Chapitre 1 Cyndi

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Philadelphie, décembre deux mille vingt et un.


No I can't forget this evening / Non je ne peux pas oublier cette soirée

Nor your face as you were leaving / Ni ton visage quand tu m'as quitté

But I guess that's just the way / Mais je suppose que c'est juste la manière dont

The story goes / L'histoire continue

You always smile but in your eyes / Tu souris toujours mais dans tes yeux

Your sorrow shows / Ta peine se voit

Yes it shows / Oui elle se voit

No I can't forget tomorrow / Non je ne peux pas oublier demain

When I think of all my sorrow / Quand je pense à tout mon chagrin

When I had you there / Quand je t'avais près de moi

But then I let you go / Mais ensuite je t'ai laissé partir

And now it's only fair / Et maintenant c'est normal

That I should let you know / Que je doive te faire savoir

What you should know / Ce que tu dois savoir

I can't live / Je ne peux pas vivre

If living is without you / Si vivre c'est sans toi

I can't live / Je ne peux pas vivre

I can't give anymore / Je ne peux plus rien donner

I can't live / Je ne peux pas vivre

If living is without you / Si vivre c'est sans toi

I can't give / Je ne peux pas donner

I can't give anymore / Je ne peux plus donner... »

Je suis assise en tailleur sur mon lit, grattant ma guitare, les larmes coulent le long de mes joues pendant que je chante ma souffrance. N'y a-t-il pas plus belle chanson que celle de Mariah Carey pour exprimer ma douleur ? Cela fait deux ans maintenant, deux ans tu es sorti de ma vie. Tu en avais marre de mes peurs, marre que je n'arrive pas à passer au-dessus de ce drame, marre de moi, tout simplement. Mais ce drame a couté la vie à dix-neuf enfants et deux adultes*, dont celle de ma meilleure amie. Elle apprenait aux enfants à lire, moi je les faisais chanter. J'ai mis trois mille kilomètres entre ma vie d'avant et celle d'aujourd'hui.

J'habite dorénavant à Philadelphie, dans une zone pavillonnaire, entourée de gens, cela me rassure. Pourquoi la ville de Philadelphie, me diriez-vous ? En premier lieu, parce que c'est très loin du Texas, j'avais besoin de laisser derrière moi, tout ce passé rempli de malheur, et plus simplement, parce qu'elle possède une vie culturelle variée et dynamique. Dès le dix-huitième siècle, Philadelphie s'est affirmée comme un foyer majeur de création artistique, musicale et même culinaire. Elle offre toujours aujourd'hui un large choix de musées et d'évènements, et compte de nombreuses salles de spectacle. C'est aussi le berceau de l'histoire américaine, les escaliers emblématiques de Rocky, les *Philly cheesesteak ainsi que la première ville à entrer à l'UNESCO. C'est également ici qu'est né le street art* et les... États-Unis ! De quoi se revendiquer une place à part parmi tous les lieux historiques. La ville fondée par William Penn se visite très bien à pied, car ses points d'intérêts principaux se situent à Center City. Entre le Parc national de l'Indépendance, ses anciennes ruelles, les musées et l'art urbain, Philadelphie répondait à toutes mes attentes.

Je ne travaille plus depuis trois ans, depuis ce fameux jour où un élève de dix-huit ans, du lycée Ulvade est venu, pour une raison encore inconnue, perpétrer un massacre, dans l'école primaire de Robb, où j'exerçais.

Je suis venue vivre ici, un an après la fusillade, lorsque mon fiancé a pris sa valise pour sortir de ma vie. Je n'arrivais plus à mettre un pied dehors, j'avais peur du moindre bruit comme, un pot d'échappement percé, une porte qui claque, des feux d'artifice et j'en passe. Lorsqu'il m'a quitté, à deux mois de notre mariage, j'ai décidé de changer de vie, de fuir ce cauchemar, de ne prendre aucun souvenir qui me ramenait à cette horreur et à ma vie avec lui. De là-bas, je n'ai emporté que ma guitare, seul souvenir qui appartient à mon enfance qui fut elle, heureuse. J'ai dit au revoir à mes parents, leur promettant des nouvelles par Visio. Chaque dimanche soir, je revêts mon sourire de façade pour leur parler, chaque dimanche soir, je leur mens, m'inventant une vie bien remplie à Philadelphie. Je leur dis que je travaille dans une autre école primaire, que je leur apprends le chant. En réalité, je ne sors pratiquement pas, je me fais livrer mes courses que ce soit de l'alimentaire ou du vestimentaire. Mes seules sorties sont pour aller à la pharmacie ou au docteur.

En partant du Texas, j'ai vendu ma moto et mon appartement. Jamie, mon ex, vivait chez moi, nous avions décidé après notre mariage, d'acheter une maison en commun. La vie a voulu que tous ces jolis projets ne voient jamais le jour. Je vis donc sur les ventes de mes deux biens. Mon appartement m'a rapporté quatre cent mille dollars, ma moto, une Harley Davidson Sportster XL huit cent quatre-vingt-trois Iron, dix mille dollars. Actuellement, je suis en location dans une petite maison dont le loyer est de mille deux cent dollars, je peux vivre comme cela au moins vingt ans, sans travailler mais je pense que j'aurais viré du trèfle avant.

Lexique :

*Le cheesesteak de Philadelphie : également désigné sous le nom de « sandwich au steak de Philadelphie », ou simplement cheesesteak, est une spécialité gastronomique de la ville de Philadelphie, en Pennsylvanie, aux États-Unis.

*L'art urbain, ou street art, est, à la fois, un mouvement artistique et un mode d'expression artistique, qui s'affirme ou se revendique ainsi à partir de la fin du XXe siècle.

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