré sur l'avant, à gauche. Il faut ensuite monter cinq marches pour arriver à la porte d'entrée basée en milieu de façade. Je possède cinq pièces, dont deux chambres, une salle d'eau et un toilette. Lorsque l'on pénètre chez moi, on arrive en premier dans une grande pièce recevant le salon. Le canapé fait face à la fenêtre donnant sur la rue, deux fauteuils lui font face, séparés par une table basse, ma télévision est dans le coin droit. Derrière mon canapé, en bout de pièce, il y a ma cuisine ouverte avec son ilot central. Ma chambre, elle, se situe dans la pièce derrière la porte d'entrée, elle donne également côté rue. J'ai un aperçu direct sur la maison de mon voisin, qui soit dit en passant, n'est pas dégueulasse à regarder. Malheureusement, il est accompagné dans la vie. Je ne l'espionne pas spécialement mais quand vous n'avez pas envie de dormir, que faire ? Je suis en bout de rue, à l'angle de la Rising Sun Avenue et de Krewstown Road, juste à côté de la forêt de Krewstone. Je peux regarder passer les voitures me diriez-vous, mais comme cette route finit ensuite par des chemins de terre, menant au bois, il n'y a pas grande distraction. Par contre, si vous voulez ramasser des champignons, vous avez de quoi faire, au vu de la superficie de ce dernier. Bref, ma deuxième chambre, quant à elle, se situe au bout du couloir à droite, au fond de la maison, elle me sert de dressing bien qu'elle possède aussi un lit d'une personne, avec une petite table de nuit recevant une lampe de chevet. La fenêtre donne sur le côté de la maison, j'ai positionné le lit en dessous. En face de la porte de la chambre, deux autres portes. Une pour la salle d'eau possédant une douche à l'italienne ainsi qu'un lavabo double vasque, l'autre pour les toilettes. La dernière porte, au bout, face à celle de l'entrée, descend au garage.

Ma principale occupation est donc de regarder par la fenêtre de ma chambre. Mon voisin est un homme d'une trentaine d'années, à peu près, il est tatoué au niveau des bras ainsi que dans le cou. Un motard, au vu de son Cut et de sa Harley qu'il astique tous les jours, qu'il sorte ou pas avec. Il vit seul mais à la nuit tombée, vers vingt-trois heures, vingt-trois heures trente, une Harley, le même modèle que je possédais à l'époque, pénètre dans son allée. Une jeune femme brune, aux cheveux longs le rejoint, puis elle disparait de nouveau vers cinq heures du matin. Comment je le sais ? Facile, mes nuits sont courtes, le sommeil ne m'emporte qu'au petit matin.

Ce soir ne fait pas exception, il est déjà minuit, la Juliette a rejoint son Roméo depuis une heure environ, j'ai entendu sa moto arriver. J'allume ma petite lampe de chevet, me saisis de ma guitare et commence à gratter les cordes, chantant Whitout you (Sans toi). Je devrais changer de registre mais lorsqu'on a mal, qu'on a le moral en berne, l'être humain se complait dans sa peine. On n'essaie pas d'écouter des chansons gaies, non, on recherche tout ce qui est triste. Je suis dans une phase de deuil mais la mienne est interminable. Le deuil est un processus normal après la perte d'un être cher. Il correspond à la période nécessaire pour soigner sa blessure. Durant cette phase douloureuse, qui peut être plus ou moins longue selon les individus, il est indispensable d'être à l'écoute de ses émotions et de ne pas les refouler. Il ne faut pas brûler les étapes. Lorsque l'on parle de "faire son deuil", l'idée n'est pas d'oublier le proche perdu, mais d'apprendre à vivre avec ce chagrin. Dans mon cas, je pleure sur les enfants trop tôt disparus, mes meilleurs amis et mon ex qui, quelque part est mort avec tout ça. Il y a sept étapes dans le deuil, le choc, le déni, la colère, la dépression et la tristesse, la résignation, l'acceptation et enfin la reconstruction. Je pense que je suis toujours dans celle de la tristesse. Je n'arrive toujours pas à me résigner et à accepter que des êtres humains peuvent être autant inhumains.

J'en suis là dans mes pensées quand des bruits de moteurs me font relever la tête et m'approcher discrètement de ma fenêtre, me cachant sur le côté, observer sans être vu. Je vois trois Harley débarquer ainsi qu'un land Rover aux vitres teintées, puis tout va très vite. Des hommes descendent du véhicule, ils me tournent le dos, en enfilant des cagoules et des gants. Un seul se retourne vers la rue en mettant ses gants, épiant si le voisinage est aux fenêtres, j'ai donc le temps de voir sa main droite avant qu'elle ne disparaisse à l'intérieur de l'étoffe. . Ils se dirigent tous les six, vers la porte de mon voisin qu'ils explosent à grands coups de godasses. Il s'en suit des cris de terreur puis je vois la jeune femme sortir, les mains sur sa tête, agrippant celle de l'homme qui la traine par les cheveux. Elle essaie de donner des coups de pied mais rien n'y fait, elle est jetée dans la voiture. Un homme regarde dans ma direction, je saute sur ma lampe de chevet pour en couper la lumière. Puis, me penche discrètement, l'homme regarde toujours dans ma direction puis s'engouffre dans le véhicule. Je ne réfléchis pas, lorsque les motos et la voiture démarrent sur les chapeaux de roue, partant vers la forêt située juste derrière la zone pavillonnaire, je saute dans mes tennis, chope mon blouson au passage puis traverse la rue, pénétrant comme une folle dans la maison de mon voisin.

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