Numéro six

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Tout était maintenant très clair dans mon esprit, mon séjour en psychiatrie, le meurtre de mes parents était le premier domino, celui qui a fait basculé ma vie.

Nous dînions souvent ensemble, c'était comme un événement sacré, le repas. Nous mangions tous ensemble, nous rions, et parlions de notre journée. Papa faisais l'éloge de son nouveau travail. Maman parlait de ses collèges toutes jalouses les unes plus que les autres. Et moi je racontais comment je faisais pour ne pas avoir envie de m'enfuir de classe. C'est vrai que je n'avais jamais vraiment aimé l'école. La maîtresse n'était pas très aimable, elle devait avoir des problèmes et avait vraiment du mal à cacher sa répulsion pour les enfants. Je me disais souvent qu'elle n'avait pas le choix et que sa mère — la directrice avait du l'obliger à passer son temps à l'école.

Mais ce soir, je n'ai pas eu le temps de finir mon récit. Maman est allée cherché le plat de pommes de terre, et n'est jamais revenue. Nous avons seulement entendu le bruit de son corps sur le sol, un carrelage blanc et bleu. Papa est allé chercher son arme sous le canapé. Je n'avais pas connaissance de la place de cette arme jusqu'à aujourd'hui. J'avais peur mais je savais pas que Papa me protègerai.

— Cache toi, c'est important, me souffla Papa.

Je ne voulais pas abandonner Papa, j'imaginais déjà la scène. Il se ferai tuer et je resterai enfermée à tout jamais avec le tueur. Mais j'ai dû obéir. Je suis partie me cacher dans la chambre, un téléphone à la main. J'étais sous le lit, j'avais fermé ma porte à clé. Je composai immédiatement le numéro d'urgence.

— Numéro d'Urgence, bonjour, quelle est la raison de votre appel ?

— Il y a quelqu'un chez moi. Mon père a une arme, et je suis dans ma chambre.

— J'peux avoir votre adresse ? la nana n'avait pas l'air de prendre l'appel au sérieux. Elle était sans doute en stage vu le ton de sa voix, elle devait avoir à peine dix-huit ans.

— J'habite au cent on...

J'entendis des pas dans le couloir. Je pris peur et posa le téléphone à terre. Je dû raccrocher. Je scrutais les objets qui étaient posés sur mon bureau. Lequel pourrais m'aider à frapper cette ordure ? Ma lampe de chevet était trop faible et se serrait brisée, un livre tel qu'un dictionnaire n'aurai pas fait l'affaire. Soudain, j'entrepris quelque chose de fou, mais qui me sauverait peut-être la vie.

Je sortais par la fenêtre, j'étais désormais sur le toit de la maison. Je n'avais plus qu'à passer par la gouttière et descendre, passer par la porte du jardin. J'aurai alors face à moi, bien plus d'armes pour me défendre. Je ne faisais qu'une vingtaine de kilos pour une petite fille d'onze, ce qui ne fit pas bouger la gouttière d'un centimètre. Je n'avais plus peur. L'adrénaline était montée en moi aussi vite que le coup que j'allais donner à cette pourriture. Je pris la clé sous le paillasson pour ouvrir la porte du jardin, et déboula dans la cuisine, en panique. Maman était étalée par terre, elle nageait dans son propre sang. Je fermais ses paupières avec douceur. J'aimais ma famille.

Je pris la plus grosse poêle que je trouvais, et la saisit en main, comme une batte de baseball. Je remarqua un gros 4x4 garé devant la maison. Un homme obèse dormait dedans. Le genre de type vraiment méchant, avec une tête de chien haineux, un peu mafieux sur les bords. Il avait un veston en cuir, sous lequel il avait enfilé une chemise blanche. Il portait une barbe taillée en pointe, c'était laid : à son image.

— La chasse à l'homme commence, Inès, pensais-je.

Je m'avança prudemment vers la voiture. Brisa la vitre avec la poêle. Le gros fit un sursaut.

— Petite, calme toi ! cria le gros, prit de panique.

Il ouvrit la portière, et me fit signe de monter, il n'avait pas vu la poêle. Le temps de monter dans la voiture je remarqua le flingue dissimulé sous son veston. Il faisait mine de m'amadouer. Il devait me prendre pour une de ses gamines stupides. « Tu veux un bonbon ? » et les gamines se font embarquer dans des camionnettes. Je n'attendis pas qu'il me tue, j'allais le massacrer.

— Vous savez, Monsieur, mes parents ne me donnent pas d'amour, je peux vous faire un câlin ? j'allais l'amadouer, je jouais la comédie de la petite fille sans amour. Et ça marchait.

— Mais bien sûr..me lança gentiment le gros porc.

Il me prit dans ses bras, et je glissait habilement ma main sous son veston. Je pris l'arme, me recula et la pointa vers lui.

Il sursauta une deuxième fois. Je pouvais lire sur son visage la panique qui embrasait son corps. Plus besoin de poêle, j'avais une arme entre les mains, et je comptais bien m'en servir.

— Alors mon gros, tu vas m'expliquer qu'est-ce que toi et ton copain, vous faites ici ? dis-je avec un énorme sang froid.

— D'accord, d'accord, tout ce que tu voudras. Écoute, ton père nous..

Il n'eut pas le temps de finir, un tir retentit à l'intérieur de la maison. Impossible de dire si c'était l'arme de Papa ou celle de l'autre gars. Je ne cherchais pas à comprendre, je pris la poêle et le pistolet, et courut en direction de la maison. Je n'eus pas besoin d'ouvrir la porte d'entrée, elle avait été forcée tantôt. Il faisait nuit, je ne voyait pas grand chose dans les marches. Dans ma course contre la montre, je tombais nez à nez avec le tueur. 

Inès et CarolineDonde viven las historias. Descúbrelo ahora